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CHARLES BORROMEE (SAINT)

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    1. CHARLES BORROMEE (Saint)##


1. CHARLES BORROMEE (Saint). - I. Vie II.

Œuvres et doctrine.

I. Vie.

Né au château d’Arona (sur le lac Majeur), le 2 octobre 1538, Charles Borromée reçut tout jeune la tonsure, obtint, à douze ans, un bénéfice à Arona, fit ses études à Pavie (1554-1559), où il eut pour maître le célèbre canoniste François Alciato. Son oncle maternel, le cardinal Jean-Ange de Médicis (d’une autre famille que les Médicis de Florence), devenu pape, le 26 décembre 1559, sous le nom de Pie IV, le manda auprès de lui et Je nomma coup sur coup protonotaire apostolique, référendaire de la signature papale, cardinal, archevêque de Milan. C’est un des rares cas où l’Église ait eu à se féliciter du népotisme d’un de ses chefs. Charles s’acquitta excellemment des devoirs que lui imposaient ces dignités et les plus hautes charges de l’administration qui vinrent bientôt s’y joindre. En 1562, son frère, le comte Frédéric, étant mort, les membres de sa famille, y compris Pie IV, le pressèrent de rentrer dans le monde et de se marier ; Charles coupa court à ces instances en se faisant secrètement ordonner prêtre. Il eut un rôle considérable dans le gouvernement de l’Eglise durant le pontificat de Pie IV. En particulier, la reprise du concile de Trente, interrompu une seconde fois, et son issue heureuse (1560-1563) furent, pour une part importante, son œuvre ; il était en correspondance continuelle avec les légats du saint-siège et les guidait, par des instructions sages et précises, à travers les difficultés <le tout genre qui se présentaient à eux. Le concile fini, Charles devint membre de la commission instituée pour en assurer l’observation et éclaircir les doutes qui pourraient s’élever sur le sens de ses décrets ; il dirigea les travaux de la commission chargée de rédiger le fameux catéchisme romain, terminé en 1564 et publié officiellement par Pie V en 1566. Voir col. 1917-1918. Le concile de Trente avait prescrit la résidence aux évoques : après de longs et inutiles efforts pour obtenir de son oncle la permission de quitter Borne et de s’installer à Milan, il fut autorisé à visiter son diocèse. Il entra à Milan le 23 septembre 1565 et, dès le 15 octobre suivant, tint un premier concile provincial. Rappelé à Borne pour assister Pie IV mourant, il eut la plus grande influence sur l’élection du successeur de Pie IV, saint Pie V (8 janvier 1566). Cf. L. Ranke, Histoire de la’papauté pendant les A’V7e et XVIIe siècles, trad..1. B. llaiber, Paris, 1838, t. ii, p. 149-150. Pie V, non sans quelque résistance, consentit à le laisser retourner à Milan et s’y fixer (5 avril 1566).

On a dit que saint Charles fut, « avec la différence des temps, l’Hildebrand du xvie siècle. » [Brugère, ] Tableau de l’histoire et de la littérature de l’Église, p. 803. Incontestablement il entreprit et réalisa comme pas un la réforme du clergé et du peuple chrétien telle que l’avait voulue le concile de Trente. Six conciles provinciaux (en 1565, 1569, 1573, 1576, 1579, 1582), et onze synodes diocésains, réunis par lui et dont il fut l’âme, s’appliquèrent à cette œuvre. Le principal moyen employé pour restaurer la discipline et relever le sacerdoce, le plus eflicace, fut sans doute l’institution des séminaires ; il en établit trois à Milan et trois dans le reste de son diocèse, ceux-ci équivalant à nos petits Séminaires et ceux-là, l’un d’eux surtout, aux grands séminaires d’aujourd’hui. En outre, il érigea le collège helvétique de Milan, qui devait fournir à la portion de la Suisse catholique appartenant au diocèse de Milan des prêtres vertueux et instruits, capables de s’opposer à la propagation du protestantisme. Sur le rôle de saint Charles dans la conservation du catholicisme en Suisse, cf. J.-.I. Berthier, Lettres de.L-P. Bononiio, nonce apostolique en Suisse, « Pierre Schnewby, prévôt de Saint-Nicolas de Fribourg, et à d’autres personnages i L’. ; ’/ 1586), Fribourg, 1894 ; Analecta boUandiana, Bruxelles, 1895, t. xiv, p. 344. Il fonda une congréga tion de prêtres séculiers, les oblats de Saint-Ambroise, appelés plus tard oblats de Saint-Ambroise et de Saint-Charles, qui s’engageaient par vœu à s’offrir à l’archevêque et à se rendre partout où le demanderaient les besoins du diocèse. C’est à eux qu’il confia les séminaires et collèges qu’il avait d’abord mis sous la direction des jésuites. Sur les accusations contre les jésuites qui se lisent dans Quesnel, Histoire des religieux de la Compagnie de Jésus, Soleure, 17-40, t. iii, p. 40 sq., et qui sont encore reproduites par le pasteur E.-H. Vollet, dans la Grande encyclopédie, Paris, t. vii, p. 445, cf., 1. Crétineau-Joly, Histoire religieuse, politique et littéraire de la Compagnie de Jésus, Bruxelles, 1846, t. I, p. 489-499. Il institua une société des écoles de la doctrine chrétienne qui comptait, à sa mort, cinq mille trois cent quatre-vingt-dix-neuf membres et tenait, dans la ville et le diocèse de Milan, sept cent quarante écoles. La réforme du clergé tant régulier que séculier et les efforts de Charles Borromée pour améliorer les mœurs du peuple lui valurent des calomnies et des résistances tenaces, notamment de la part du gouverneur de Milan Bequesenz (1571-1589), du chapitre de Sainte-Marie de la Scala et de l’ordre des humiliés. Un religieux de cet ordre, gagné à prix d’argent, résolut d’assassiner l’archevêque et, dans ce but, lui tira un coup d’arquebuse (27 octobre 1569) ; heureusement la balle ne fit qu’eflleurer la peau de Charles. A la suite de ce crime, l’ordre des humiliés fut aboli par le pape (1570), et l’opposition diminua et devint circonspecte. Exigeant vis-à-vis des autres, Charles Borromée fut sévère envers lui-même. D’une austérité de vie effrayante, il n’eut guère la bonne grâce et le sourire d’un François de Sales, soit que son tempérament s’y prêtât peu, soit que les maux à guérir réclamassent avant tout ^es remèdes énergiques ; mais de toutes les vertus qu’il demandait il donna héroïquement l’exemple. La peste qui ravagea Milan en 1569-1570 et, mieux encore, celle qui sévit en 1576, ont montré ce qu’il peut y avoir de dévouement dans un cœur d’homme et rendu immortelle sa mémoire. Cbarles mourut le samedi 3 novembre 1584, à la troisième heure de la nuit. Il fut canonisé, par Paul V, le 1 er novembre 1610. Voir la bulle de canonisation dans L. Cherubini, Magnum bullarium romanum a Clémente VI II usque ail Gregorium XV, Lyon, 1673, t. iii, p. 253-257. Sur la diminution du culte de saint Ambroise après la canonisation de saint Charles, voir la réponse que fait à Marc-Antoine de Dominis Benoit XIV, De servorum Dei beali/icatione et bealorum canonizatione, t. I, c. xiii, n. 15, Opéra omnia, Bassano, 1767, t. I, p. 37.

II. Œuvres et doctrine. — Charles Borromée fut, toute sa vie, très studieux parmi les occupations les plus absorbantes. Cf. G. -P. Giussano, Vitadi sa n Carlo Borromeo, Brescia, 1612, p. 437-438. A Borne, il créa une académie de savants, ecclésiastiques et laïques, dont les membres se réunissaient, le soir, chez lui, au Vatican, et présentaient des dissertations qui roulèrent d’abord sur des sujets littéraires, puis sur des matières théologiques ; on les discutait avec une belle ardeur. De ces libres entretiens Charles tira le fond d’un recueil intitule : Noctes raiicann’scn sermones habiti in acadeniia Romm in palatin Vaticano instituta. Nous avons de saint Charles des homélies et des lettres. Mais ce qui mérite principalement d’attirer notre attention, c’est l’ensemble des actes de son administration pastorale. Il en avait publié un volume sous le titre d’Acta Ecclesiæ Mediolanensis ; un second volume parut après sa mort. Cette collection se compose de six parties : 1° les conciles provinciaux, édit. de Lyon, 1683, t. i, p. 1-264 ; 2° les synodes diocésains, p. 265-342 ; 3° Edicta varia, ordinationes et décréta, p. 343-389 : a remarquer Vedictum de Imreticis, p. 343-344 ; celui qui défend l’emploi des exemplaires de la Bible et des livres de