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CHARITE


unanimes à défendre la suffisance du baptême de désir en cas de nécessité, Vega, De justificationc, t. V, c. Xiv ; Bellarmin, De baptismo, t. VI, c. vi ; Vasquez, In 117 am, disp. CLII, c. i ; Suarez, De sacramentis, disp. XXVII, sect. H, n. 2 sq. ; Sylvius, In 772 am, q. lxvi, a. 11, q. I, soutiennent communément la suffisance du désir implicite, en se basant sur ce que la nécessité d’un désir formellement explicite n’est impérieusement exigée ni par la nature de la justification dans l’ordre actuel ni par un spécial commandement divin. En même temps les bases théologiques de Cano sont jugées inadmissibles. Sa distinction entre les dispositions suffisantes pour la justification et celles qui sont strictement requises pour le salut contredit l’intime corrélation entre la grâce et la gloire affirmée par le concile de Trente. L’assertion de Cano sur la nécessité de la foi explicite et surtout l’application qu’il en fuit à la foi explicite au baptême, loin d’être démontrées, doivent êlre jugées inadmissibles. Vasquez, In IIl* iii, disp. CLII, c. n ; Suarez, loc. cit., n. 9 sq. ; Salmanticenses, Cursus t/teologicus, De pxiiitenlia, disp. IV, n. 14.

Néanmoins, Estius, In IV Sent., dist. IV, p. xvii, Venise, 1748, t. v, p. 112, reprenant et exagérant encore l’opinion de Cano, conclut de l’absolue nécessité du baptême qu’on doit toujours le désirer expressément quand on ne le peut recevoir actuellement, sed ita neccssaviuni est ut cum liaberi potest oninino suscipi debeat sub periculo œlernse salutis, et cum fiaberi non potest, debeat expresse desiderari et voto suscipi, id quod non oportet de sacramentis aliis. Conclusion que rien n’autorise ni dans les textes scripturaires, ni dans la tradition, ni dans les définitions de l’Église. Aussi cette opinion reste entièrement isolée, et à partir du xvii c siècle rien ne rompt plus l’harmonie du consentement théologique sur la suffisance éventuelle du baptême de désir, bien que quelques théologiens comme Gonet, De baptismo, disp. III, a. 1, n. 28, soutiennent encore comme plus probable que le désir explicite est toujours nécessaire, pour la justification comme pour le salut. Si ces théologiens ne visaient que le cas normal des fidèles suffisamment instruits et actuellement attentifs à l’obligation qui leur incombe, leur manière de s’exprimer serait très exacte. Mais s’ils veulent appliquer ce principe même aux non-catholiques invinciblement privés du secours de la révélation chrétienne intégrale ou même invinciblement inattentifs à la stricte obligation actuelle, leur opinion doit être écartée, comme le serait une interprétation analogue de la nécessité d’appartenir à l’Église catholique. Car c’est une vérité certaine que Dieu ne requiert indispensablement pour le salut que les dispositions ou conditions strictement nécessaires d’après la constitution de l’ordre surnaturel, telles que la foi et la charité. Ce qui est exigé par la seule volonté libre de Dieu comme moyen normal pour l’acquisition et la conservation de la foi et de la charité, comme l’adhésion actuelle à l’Église catholique et la réception de certains sacrements, ne peut être indispensablement requis pour le salut que dans la seule mesure ou il est moralement possible pour tel individu. C’est une nécessaire conséquence de la volonté divine de sauver tous les hommes. Car Dieu n’ayant établi ces moyens que pour faciliter aux adultes l’acquisition du salut, ne peut les requérir nécessairement quand par la faute d’autrui ou quelque inéluctable nécessité leur emploi reste impossible. Lu cette occurrence, Dieu accepte la seule réalisation possible, c’est-à-dire l ; i volonté expresse ou seulement implicite d’accomplir ce qui est demandé. Volonté expies i ou explicite pour qui connaît l’institution divine et prête iifïis.mte attention à sa stricte obligation. Volonté simplement implicite dans le cas d’invincible ignorance du commandement divin ou d’absolue inadvertance à

son impérieuse nécessité. Volonté implicite toujours suffisamment contenue dans la pleine adhésion à ce que l’on sait ou à ce que l’on saurait être positivement exigé par Dieu. Ainsi la nécessité de salut reste intacte dans la mesure actuellement réalisable, sans qu’aucun grave inconvénient en résulte pour l’individu.

En appliquant ces principes au sacrement de baptême dans la mesure où il est nécessaire pour le salut, conc. de Trente, sess. VI, c. iv ; sess. VII, De baptismo, can. 7, l’on conclura que la volonté explicite de recevoir ce sacrement n’est point toujours absolument requise chez l’adulte et que la volonté implicitement contenue dans toute vraie contrition ou charité parfaite peut parfois suffire. Chez les infidèles négatifs qui parviennent au salut ce doit être la condition habituelle ; et l’on peut leur assimiler les hérétiques qui ignorent invinciblement la divine institution du baptême.

c) Application particulière à l’efficacité de la contrition ou de la charité parfaite en face de la nécessité du sacrement de pénitence. — La doctrine que nous venons d’exposer s’applique également au sacrement de pénitence, vraiment nécessaire pour le salut du baptisé qui a commis quelque péché mortel. Dieu, en confiant à son Église le pouvoir de remettre les péchés, a voulu que tous les chrétiens fussent dans la nécessité de recourir à ce pouvoir pour obtenir le pardon. Aussi nulle contrition n’est sincère si elle n’est accompagnée de quelque volonté de recevoir le sacrement de pénitence. Volonté qui tient lieu de l’accomplissement quand celui-ci est réellement impossible. Car Dieu, qui veut le salut de tous les hommes, ne peut exiger une condition irréalisable, quand l’âme possède les deux dispositions absolument nécessaires pour le salut, la fui et la contrition ou charité parfaite. Si les Pères des premiers siècles n’ont point nettement formulé cette conclusion, ils l’ont virtuellement admise dans ces affirmations générales que Dieu n’exige pour le salut aucune condition impossible, que la charité est toujours inséparable de la grâce et qu’aucun péché n’est irrémissible pour qui veut sincèrement se repentir. Comment pourrait-on, avec les Pères du IVe siècle qui ont énergiquement combattu les novatiens, et avec les Pères des siècles suivants, soutenir qu’aucun péché n’est irrémissible en cette vie si l’on place toute une catégorie de pécheurs, ceux qui à l’article de la mort sont privés du secours du prêtre, dans l’impossibilité absolue d’obtenir la rémission de leurs fautes ?

La doctrine implicitement contenue dans l’enseignement des Pères des premiers siècles ne paraît pas avoir été expressément formulée avant Hugues de Saint-Victor. Hugues ne mentionne aucun adversaire. Il ne fait que prévenir la déduction que l’on pourrait tirer de l’erreur d’Abélard sur l’insuffisance de la charité vis-àvis de l’absolue nécessité du baptême. Il répond comme dans le cas du baptême et en s’appuyant sur les mêmes raisons : Quod si forte peccator vere pseniteat, sed incurrente articula necessitatis ad confessionem venire non possit, confidenter pronuntio quod in eo summus sacerdos complet quod mortalis non potuit, el apud Deum jam factum constat quod homo quidem vere volait, sed non valuit adimplere, quia confessionem non contemptus excluait, sed impedivit nécessitas. De sacramentis, 1. II. part. XIV, c. viii, P. L., t. ci.xwi, col. f>67. Pierre Lombard dit de même, Sent., t. IV, dist. XVII, n. 2, P. L., t. cxcii, col. « SI : Oportet ergo pœnitentem confiteri peccata si tempus habeat, et ta men antequam sit confessio in ore, ïi votant sit. in corde, præslatur ei remissio. Saint Thomas, (’.ont. gent., I. IV, c. lxxii ; Skiii. theol., Hl q. i.xxxvi, a. 2, dans ce cas de nécessité, établit une absolue parité entre le baptême et la pénitence, d’où il conclut que la volonté de se soumettre au pouvoir des clefs tient lieu de l’accomplisse ni réel. Les théologiens scolastiques repro-