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CHARITE


fucrit nata, nutritur ; cum fuerit nutrita, roboratur ; cum ftieril roborala, perficitur, énumère trois degrés de charité parfaite. — a) La charité commune écartant simplement ce qui est contraire à la divine dilection, ita scilicel ijund nihil cogilel vel velit quod divinse dilectioni sit conlrarium et heec perfectio est communis omnibus caritatem habenlibus. Sum. theol., IIa-IIæ, q. xxiv. a. 8 ; q. clxxxiv, a. 3, ad 3um. Cette charité est encore appelée caritas incipientium, parce que son effort principal est de s’éloigner du péché grave et de résister aux inclinations qui y entraînent. IIa-IIæ, q. xxiv, a. 9.

— b) La charité des proficientes qui s’efforcent de réaliser ce qui est agréable à Dieu, sans cependant éviter tout ce qui lui déplait ou sans tourner constamment vers lui toute l’énergie de leurs affections. — c) La charité des perfecli qui s’efforcent de garder en tout une union intime avec Dieu en évitant tout ce qui lui déplaît et en accomplissant tout ce qui lui est plus agréable. S. Thomas, Sum. theol., II 1 II », q. xxiv, a. 8, 9 ; q. CLXXxiii, a. 4 ; q. clxxxiv, a. 3.

2° Le degré de perfection intensive de la charité ne va pas nécessairement de pair avec la perfection de la connaissance. Ces deux perfections sont d’ordre différent. Tandis que la perfection de l’amour consiste dans l’union affective avec le bien présent ou espéré, la perfection de la connaissance est une parfaite équation entre la vérité objective et la perception. S. Thomas, Sum. theol., Ia-IIæ, q. xxvii, a. 2, ad 2um ; IIa-IIæ, q. xxvi, a. 7 ; Qusest. disp., De car ita le, a. 4, ad 4° m. Ces deux perfections n’ayant aucune connexion nécessaire, peuvent n’être point proportionnées. Ainsi dans la divine ténèbre où Dieu est connu par la foi surtout sous son attribut d’incompréhensibilité et d’une manière indistincte, la connaissance est très imparfaite relativement aux attributs qui restent presque tous invisibles. L’amour envers Dieu est cependant 1res intense.

Mais si la charité peut en perfection surpasser la connaissance, elle ne peut jamais se produire sans quelque connaissance. Les expressions apparemment divergentes de certains auteurs mystiques signifient seulement que la contemplation mystique peut n’être accompagnée d’aucun acte discursif ou d’aucun raisonnement. Thomas de Vallgornera, Myslica theologia divi Thomse, n. 1127 sq., 1134 sq., Turin, 1891, t. il, p.205sq., 209 sq. ; Bossuet, Myslici in tuto, part. I, a. l, c. i, n. 1 sq., Paris, 1836, t. x, p. 401 sq. ; Massoulié, Traité de la véritable oraison d’après les principes de saint Thomas, Paris, 1901, t. i, p. 55 sq. ; Meynard, Traité de la vie intérieure, Paris, 1899, t. ir, p. 27 sq. ; Poulain, Des grâces d’oraison, 3e édit., Paris, 1901, p. 112 sq. Il est d’ailleurs très vrai qu’une intense charité envers Dieu, par les intimes jouissances qu’elle procure, augmente la connaissance expérimentale du divin et dispose en même temps l’àme à recevoir de nouvelles lumières. Nous ne nous arrêterons point à réfuter ce préjugé que la science est par elle-même un obstacle à la vraie dévotion. Elle n’est un obstacle que si elle se conlie enlièremenl en elle-même. Quand elle reste parfaitement soumise à Dieu, elle aide plutôt la dévotion. Scienlia et quidquid aliud ad magnitudinem perlinet, occasio est quod bomo confidat de seipso, et ideo non totaliter se Deo tradat ; ei unie est quod hujusmodi quandoque occasionaliter devotionem impediunt : ei in timplicibus et mulieribus devolio abundal elationem comprimendo ; si tamen scientiam et quameumque ahum perfectionem homo perfecte lien tubdat, ex Itoc ipso devolio augetur. S. Thomas, Sum. thcul., II » 11*, q. i.xxxii. a.’'. ad

La pratique de la parfaite charité n’est point né tirement liée à l’observance îles conseils evangé liques. s. Thomas, Sum. theol., Il » II*, q. i.xxxiv, a. 4.

Celle-ci cependant aide habituellement à mieui réaliser

la charité et à la maintenir plus efficacement. S. Tho mas, Sum. theol., IIa-IIæ, q. clxxxiv, a. 3 ; Cont. gent., t. III, c. cxxx ; Upusculum, xvii, c. VI. —4° A plus forte raison la charité peut-elle être très parfaite en dehors des états mystiques. C’est cependant un fait bien attesté que les âmes qui profitent sagement de ces divines faveurs en retirent le plus souvent un considérable accroissement de charité. — 5° Si parfaite que soit la charité possédée en cette vie, elle ne peut jamais être un continuel état d’union avec Dieu. Ce privilège n’appartient qu’à la vie bienheureuse. S. Thomas, Sum. theol., ll a II*, q. xxiv, a. 8 ; Qusest. disp., De caritate, a. 10. — 6° La perfection de la charité, si intense qu’elle puisse être, ne comporte jamais, ne peut même jamais comporter un amour divin absolument désintéressé, entièrement exempt de tout amour de soi, si légitime qu’il fût. Nous l’avons prouvé précédemmenten exposant la nature du motif de la charité.

/II. GEHÈSB DE L’ACTE DE CHARITÉ PARFAITE. — 1° C’est une vérité de foi qu’aucun acte de charité surnaturelle ne peut être produit sans le secours d’une grâce absolument surnaturelle. Il conc. Arausicanum, can. 25, Denzinger, Enchiridion, n. 168. — 2° Cette grâce absolument nécessaire est-elle toujours une grâce simplement actuelle, même pour l’acte de charité parfaite immédiatement antérieur â la justification ? est-elle, dans ce dernier cas, la grâce sanctifiante à la fois principe de vie surnaturelle dans l’âme justifiée et cause dispositive à la justification ? Question librement discutée par les théologiens et dépendante de cette controverse plus générale : les dispositions immédiates â la grâce sanctifiante proviennent-elles d’une grâce actuelle simplement surnaturelle ou de la grâce sanctifiante simultanément forme accidentelle et cause dispositive à la réception de cette même forme ? Voir GnÀCE. — 3° L’acte de charité parfaite peut être immédiatement produit sans avoir été précédé de dispositions préparatoires plus ou moins éloignées. Témoin de subites conversions miraculeuses dûment constatées. C’est d’ailleurs ce qui résulte du fait communément admis de la sanctification des anges et de la sanctification d’Adam au premier moment de leur existence Il est cependant dans l’ordre habituel que l’acte de charité parfaite soit précédé de l’amour imparfait immédiatement antérieur à l’acte d’espérance. D’où résulte dans l’ordre surnaturel l’importance de ces dispositions préparatoires. S. Thomas, Sum. theol., IIa-IIæ, q. xvii, a. 8.’IV. EFFETS DE L’ACTE DE Cil MUTÉ PAUFAITE EU

deiiqiis de L’action sacramentelle. — 1° Justification extrasacramentelle immédiatement produite dans l’âme. — 1. Fait de l’infaillible connexion entre l’acte de charité parfaite et la justification. — o) Principe général. — C’est une vérité certaine que la grâce sanctifiante est toujours infailliblement produite dans l’âme, toutes les fois que l’âme apporte comme disposition un acte de charité parfaite renfermant la volonté d’accomplir tout ce qui est exigé par Dieu pour la justification.

— a. C’est une déduction certaine de tous ces textes de l’Écriture qui identifient pratiquement la charité actuelle avec l’intégral pardon immédiatement accordé par Dieu au pécheur. Prov., VIII, 17 ; x, 12 ; Joa.. xiv, 21, 23 ; Luc, vii, 47 ; I Pet., iv, 8 ; I.loa.. iii, Il sq., iv, 7, ou qui identifient la parfaite contrition ou conversion avec l’entière rémission des péchés, Ezech., xviii, 21 sq. ; xxxiii, H sq.j Zach., i, 3. Cette charité telle qu’elle est décrite, ne peut être qu’un amour d’amitié envers Dieu et cette entière conversion no peut être réalisée qu’à la même condition. Cet amour d’amitié auquel la rémission des péchés ou la justification est

infailliblement attribuée n’étant autre que la charité parfaite, c’est donc elle qui assure toujours la possession de la grâce sanctifiante. (.Vst ce qui résulte de I identification absolument affirmée entre l’une et L’autre,