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CHALCEDOINE


Il ne restait donc, en fait de dissidents, que Dioscore et son groupe d’évêques égyptiens. Ceux-ci, au nombre de treize, avaient remis la veille à l’empereur une profession de foi que celui-ci transmit à l’assemblée, pour qu’elle en prît connaissance et décidât de son orthodoxie. Les signataires de ce document déclaraient adhérer à la vraie foi et anathématiser Arius, Eunomius, les manichéens et les nestoriens, ainsi que ceux qui soutiennent que la chair du Christ est descendue du ciel et n’a pas été prise de la vierge Marie. Ces dernières paroles pouvaient être considérées à la rigueur comme visant Eutychès ; mais le nom de l’hérésiarque ne s’y trouvant pas mentionné expressément, les Pères déclarèrent insuffisante la profession de foi en question. Mansi, t. vii, col. 51. Là-dessus, les légats du pape exigèrent des Egyptiens une réponse nette et précise sur les deux points suivants : adhérait nt-ils sans restriction à la lettre du pape et consentaient-ils à anathématiser Eutychès ? Ibid., col. 53. Le deuxième point ne souffrit pas difficulté ; Iliéracus d’Aphneum prononça au nom de tous l’anathème contre Eutychès. Quant au premier, il en alla autrement. Les dissidents prétendirent ne pouvoir se prononcer encore ; il leur fallait, disaient-ils, réserver toute décision sur ce point jusqu’à la nomination du nouveau patriarche d’Alexandrie, attendu qu’ils devaient en tout se conformer à l’avis de leur primat. Une décision prise sans ce dernier n’aurait aucune valeur et ne serait pas acceptée par le peuple. On eut beau insister, les presser de toutes les. façons ; on ne put venir à bout de leur obstination, et l’on décida finalement qu’ils ne quitteraient pas Constantinople avant la nomination de leur patriarche et la’solution de la question. Mansi, t. vii, col. 54-62.

Les Pères firent comparaître ensuite devant eux, Mansi, t. vii, col. 51 sq., un certain nombre de prêtres et d’archimandrites eutychiens qui avaient, eux aussi, mais avant l’ouverture du concile, fait parvenir à l’empereur une supplique rédigée dans un sens nettement monophysite. Pressés de désavouer leurs erreurs, ils se retranchèrent derrière des formules vagues et d’une orthodoxie plus que douteuse. Parmi eux se trouvait le fameux Barsumas, l’un des agents les plus actifs du conciliabule d’Ephèse et du monophysisine parmi les moines de Syrie. Voir col. 434-435. L’un de leurs chefs, l’archimandrite Dorothée, tenta l’apoJogie d’Eutychès. Comme on voulait savoir de lui s’il admettait cette théorie de l’hérésiarque « que la chair du Christ n’est pas de même substance que la nôtre », il se contenta de réciter ce passage du symbole de Constantinople : <rapxwO£vxa iI. tt){ i ; apOévrju y.at èvav0p(i)7tr, <iavTa et refusa de s’expliquer plus clairement. On remit à plus tard le prononcé du jugement sur son cas et sur celui de ses compagnons, mais finalement l’affaire en resta là.

C’est dans la Ve session (22 octobre) que devait être définitivement tranchée la question restée jusqu’ici en suspens de l’opportunité d’une décision dogmatique. A plusieurs reprises, dans les sessions du 10 et du 17 octobre, les l’èrcs avaient témoigné assez clairement ne pas vouloir en publier de nouvelle. Ils revinrent ensuite sur cette première résolution et se décidèrent finalement à constituer un nouvel exposé de la foi, au moins sur les points controversés, sans que l’on puisse savoir au reste qui’ls motifs déterminèrent chez eux ce changement de résolution. Le 20 octobre, ils avaient tenu deux fois séance pour examiner l’affaire des archimandrites égyptiens Carosus et Dorothée, ainsi que celle de Photius de T yr. Les actes de cette double session ont été fondus par les compilateurs et les éditeurs avec ceux de la IVe, de sorte que la VIP session est devenue pour ceux-ci la V’. Cf. Hefele, Concil., t. ii, p. 39 1. Il est probable qu’au moment où se tint cette double session il était déjà décidé en principe que l’on rédigerait un nouveau formulaire dogmatique. Nous y voyons, en effet, Euslathe

de Béryte demander que l’on sursoie au jugement de son différend avec Photius de Tyr jusqu’après l’acceptation de ce formulaire. Mansi, t. vi, col. 859.

De fait, dès le début de la session qui est dans les actes actuels la Ve, il est donné lecture aux Pères d’une formule de foi que l’on soumet à leur approbation. Les actes ne nous disent ni quand, ni par qui elle avait été rédigée. Léonce de Byzance, De seclis, act. iv, P. G., t. lxxxvi, col. 1236, nous a heureusement conservé ce détail intéressant que le texte en avait été arrêté la veille, dimanche 21 octobre, par une commission réunie chez Anatole. Tillemont pense, avec Baronius, qu’à en juger par l’ardeur qu’il apporta à la défendre, Anatole devait être le principal inspirateur de cette formule. Mémoires, t. xv, p. 677. Elle n’a pas été insérée dans les actes ; il est donc malaisé d’en déterminer la valeur et la portée ; mais les appréciations dont elle fut l’objet nous permettent de supposer que, tout en étant orthodoxe dans le fond, elle péchait par défaut de clarté ou de précision dans les termes. C’était, vu la nature du débat, un défaut grave et de conséquence. A peine la lecture en fut-elle achevée que des objections et des protestations furent formulées par divers membres de l’assemblée. A Jean de Germanicie qui réclamait des modifications, Anatole fit observer que le texte en avait été unanimement approuvé la veille. Il ajouta qu’elle était parfaitement orthodoxe et, en particulier, que l’expression de ôeotôxo ; devait y trouver place. Mansi, t. vii, col. 99-102. Cette dernière remarque, renouvelée peu après, laisse supposer qu’il y avait quelque divergence de vue sur ce point, sans doute entre Égyptiens et Orientaux. Les légats du pape intervinrent alors dans la discussion pour déclarer, eux aussi, que la formule en question leur semblait insuffisante. Il est donc vraisemblable qu’ils n’avaient pas pris part à la réunion préparatoire tenue la veille chez Anatole, ou, s’ils s’y étaient trouvés présents, qu’ils avaient préféré attendre, pour formuler leurs réserves, la séance générale où ils se croyaient sans doute plus assurés d’être écoutés et soutenus. Ils allèrent jusqu’à menacer, si l’on ne s’en tenait pas à la lettre du pape, de réclamer leurs papiers et de reprendre la route de l’Occident, où l’on ne manquerait pas, disaient-ils, de tenir un nouveau concile. En demandant que l’on s’en tint à la lettre du pape, les légats voulaient-ils exclure absolument toute nouvelle formule de foi, ou simplement obtenir que l’on ne s’écartât pas, dans la rédaction de cette formule, du sens et, si possible, des termes mêmes du document pontifical ? Cette seconde alternative serait plutùt la vraie, puisqu’il semble résulter de la discusion qui suivit que le désaccord portait sur une question de termes et d’expressions. Mansi, t. vii, col. 102-106. Les commissaires impériaux crurent mettre tout le monde d’accord en proposant de confier à une commission mixte, qui serait composée de représentants du patriarcat d’Antioche, au nombre de six, de représentants de l’exarchat d’Ephèse, des provinces d’Illyrie, de Thrace et de Pont, au nombre de trois pour chacune de ces subdivisions ecclésiastiques, et présidée par Anatole et les légats du pape, le soin de rédiger, séance tenante et en leur présence, une nouvelle formule qui serait ensuite soumise à l’approbation des Pères. La majorité était d’avis de n’accepter aucune modification et de s’en tenir à la formule proposée. Elle traita même Jean de Germanicie de nestorien, pour avoir proposé certains changements. L’objet de tout ce pénible débat était une simple formule de trois mois à peine, mais pleine de sens et d’une importance capitale dans la question. Il s’agissait de savoir si l’on adopterait pour exprimer l’union des deux natures dans le Christ, la formule : âx S Jo çûascov, ou si l’on dirait qu’il y a en lui deux natures : 800 çôdei ; » Ïvok. Cette dernière expression, déjà adoptée par l’Iavien pour combattre le mouophysisme, Acta concil. Constantiuop., Mansi, t. vi.