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CHALCEDOINE


Clialcédoine se rattachent comme préliminaires un certain nombre d’autres faits et de documents dont il faut parler sommairement, sous peine de n’avoir qu’une idée insuffisante de la manière dont le débat fut engagé et la question résolue par les Pères de ce concile. Eutychès avait été, en 418, condamné une première fois et déposé de sa charge d’archimandrite par le synode èvSy) ! j.o-j<îa de Constantinople, réuni sous la présidence de l’archevêque Flavien. Il protesta publiquement contre cette condamnation et, en même temps qu’il en appelait au saint-siège, Epist. Eutych. ad Léon., xxi, P. L., t. liv, col. 714-718, il invoqua l’appui de la cour, où il avait un protecteur puissant dans la personne de l’eunuque Chrysaphius. Sollicité à la lois par Eutychès et par Théodose II de casser la sentence de condamnation, le pape saint Léon différa son jugement jusqu’à la réception des actes synodaux expédiés par Flavien. Lorsqu’il les eut reçus et qu’il en eut pris connaissance il se hâta d’approuver la condamnation portée contre g l’erreur téméraire et insensée « d’Eutychès. Epist., xxvii, P.L., t. liv, col. 752. Il annonçait en même temps une instruction dogmatique plus développée, qu’il expédia, en effet, le 13 juin 449, à l’adresse de Flavien. Epist., xxviii, col. 755-782.

Pendant ce temps, Théodose II, circonvenu par Eutychès et par Dioscore, patriarche d’Alexandrie, qui avait pris fait et cause pour ce dernier, avait convoqué à Éphèse, pour le mois d’août, un concile destiné à reviser le procès d’Eutychès. Le pape y fut invité ; et bien qu’il le jugeât, avec Flavien, inopportun, dangereux même dans les circonstances actuelles, il s’y fit représenter par trois légats, parmi lesquels le diacre Ililaire. Le concile s’ouvrit le 8 août 449 et dégénéra bientôt, comme on le sait, sous la conduite de Dioscore d’Alexandrie et de Juvénal de Jérusalem, en un conciliabule où les menaces et la violence même arrachèrent à près de 135 évoques une sentence d’acquittement pour Eutychès et de condamnation pour Flavien. Voyant ses adversaires résolus à le condamner, Flavien en avait préalablement appelé à de nouveaux juges, Mansi, Concil., t. VI, p. 907 ; sans que l’on puisse toutefois décider quel le fut la portée de cet appel, et s’il s’adressait à un nouveau concile général, ou au pape, ou aux deux à la fois. Hefele, Conciliengeschichte, Fribourg-cn-Brisgau, 1856, t. il, p. 360. Quoi qu’il en soit, dans le trouble et la confusion qui suivirent ces tristes événements, les regards se tournèrent de toutes parts vers Rome. C’est de là que devait, en effet, venir pour l’Orient îa lumière et le salut. Saint Léon commença par faire annuler, dans un concile tenu à Rome sous sa présidence (6 octobre 449), tout ce qui avait été décidé à Éphèse. Epist., xlvi, P. L., t. liv, col. 838. Puis il écrivit à Théodose II pour l’engager à désavouer ce conciliabule, qu’il qualifiait d’Ep/ietinum non judicium sed latrocinium, et à consentir à la réunion en Italie d’un nouveau concile. Epist., xliiixi. iv, P. L., t. Liv, col. 821-832. Théodose II hésitait ; le pape renouvelant ses instances, il affirma que tout s’était passé régulièrement à Éphèse, Epist., lxii-lxiv, P. L., t. liv, col. 875-878, et sollicita la reconnaissance d’Anatole, le nouvel élu que l’influence de Dioscore 1 1 de faire élever sur le siège de Constantinople, en remplacement de Flavien déposé. Epist., lxix, col. 890892. Saint Léon exigea au préalable qu’Anatole souscrivit à la condamnation de Nestorius et d’Eutychès et donnât une approbation pleine et entière à sa lettre dogmatique. Puis, revenant sur le projet de concile en Italie, il déclarait qu’il n’en estimait maintenant la tenue nécessaire qu’au cas où les évêques dissidents se refui ent à accepter son exposé dogmatique de la loi. Survinrent sur ces entrefaites (28 juillet 450) la mort de Théodose et l’élévation au trône de, sa sœur Pulchérie et de Marcien. Les nouveaux maîtres de l’empire étaient aussi sincèrement attachés à la foi orthodoxe

que dévoués au saint-siège. Dans la lettre par laquelle il annonçait au pape son élévation au trône, Marcien lui déclara son dessein de réunir le concile projeté, mais en Orient. Epist., lxxvi, col. 904. Saint Léon, lui, préférait remettre à plus tard la réalisation de ce projet. En novembre 450, Anatole avait, dans un synode à Constantinople, accepté la lettre du pape et condamné en présence de ses légats Nestorius et Eutychès. La lettre avait été envoyée aussi aux autres métropolitains d’Orient : tout annonçait qu’elle serait souscrite et qu’un certain nombre d’évêques, jusque-là partisans d’Eutychès et de Dioscore, s’y rallieraient. Saint Léon, informé de ces symptômes d’apaisement, Epist., lxxvii, col.905907, et persuadé qu’un nouveau débat sur ces questions irritantes serait plus dangereux qu’utile, conseilla de différer quin 451). Epist., lxxxiii, col. 919-920.

Mais la lettre du pape n’était pas encore parvenue à Constantinople que déjà l’ordre de convocation se trouvait lancé, et l’ouverture du concile fixée, pour le ^septembre, à Nicée en Bythinie. Mansi, t. vi, col. 551-553. Saint Léon, informé de ce qu’il considérait comme un fâcheux contre-temps, ne refusa pas cependant son assentiment au synode qui allait s’ouvrir, Epist., lxxxix, P. L., t. liv, col. 930, et désigna, pour l’y représenter et y présider en son nom, des légats qu’il munit d’instructions très précises. Epist., lxxxviii, col. 927-930. Cf. Concil. chalc. acta, sess. I, Mansi, t. vi, col. 581 ; sess. XVI, t. vil, col. 443. C’étaient, outre l’évêque Lucentius et le prêtre Basile déjà envoyés en mission à Constantinople, Paschasinus, évêque de Lylibée, le prêtre Boniface et Julien, évêque de Cos. Toutefois ce dernier ne prit pas place au concile parmi les légats du pape, mais occupa son rang parmi les évêques.

II. Histoire du concile.

Déjà les évêques se trouvaient, en assez grand nombre, réunis à Nicée et occupés à préparer l’ouverture des sessions conciliaires, lorsque l’empereur, qui désirait, sinon être présent aux débats, du moins se tenir à proximité du lieu où ils se poursuivraient, afin sans doute d’être en mesure d’intervenir, le cas échéant, les invita à se transporter plus près de Constantinople, à Clialcédoine, sur la rived’Asie. Mansi, t. vi, col. 557. C’est là, dans l’église de la martyre Euphémie, que s’ouvrit, le 8 octobre 451, la plus imposante réunion d’évêques que l’Orient eût jamais vue. Ils s’y trouvaient rassemblés au nombre de 600 environ. Les différents témoignages ne sont pas d’accord sur le chiffre exact. Les actes conciliaires ne nous livrent que des listes incomplètes, Mansi, t. vi, col. 565 sq. ; t. vil, col. 429 sq. ; dans une lettre au pape le synode parle de 520 évêques présents, Epist., xcviii, P. L., t. Liv, col. 952 ; saint Léon donne le chiffre approximatif de 600, Epist., cil, col. 983 ; Tillemont, Mémoires, t. xv, p. 641, admet, tout compte fait, le chiffre de 630 membres présents, y compris les représentants des évêques empêchés de venir en personne. Presque tous les Pères du concile appartenaient à l’Église d’Orient ; l’Occident n’y était guère représenté, en dehors des légats pontificaux, que par deux Africains, Aurélius d’Adrumète et Rusticianus. Cf. Hefele, Concil., t. il, p. 401.

Un autre point sur lequel ne s’accordent guère non plus ni les exemplaires connus des actes synodaux, ni les témoignages des historiens, est celui relatif au nombre exact et au partage des sessions conciliaires. Certains manuscrits ne renferment que les six premières sessions, les seules où l’on ait traité la question dogmatique ; d’autres, incomplets eux aussi, grimpent dans une VIP session toutes les questions traitées et les décisions prises dans les nombreuses sessions qui suivirent. Cl. Hefele, loc. cit., p. 393. Évagre, II. F.., H, 18, P. G., t. lxxxvi, col. 2590, n’en énumère que quinze ; il est manifestement incomplet. Le diacre romain Rusticus, dans sa collection officielle des actes synodaux, répartit les travaux des Pères entre 16.sessions différentes. C’est