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CENSURES DOCTRINALES

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5. Temeraria.

La proposition téméraire, comme la proposition erronée, contredit une doctrine non seulement probable mais assez commune et certaine pour qu’il ne soit pas permis de la nier. Mais elle se distingue de l’autre, ou bien parce qu’elle renferme une opposition moins directe, ou bien parce qu’elle rejette une vérité moins certaine, moins généralement reçue, moins étroitement liée à la doctrine de foi. C’est donc ici affaire d’appréciation et l’on comprend qu’avant tout jugement de l’Église, les esprits les plus prudents puissent hésiter entre la qualification d’erreur ou de témérité. Dans leur embarras, ils finiront parfois par déclarer qu’une proposition est erronée ou au moins téméraire : erronca vel saltem temeraria.

Une proposition est directement téméraire quand elle heurte de front une doctrine théologique assez généralement et constamment reçue parmi les fidèles et les docteurs à raison de ses preuves et autorités sérieuses, Denzinger, n. 1404, ou encore quand elle contredit formellement des institutions ou des coutumes approuvées dans l’Église, bien qu’en elles-mêmes non révélées. Denzinger, n. 1390.

Une proposition qui, prise en sa signification directe, ne mérite aucune censure, peut cependant devenir téméraire, indirectement ou plutôt de façon modale, parce qu’elle en vient à condamner injustement une opinion vraiment ou même plus probable. Denzinger, n. 1389.

Que la témérité soit positive ou négative, il semble importer peu. Une proposition est positivement téméraire quand la doctrine opposée présente de graves arguments d’autorité, de raison ou d’analogie. Elle est négativement téméraire quand elle avance, en matière théologique, une opinion qui n’a aucun fondement. Plusieurs ne veulent pas admettre ce second cas parmi les censures. Il semble bien difficile, en effet, qu’une proposition reste ainsi dans l’état de témérité purement négative : les autorités et les preuves de l’opinion opposée se retourneront toujours, au moins indirectement, contre elle. De Lugo, de son temps, pouvait apporter cet exemple : il en est d’autres que la vierge Marie pour avoir été conçus sans péché. Et il montrait alors comment les autorités ol les preuves de l’immaculée conception, en la présentant comme le privilège propre à la vierge Marie, portaient indirectement contre la proposition susdite et la rendaient positivement téméraire.

Il arrive, certes, qu’un théologien avance, sans preuves suffisantes, une opinion réellement nouvelle, mais vraie. Une telle proposition est subjectivement téméraire, mais elle ne mérite pas la censure, qui suppose toujours une opinion sans fondement objectil d’une manière absolue.

6. lmprobabilis, minus probabilis. — Ces qualifications sont suffisamment claires par elles-mêmes. Divers théologiens ne les retiennent pas au nombre des censures doctrinales. Leur prétention se justifie en matière théorique où ces questions do probabilité et du degré de probabilité peuvent être plus facilement abandon aux libres appréciations des savants. Mais en ma raorale, il peut y avoir de sérieux inconvénients à

ce qu’une opinion soit présentée comme probable, quand

elle ne l’est pas ; et, par suite, il pourra convenir à un

eclésiastique de déclarer cette improbabilité’.

7. A cette première catégorie appartiennent encore certaines qualifications moins usitées : infidelis, insana,

la, fatea. L’infidélité consiste à rejeter toute révélation : et il o-t clair qu’une proposition, ainsi opposée à

toute révélation, serait en mé temps hérétique, l"ne

proposition est aussi infidèle quand « Ile contredit les préambules de la foi, et alors, suivant son objet, elle pourra mériter encore les qualifications d’hérétique,

iouée, etc. Au regard de ces préambules de la foi,

l’on comprend aussi qu’une proposition puisse être dite insensée, absurde, tausse, insatia, absurda, falsa.

8. Au point de vue historique, certaines propositions seront abrogées, surannées, condamnées, déduites de propositions déjà censurées, apocryphes ; ou bien, au contraire, elles seront nouvelles, dans le mauvais sens du mot : abrogata, anliquata, damnala, deducta ex censuratis, apocrypha, nova.

9. Mentionnons encore ces dernières censures très intelligibles : verbo Dei contraria, infideliter allegans verba Scriptural.

Censures de la seconde catégorie.

Il est, avons-nous dit, des assertions condamnées, non pas tant pour leur objet ou leur fond, que pour leur forme défectueuse ou malheureuse. Les propositions sentant l’hérésie ou l’erreur, suspectes d’hérésie ou d’erreur, peuvent aussi se ranger dans cette catégorie quand c’est à raison de leur expression, et non de leur objet ou des circonstances, qu’elles sont ainsi qualifiées.

La série assez longue de ces censures comprend les propositions équivoque, ambiguë, amphibologique, obscure, douteuse, incertaine, présomptueuse, captieuse, malsonnante, suspecte, offensante pour les oreilles pieuses : œquivoca, ambigua, amphibolugica, obscura, dubia, anxia, prxsumptuosa, captiosa, maie sonans, suspecta, piarum aurium offensiva. Ce sont là toutes assertions, irrecevables pour la forme, et qui laissent soupçonner un fond mauvais.

Une proposition est malsonnante lorsqu’elle emploie des mots impropres pour exprimer une vérité et lorsqu’à raison même de ces termes impropres, elle prête aux plus fausses interprétations. Elle est captieuse, au contraire, quand elle est conçue en termes propres et corrects, mais en telle manière qu’ils présentent un sens faux. Enfin elle est olfensive des oreilles pies, quand la manière de s’exprimer blesse le respect dû aux choses saintes. Mais il importe de ne rien exagérer ici, et les oreilles pieuses ne doivent pas manquer de l’intelligence convenable.

Censures de la troisième catégorie.

Ces qualifications ne déterminent plus directement l’opposition à la vérité, dans le fond ou dans la forme ; mais elles marquent surtout les effets mauvais et directs de certaines doctrines.

Si l’influence déplorable touche la religion en général, nous avons une assertion qui ridiculise la religion : subsannativa religionis. Si cette influence atteint l’Église, l’assertion sera attentatoire à la beauté morale de l’Eglise, dérogatoire à la pratique ou aux usages et à la discipline de l’Église, induisant au schisme, schismatique, subversive de l’ordre hiérarchique : decolorativa candoris Ecclesix, derogans praoci sire usai et disciplina : Ecclesise, inducens in schisma, schismotica, subversiva ordinis hierarcltiæ. Au regard de la société civile, ce sera la proposition séditieuse, rebelle, destructive de la société civile elle-même : seditiosa, rebellis, eversiva regnorum. Si l’influence néfaste atteint les mœurs en général, c’est que l’assertion sera dépravée, ou perverse, vicieuse, impure, pas sûre, pas saine, dangereuse pour les mœurs, pernicieuse, scandaleuse, cause de scrupules, séductrice des simples, paralysant de graves résolutions : prava, perversa, vitiosa, impura, non tuta, non sana, periculosa in moribus, pemiciosa, srandalosa, scrupulosa, seductiva, simplicium, suspenniva gravis resolutionis. Si la vertu de loi est atteinte, la proposition se trouve éloignant on détournant de la foi, attentatoire à la pureté’de la foi. dangereuse pour la foi : aversiva a fuie, diversiva a fuir, denigrativa puriiatis fidei, periculosa m fuie. Quand c’est la vertu de religion qui est touchée, l’assertion est idolâtrique ou impie, dérogeant à la piété divine, profane, mêlant le sacré au profane, blasphématoire, favorable à la magie, aux sortilèges, à la superstition, induisant à tenter Dieu'