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CAUSE


cipe analytique un jugement composé de deux termes tels que leur analyse découvre entre eux un lien nécessaire qui les fait affirmer l’un et l’autre. Quand deux termes sont réunis dans un jugement en vertu d’une simple constatation de l’expérience, comme « Napoléon a gagné la bataille d’Austerlitz », le jugement est synthétique. Il importe de bien noter qu’il n’est pas nécessaire pour qu’un jugement soit analytique, que la notion de l’attribut soit née de l’analyse du sujet ou réciproquement : il peut bien se faire et il se fait que les deux termes aient des origines diverses et indépendantes, apparaissent d’abord séparément à l’esprit et ne soient que postérieurement unis dans un jugement. Ce jugement lui-même peut être d’abord synthétique et ne devenir que plus tard analytique, quand l’esprit étant plus éclairé opère l’analyse des termes et y découvre une parenté essentielle qu’il n’avait d’abord pas saisie. Les notions de monde et de création ont été primitivement connues par l’esprit humain et y ont longtemps vécu séparées, le monde étant conçu parla philosophie païenne comme éternel, et la création n’étant guère attribuée qu’aux œuvres de l’intelligence ou de l’art humains. Survint la révélation qui dit que le monde a été créé et le fidèle unit alors les deux termes en un jugement synthétique puisqu’il ne les alliait pas en vertu de leur exigence, et après analyse faite de leur contenu, mais à cause du témoignage divin. Plus tard la philosophie s’attacha au problème, et ayant précisé la notion de création et celle du monde, vit dans la contingence de celui-ci une nécessité pour lui d’être créé et le jugement devint analytique. Une proposition analytique peut donc exister d’abord à l’état d’éléments ou termes séparés, puis à l’état de termes unis par un lien synthétique, puisenfin à l’état de termes soudés par un lien analytique. Iternarquons enfin que, pour un jugement analytique, il n’est pas nécessaire que l’attribut soit contenu dans le sujet, il suffit que, par suite de l’analyse du sujet ou de l’attribut, apparaisse un lien essentiel et nécessaire entre les deux.

5° Si maintenant nous étudions spécialement le principe de causalité, nous constaterons, en premier lieu, qoe ses termes, avant de se réunir, sont nés séparément comme deux aflluents d’une même rivière. L’expérience quotidienne extérieure nous montre des choses qui arrivent, qui commencent à exister ; la conscience nous découvre notre propre causalité. Nous saisissons donc dans des faits distincts ce qui arrive et notre propre causalité. Sans doute quand nous sommes causes, quelque chose arrive en nous, mais quelque chose arrive aussi au dehors qui ne nous apparaît pas immédiatement avec

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Cea idées se rejoignent ensuite et l’analyse montre qu’elles sont essentiellement dépendantes. En effet, en se servant, non pas du principe de causalité, ce qui serait une pétition de principe, mais de la notion de cause préalablement possédée et combinée avec le principe’I identité ou de contradiction, l’esprit découvre un lien e entre cette notion et la notion de chose qui arrive..le puis dire que « ce qui arrive reçoit ou ne reçoit rien ». Ce dilemme est formé par la notion de passivité perçue primitivement par l’esprit combinée avec le principe de contradiction. S’il ne reçoit rien, il reste pareil a lui-même, ainsi que le veut le principe d’iden-Or, comme l’atteste l’expérience, il ne reste pas il à lui-même, honc il reçoit quelque chose. Or, - il reçoil quelque chose, il le reçoit de lui-mi me ou il un autre., 1e puis dire cela, non pas en invoquant le principe de causalité, mais bien Vidée ( ! < causalité combinée avec le principe il contradiction. Or, dans

tout ci’qui co enec d’être, ce qui est reçu c’est l’être,

qui le reçoit est la possibilité, l’essence’ir l.i po sibililé nveloppe nécessairement,

Contient par définition I indifférence à être et à ne pas

être. De l’indifférence à être et à ne pas être, ne peut donc sortir la détermination à être. Je puis encore le déduire, grâce au principe d’identité. Donc ce qui commence à être reçoit l’être d’un autre, a une cause. Le caractère analytique du principe est démontré, puisque les deux termes étant présupposés, de leur comparaison résulte la manifestation évidente de leur lien. S’il est analytique, il n’est donc ni synthétique, ni synthétique a priori, et cette réfutation est ici suffisante contre le kantisme, particulièrement si l’on observe que, contre celui-ci, l’objectivité de l’idée de cause a déjà été établie plus haut.

6° Après avoir prouvé qu’il y a un lien essentiel entre ce qui arrive et la cause, les scolastiques, à la suite d’Aristote, avaient déterminé de la façon suivante la nature des rapports de l’effet avec la cause. La cause et l’effet, disaient-ils, sont divers et pareils en même temps, il y a entre eux des rapports d’opposition et des rapports d’union, des rapports par lesquels se trahit leur diversité, des rapports dans lesquels s’affirme leur parenté.

1. L’opposition se manifeste d’abord avant l’action. Elle est quantitative ou qualitative. Quantitative, parce que le patient et l’agent qui se trouvent dans tout tait de causalité ne sont pas le même être. Cette opposition s’exprime par l’axiome : Omne quod movetur ab alio movetur. Suni. theol., I a, q. il, a. 3 ; q. xxv, a. 1 ; Cont. gent., t. II, c. lxv. — Qualitative, parce que le patient qui va subir l’action de l’agent ne peut pas lui ressembler, sinon l’action n’aurait plus sa raison d’être. Le savant n’instruit pas le savant, mais enseigne à l’ignorant, le chaud n’échauffe pas le chaud de même degré, mais le froid, dit Aristote. De générât, et corrupt., t. I, c. vu. Le Stagyrite en conclut que la cause agit sur son contraire et la philosophie le traduit par cet axiome : Simile non agit in simile. Cf. Suarez, Disp. metaplujs., disp. XVIII, sect. ix, n. 7.

2. Dans l’action, l’opposition de l’agent et du patient se manifeste en ceci que l’agent comme tel est immobile, non necesse est movens moveri, dit l’axiome scolastique. Au contraire, le patient étant le substratum de l’action exercée par l’agent et reçue par lui, est modifié par elle et donc en mouvement, actio est in passo. Cf. P. de Régnon, Métaphysique des causes, t. III, c. ii, Paris, 1886 ; Chollet, De la notion d’ordre, c. iii, Paris, s. d.

3. Deux autres axiomes expriment l’union, la parenté, la similitude de la cause et de l’effet. L’un affirme que l’effet, avant d’exister en lui-même, préexiste dans sa cause : effectus prxexislil in causa. Il y a donc union antécédente des deux, et communion de l’effet à l’existence de la cause. L’autre affirme que la cause se perpétue dans l’effet par la ressemblance qu’elle y met : A gens agit simile sibi. On pourrait presque dire cotisa j>ostexistit in effeetu, à condition de bien spécifier que l’effet préexiste surtout dans la vertu de la cause, c’est-à-dire dans l’énergie et la puissance active de la cause, et que la cause se perpétue dans la forme et dans la ressemblance d’un produit fait à son image.

7° Un autre problème se pose relativement à la cause efficiente. Il ne suffit pas de dire qu’elle existe, et de déterminer ses rapports généraux avec ses effets, il faut encore la découvrir et fixer la méthode qui permettra, un effet étant donné, de définir quelle est sa cause. Les logiciens ont établi cette méthode pour les différentes sciences naturelles, la théologie a elle aussi ses procédés spéciaux qui seront exposés en leur lieu. Voir Méthode THÉOLOGIQUE.

8° Les notions que nous venons d’exposer sont fondamentales pour tout le traité’théologique ! > l)<>o uno et trino. Elles servent non seulement à démontrer que Dieu existe, parce que le monde exige une cause transcendante, un premier moteur immobile, un, infini et absolu ; mais encore elles aident a précisi r le genre de