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CATHOLICITÉ — CATROU

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doctrinales qui existent entre la Haute, la Large et la Basse-Église, les anglicans sont divisés sur nombre de points de la plus haute importance. Quelques-uns, même parmi les dignitaires de cette Église, rejettent la doctrine de la trinité, la divinité de Notre-Seigneur et la nécessité d’appartenir à une Église quelconque. L’unité fait donc totalement défaut à l’anglicanisme. C’est assez dire l’inanité du rêve qu’il caresse d’une union en corps avec l'Église catholique romaine, union dont la base serait la reconnaissance par Rome de ce principe, que l'Église anglicane est une portion de l'Église de JésusChrist. Ce rêve a cependant le mérite de montrer que l’anglicanisme sent la nécessité d’une catholicité qui lui fait manifestement défaut.

2. La plupart des observations précédentes s’appliquent également à l'Église schismatique d’Orient, celle de Russie y comprise. — a) Cette Église manque de l’unité et de la diffusion nécessaires, car elle est divisée en différents patriarcats indépendants les uns des autres, et qui tous réunis n’ont point d’autorité au delà des frontières de l’ancien empire des Turcs ou de celui des Russes. Le schisme oriental, lui aussi, doit son existence à la défection d'Églises particulières qui se sont mises ainsi en dehors de l’unité catholique : quant à convertir, selon l’ordre du Christ, les nations infidèles, ni les Grecs ni les Russes n’en ont jamais eu, à dire vrai, de souci. Cf. Kirchenlexikon, loc. cit., col. 1635 sq. Rs croient cependant à l'Église catholique, en ce sens que l'Église n’est limitée à aucun temps, à aucun lieu, à aucun peuple, ou encore que sa foi, qui, disent-ils, est aussi la leur, s’est répandue dans le monde entier, mais ils n’osent point avancer que leur Église possède en fait cette universelle diffusion. Cf. Wilmers, De Ecclesia Christi, n. 342. — A plus forte raison, aucune des parties du schisme oriental, ni l'Église grecque seule, ni l'Église russe, ne peuvent revendiquer la note de catholicité. Cependant ne pourrait-on pas dire qu’elles sont une partie de l'Église universelle dont l’autre fraction serait l'Église d’Occident ? Cette hypothèse même est insoutenable, puisque tous les liens d’union entre les Églises schismatiques d’Orient et l'Église occidentale sont brisés. Elles n’ont pas la foi de l’Eglise occidentale, puisqu’elles nient la primauté du pape et la procession a Paire Filioque du Saint-Esprit ; elles sont séparées de l'Église occidentale, puisqu’elles ne reconnaissent pas dans le pape le chef suprême de l'Église ; elles ne peuvent donc faire avec les Occidentaux une seule Église qui soit catholique. Disons enfin que si l’Eglise devait résulter de cette fédération de Rome avec l’Orient schismatique, il faudrait en conclure que l'Église a cessé d’exister par le fait de la rupture entre ces deux fractions de l’Eglise.

3. L'Église dite catholique romaine possède manifestement la note de catholicité. — a) Ce qui me retient dml’Eglise, disait saint Augustin, Cont. epist. Manich. fundamenl., c. iv, n. 5, P. L., t. xlii, col. 175, c’est le nom de catholique que l’on donne à elle seule, à ce point que pas un hérétique, quand un étranger lui demande eu s’assemblent les catholiques, n’ose indiquer son église ou sa maison de prière, et pourtant ils veulent tous qu’on les appelle catholiques. Il est clair que ce fait, dont l’actualité est toujours frappante. ni un aveu impo è par i évidence même. — 6) Kn effet, I I -lise romaine, dont l’unité est la plus étroite qui se

imaginer, est manifestement répandue dans tout l’uni vêques et ses établissements de missions

se vi lient sur tous les points du monde ; ses fidèles

nt toutes les langues du globe et appartiennent à touteles nationalités qui se le partagent. Leur nombre est d’ailleurs imposant : sous ce rapport, comme au point de i iphique, aucune secte chrétienne ne

peut se comparer à l’Eglise romaine. Il semble même que cette Église surpasse numériquement toutes les

sectes réunies. Sa catholicité, tant absolue que relative, est donc hors de doute. Cf. Werner, Orbis catholicus. — c) Jésus-Christ a voulu que son Église devint catholique par la conversion des nations, et qu’elle le restât toujours. Or la catholicité de l'Église romaine présente à un degré saisissant ce double caractère. Cette Église a converti toutes les nations où elle a pu avoir accès, et elle continue cette œuvre capitale envers et contre tous les obstacles, tant est puissante la poussée interne qui la porte à faire pénétrer partout l'Évangile. Sans doute, dans le cours des siècles, elle a subi de graves défections, celles par exemple, dues au schisme d’Orient ou de la grande hérésie protestante, mais sa catholicité n’a pas été éclipsée par ces douloureux événements. On constate, en effet, qu’aux époques où ils se produisent, l'Église romaine réparait ailleurs ses pertes par de nouveaux accroissements. Ainsi, dans le temps qui s'écoula entre le commencement du schisme de Constantinople (xiie siècle) et la défection totale de la Russie (vers le milieu du XVe siècle ; cf. Pierling, La Russie et le Saint-Siège, Paris, 1896), l'Église prenait pied et s'établissait dans l’Allemagne septentrionale, la Norvège, la Finlande, la Lithuanie, la Transylvanie, pour ne parler que de l’Europe ; ainsi, au xvie siècle, la conversion des Indes occidentales et de l’Amérique espagnole venait équilibrer et au delà les pertes causées par le protestantisme. Grâce à ces compensations providentielles, l'Église romaine a toujours conservé, nonobstant toutes les désertions, le glorieux surnom sous lequel les siècles n’ont cessé de la désigner avec saint Pacien : Christiauus mihi nomen, cat/tolicus cognomen.

Bellarmin, De conduis et Ecclesia, t. IV, c. n ; Suarez, De fide, disp. III ; Defensio fldei, 1. 1, c. xiv sq. ; Murray, Tract, de Ecclesia Christi ; Mazzella, De Ecclesia ; Wilmers, De Ecclesia Christi, Ratisbonne, 1897 ; Kirchenlexikon, art. liirche ; Dictionnaire apologétique de la foi catholique, art. Église, III ; J. Turmel, Histoire de la théologie positive depuis l’origine jusqu’au concile de Trente, Paris, 1904, p. 163-166, 242.

H. MOUREAU.

CATROU François, jésuite, né à Paris, le 28 décembre 1659, entré dans la Compagnie de Jésus le 5 novembre 1677, se distingua comme littérateur et comme historien. Appliqué d’abord à l’enseignement, puis à la prédication, il renonça à la chaire, malgré ses succès, dégoûté, dit-on, de la somme de temps perdu à apprendre par cœur, et jugeant que sa mémoire faisait tort à son esprit. Appliqué ; successivement aux collèges de Rouen, Rennes, Rourges, Eu, Compiègne, La Flèche, Tours, Orléans, Paris, il fut enfin fixé dans la capitale. En 1701 il y fonda le Journal de Trévoux qu’il devait diriger durant ses douze premières années. Il s’y acquit une réputation de bon critique. La composition de divers ouvrages continua à occuper sa féconde activité jusqu'à la fin de sa vie. Il mourut à Paris le 12 octobre 1737.

Ses principales publications sont une Histoire tics anabaptistes, in-12, Paris, 1695, 1705 ; in-i », 1706 ; in-12, Amsterdam, 1699, 1700 ; l’Histoire du fanatisme dans la religion protestante depuis son origine, in-V Paris, 1706 ; in-12, 1733, 1738, 1710 ; ['Histoire des trembleurs, in-12, 1733. Pour les deux premiers de ces ouvrages l’auteur assure avoir emprunté ses renseignements aux œuvres de Fox, de Penn et de Keilh, et consulté en outre sur les points douteux plusieurs savants anglais. Il les composa plutôt en historien qu’en polémiste, ne voulant point, disait-il, tirer des faits rapportés « un préjugé en faveur de la religion catholique contre la religion protestante », Il avail même annoncé, mais ne tint pas sa promesse, qu’il donnerait ensuite au publie l’histoire îles sectes fanatiques dans l'Église romaine. Cependant il fait observer qu'à ses yeux, entre les protestants et les catholiques, il y a cette différence que les maximes des premiers ont pu donner occasion de renouveler le