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CALOMNIE


Causée. Salmanticenses, Cursus théologies nwralis, tr. Mil, c. ix, n. 122. Mais cette rétractation ainsi accomplie étant d’une réalisation moralement Impossible dans presque tons les cas concrets, il pi-ui habituellement suffire de Be rétracter soi-même auprès des auditeurs immédiats, en prenant les précautions ordinaires pour que la propagation réparatrice ait la même étendue que la destructrice. De Lugo, De juttitia et jure, t. i, disp. , n. 15 s<|. ; Salmanticenses, toc. cit., n. 123. Celte solution s’applique encore avec plus de justesse aux cas de publicité par la presse, qui échappent presque entièrement à tout contrôle adéquat de prévision et de réparation directe. — 3. Les principes généraux sur la complète cessation ou la suspension momentanée de l’obligation de restituer peuvent également s’appliquer à la réparation de la calomnie. Toutefois les causes reconnues connue suffisantes pour l’extinction ou la suspension de l’obligation devront être d’autant plus graves que la culpabilité du calomniateur a été plus prononcée et le dommage plus considérable. — a) D’après ces principes l’obligation de réparer la calomnie n’existe plus quand l’on peut juger prudemment qu’elle est entièrement oubliée, sans danger de retour, Salmanticenses, loc. cit., n. I.'JS ; quand la réputation est d’autre part déjà suffisamment rétablie, de Lugo, op. cit., n. 35 ; Salmanticenses, loc. cit., n. 137 ; quand il y a condonation de la part du calomnié, pourvu qu’il ait le pouvoir d’abdiquer son droit, Lehmkuhl, Theologia nwralis, t. i, n. 1194 ; et même suivant beaucoup de théologiens, Molina, De justifia et jure, t. iv, tr. IV, disp. XLIX. n. 2 ; Lessius, De jaslilia et jure, l. II, c. H, n. 134 ; Silvius, In II* m II- —, q. lxii, a. 2, n. 10 ; Salmanticenses, loc. cit., n. 1 if j ; S. Alphonse de Liguori, Theologia nwralis, t. III, n. 999 ; Lehmkuhl, op. cit., n. 1192 ; quand il y a eu calomnie réciproque et que l’autre calomniateur refuse la réparation exigée par la justice, car il est contraire à l'équité naturelle de maintenir le droit à la réparation en faveur de celui qui de son côté ne veut aucunement réparer le droit d’autrui. Cependant Cajétan, In ll' m 1I X, q. lxii, a. 2 ; de Lugo, op. cit., disp. XV, n. 44, et d’autres théologiens soutiennent dans ce cas l’obligation de la réparation, parce que l’on ne peut continuer un dommage qu’au seul titre de compensation légitime qui dans l’espèce ne peut se réaliser. — b) Dans l’hypothèse où le calomniateur ne peut réparer son injustice sans exposer sa propre vie, l’obligation cesse tant que dure ce danger, pourvu que la vie du prochain ne soit point également menacée. Car, à risque égal, le calomniateur n’a point droit que sa vie soit préférée à celle de sa victime. En dehors de cet extrême danger une simple perte de biens matériels ne peut excuser le calomniateur de l’obligation de restituer. L’on n’excepte que le cas où cette perte dépasserait notablement le dommage causé à autrui, car il n’est point présumable que le calomnié veuille à ce prix exiger réparation. — 4. La réputation du calomnié peut-elle être réparée par une compensation pécuniaire considérée comme proportionnelle ? Conséquemment, à défaut d’autre réparation, est-on tenu à cette compensation V Quelques théologiens l’affirment, en s’appuyant sur ce raisonnement. L’impossibilité n’excuse de l’obligation <le restituer que dans la mesure où elle existe strictement. Or cette hypothèse n est point réalisée dans la circonstance, puisque l’on admet ou l’on suppose encore quelque facilite de fournir une compensation, sinon équivalente, du moins proportionnelle, par laquelle les exigences de la justice sont assez convenablement

sauvegardées. Philippe de la Sainte-Trinité, liis/miationes theologica m Swnmam s. Thomæ, Lyon, 1633,

t. iii, tr. 11, disp. V. du b. iv, p. 337 ; Syl vius, In // /L q, l Ml. a. 2 ; q, XXII. Mais la plupart des théologiens,

rejetant toute équivalence intrinsèque entre la compensation pécuniaire et la réputation perdue, n’admettent aucune obligation dejustice de fournir une telle compen sation, en dehors du cas où elle est imposée judi iairement comme amende pécuniaii i. ce qui rel< te plutôt de la justice vindicative. Banez, lu ll* m 11*, q. lxii. n. 10 ; Salmanticensi iratit, tr. XIII,

c. iv, n. I il, S. Alphonse de Liguori, Theologia rnoralU, 1. 111, n. 1000 ; Lehmkuhl, Theologia moralis, t. i. n. 1 191. D’où l’on peut conclure que le calomnié n’ayant pas un droit certain à être compensé pécuniairement, n’est point autorisé à se rendre justice à soi-même, la compensation n'étant permise que dans le cas d’un droit certain dont on ne peut autrement obtenir la satisiaction. De Lugo, De juttitia et jure, t. i. disp. XV. n Alphonse

de Liguori, Theologia nwralis, t. III, n. lOOl ; Lehmkuhl, op. cit., t. I, n. 1192.

2 » Quant à la réparation des dommages privés ou publics causes par la calomnie. — D’après les principes que nous venons de rappeler, l’obligation à la ri -litution existe dans l’exacte mesure ou ces dommages ont été suflisamment prévus et efficacement voulus.

3 » A ces deux obligations de justice peut se joindre fréquemment le devoir de réparer le scandale donné, surtout quand ce scandale tourne au mépris ou au détriment de la religion. Cette obligation ainsi que la manière de la remplir devront s’apprécier d’après les principes théologiques relatifs au scandale.

i° Quant à l’obligation pouvant résulter d’une calomnie exempte de toute culpabilité formelle : 1. Des que l’on prend connaissance de son caractère injuste et de sa funeste efficacité', il y a devoir de stricte justice d’arrêter l’inlluence mauvaise ainsi causée en toute bonne foi, pourvu qu’on le puisse faire sans un inconvénient personnel trop grave. Cette fatale inlluence ne pouvant être efficacement détruite que par une rétractation ellective, celle-ci s’impose immédiatement, sous peine d’accepter la responsabilité morale de la continuation du dommage, c’est-à-dire du dommage qui, suivant la prévision actuelle, doit résulter de la non-rétractation. Salmanticenses, op. cit., c. IV, n. 121-122. Bien différent du calomniateur coupable qui. dès le début, a prévu et efficacement voulu tout le mal causé, le calomniateur non conscient n’est point tenu à se rétracter lorsqu’il ne le pourrait sans grave atteinte à sa propre vie, à sa réputation ou à ses biens. Salmanticenses. loc. cit.

5° Les obligations résultant de la coopération formelle à la calomnie se déterminent suivant les principes qui régissent la coopération en matière de justice, en tenant compte des causes qui peuvent enlever, suspendre ou modifier l’obligation de réparer la calomnie.

IV. RÉPRESSION INDIVIDUELLE LT SOCIALE.

1° Réprcs sion individuelle. — I. Pour les calomnies dirigées centre soi-même. — ai En soi. indépendamment de toute circonstance qui exige le contraire, il n’y a aucune obligation grave de défendre sa propre réputation calomnieusement attaquée. Il est même en soi très parfait et très méritoire de supporter ces attaques avec une chrétienne résignation et par amour pour Jésus-Christ particulièrement calomnié dans sa passion. Lehmkuhl, op. cit., t. i, n. 1173. — b) Mais quand la réputation personnelf nécessaire pour remplir des devoirs d'état strictement obligatoires ou que de sa perte ou « le sa diminution résulteraient des dommages considérables pour la famille dont on a la charge OU pour des intérêts dont on est r i tvement responsable, à [dus forte raison quand son maintien intégral est indispensable au bien général ou partiel de la société civile ou religieuse, le strict devoir de la défendre ou d’en exiger la juste réparation s’impose comme une conséquence rigoureuse. Lehmkuhl, (or. cit.

— c) Quant au mode de répression, il variera suivant la

nature de l’attaque, privée ou publique, suivant la condition de la ictime et celle des auteurs ou propagateurs de la calomnie et suivant le^ moyens dont on peut disposer pratiquement Ces moyens peuvent être uni mande formelle, parfois même publique, de réparation,