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CARÊME

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ntmi temljejunia interponent D mi,

P. L., t. ii, col. 971. Il semble même que le jeune du vendredi se prolongeai jusqu’au samedi, par man de i. superposition » , comme disaient les Grec I i qui’Tertullien appelle : continuare jejunium. lie jeju niis, c. iv. ihni.. col. 97 :  !.

Quand Tertullien parle des psychiques, il vise ordinairemenl les catholiques romains. De sa critique on

peut donc inférer qu’au commencement du 111e siècle, Rome observait des demi-jeûnes, setnijejunia, les

jours <le stations, soit le mercredi et le vendredi en général ; Ks fervents t continuaient le jeune t du vendredi jusqu’au samedi. A plus forte raison jeûnait-on sans interruption le vendredi et le samedi saints : (lies quibus ablatus est sponsus. Nous ne saurions dire si des le 11e siècle cet usage était déjà lixé et imposé comme règle à tous les fidèles de Rome. Saint [renée, en nous parlant des divergences qui existaient sur ce point dans les communautés chrétiennes au temps des papes Anicet, Hygin, Télesphore et Sixte, dans Eusèbe, II. E., v, 24, P. G., t. xx, col. 501 ; cf. Duchesne, Liber pontificalis, t. i, p. 129, note 2, ne nous rapporte rien de précis touchant la discipline île l’Église romaine à cette époque. Le constitutum par lequel le pape Télesphore aurait établi un jeûne de sept semaines avant Pâques est une fausse décrétale du vie siècle. Liber ponti/icalis, édit. Duchesne, t. I, p. 129.

On a allégué la Xe homélie d’Origène sur le Lévitique pour marquer l’usage d’Alexandrie en matière déjeune au déhut du IIIe siècle : Ilabemus quadragesimse dies jejuniis consecratos. P. G., t. xii, col. 528. Mais ce témoignage est sans valeur. L’homélie n’existe que dans le remaniement latin de Rulin, qui y introduisit, volontairement ou non, en parlant d’un carême de quarante jours, une coutume qu’il avait sous les yeux, à la fin du IVe siècle. Ce point est bien mis en lumière par Funk, op. cit., p. 252-254. On peut s’étonner que le Dictionnaire d’archéologie chrétienne et de liturgie, t. I, col. 1183, invoque encore le prétendu témoignage d’Origène. L’usage authentique d’Alexandrie est attesté par une lettre de son évêque saint Denys (f vers 264), adressée à Fiasilide, où l’on voit que le jeûne pascal ne dépassait pas alors une semaine. Denys semble partir de cette idée que le jeûne de six jours doit être considéré comme une règle ancienne et générale. Mais il constate qu’il y a beaucoup de diversité dans les observances. Même parmi ceux qui jeûnent les six jours, tous ne le font pas d’un trait et sans interruption ; il y en a qui ne jeûnent que deux jours de suite, d’autres trois, d’autres quatre ; il y en a même qui ne se soumettent pas tout un jour au jeûne strict et absolu. Enfin quelques-uns ne jeûnent ni peu ni beaucoup les quatre premiers jours et croient faire quelque chose de magnifique en consacrant au jeûne (à un jeûne continu) le vendredi et le samedi saints. P. G., t. x, col. 1277. On remarquera, dans le texte, le terme CTrepTiŒTTai, superponere, plusieurs fois employé par l’auteur. C’est l’expression que Tertullien traduit par continuare jejunium, pour signifier un jeûne ininterrompu. Le jeûne « continué (lu vendredi et du samedi saints a pour but de satisfaire au précepte du Sauveur et de célébrer l’anniversaire des jours quibus ablatus est sponsus. Luc, v, 35 ; Marc, il, 20. C’est là, sans contredit, le jeune pascal primitif observé dans les églises issues de la gentilité. Saint Denys ne soupçonne pas que le jeûne de six jours a une autre origine, une origine judaisante. On en trouve l’explication et la justilication dans la Didascalie des apôtres.

La Didascalie, qui date du nr siècle (et vraisemblablement de la seconde moitié, cf. Nau, Sur la date de la Didascalie, dans Le canoniste contemporain, t. xxv [1902], p. 257 s(|.), est un témoin de l’usage syrien. Elle

ordonne déjeuner, à partir du lundi (saint !. si jours Complètement jusqu’à la nuit qui suit le samedi, et

cela est compté pour une semaine. » C. xxi, loe. p. IH. Cette fixation d une semaine dérive apparemi de la coutume juive mentionnée par l’Exode, xii. par le Deutéronome, .’.'>, d’après laquelle les Hébreux, au temps de la Pâque, devaient se nourrir d int sept jours du < pain de l’affliction i I chrétiens, qui vécurent quelque temps sous le n r des pratiques juives, firent passer ce jeûne de sept jours dans 1 usage de I Eglise. Mais comme le Christ avait marqué que ses disciples ne devaient jeûner que pendant la disparition de I Epoux : < vt » l ablatus fuerit ab illis sponsus jejunabunt, Luc, v, 35, il fallut faire coïncider le jeûne avec les jourqui précédaient la résurrection. Et l’école que ré]) !, -ente la Didascalie trouva moyen de combiner une semaine de jeûne avec le texte de saint Luc. Dans son système, qu’elle explique longuement, c. xxi. les pharisiens songèrent dès le lundi à faire mourir le Christ. Ce fut donc le commencement de la disparition de l’Époux. D’ailleurs, connue il est interdit de jeûner le dimanche, « car celui qui s’afflige le jour du dimanche commet un péché, » Didascalie, loc. cit., p. 25, les six jours de jeûne comptèrent pour sept, c’est-à-dire pour une semaine. Le jeûne ne comportait pas la même rigueur pour chaque jour, i Depuis le dixième’jour de la lunei. qui est le lundi, vous jeûnerez, et vous ne mangerez que du pain, du sel et de l’eau, à la neuvième heure, jusqu’au jeudi. Le vendredi et le samedi vous jeûnerez complète : et vous ne goûterez rien. » Ibid., p. 24. Par cette distinction, la Didascalie elle-même semble reconnaître que la vraie disparition de l’Époux ne compte absolument qu’à partir du vendredi. Et cela donne la clef des divergences que l’on observe dans les usages des églises.

Tel apparaît dans la variété de ses formes, au IIe et au IIIe siècle, le jeûne préparatoire à la fête de Pâques. Ce n’est pas un jeûne quadragésimal. On l’appelle simplement le jeûne pascal, et il conservera cette dénomination chez les Pères grecs durant la période suivante.

Nombre de critiques et non des moins considérables se sont demandé si ce jeûne pascal n’était pas précède, même dès les premiers siècles, d’un jeûne quadr sirnal. Cf. Thomassin, Traité des jeûnes de l’Eglise, part. I re, c. iv. S’appuyant sur l’autorité de quelques Pères, notamment de saint Jérôme et de saint Léon, ils ont affirmé que le carême était d’institution apostolique. Saint Jérôme, en effet, dans son Epist., xli, c. iii, ad Marcellam, P. L., t. xxii. col. 475, dit expressément : Nos unam quadrages’nnani secundum traditionem apostolorum, toto orbe jejunatnus ; et saint Léon recommande aux fidèles de son temps : ut apostolica ins/itutio quadragiuta dierum jejuniis inipleatur. Serin., m. in Quadrages., c. ii, P. L., t. liv, col. 633. c’est le cas de rappeler la règle si sage posée par le P. de Smedt, Revue des questions historiques, 1 t. ii, p. 331 : « Je ne m’appuierai jamais sur les ai tions générales des Pères du iv siècle et à plus forte raison des temps postérieurs par rapport aux institutions primitives. Les Pères sont des témoins auu il de la tradition dogmatique pour le temps ou la contrée où ils vivent, mais ils n’ont, comme tels, aucune autorité spéciale quant à la tradition historique, et j’ai rapporté ailleurs. Principes île la critique historique. p. 232, des exemples frappants pour montrer qu’on ne peut avoir une aveugle confiance dans leurs affirmations même les plus péremptoires en matière d’érudition. »

Que saint Léon et saint Jérôme se soient trompée sur l’origine du carême, c’est ce qui résulte clairement du silence des Pères des trois premiers siècles. Nous.rdéjà fait observer que les témoignages empruntés au pape Télesphore. à saint Ircnée et a Origène sont des textes apocryphes. On en peut dire autant du texte du