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CALIXTE III


lui au prix de tant de sacrifices durent s’employer à combattre le bandit Piccinino, qui avait envahi le territoire de Sienne. Burckhardt, t. i, p. 31. Piccinino fut battu près du lac de Trusimène, mais le roi de Naples lui offrit un asile et le sauva ; il fallut acheter bien cher la tranquillité momentanée du bandit. En septembre 1155, les premiers vaisseaux équipés par les ordres du pape avaient été envoyés par lui au secours des îles de la mer Egée, que les Hottes ottomanes assiégeaient. Les trois commandants de la petite escadre pontificale manquèrent honteusement à leurs instructions et se mirent au service du roi de Naples qui les employa à donner la chasse aux vaisseaux génois et vénitiens, et à ravager les côtes génoises. Le pape dut casser l’archevêque de ïarragone, commandant en chef de sa flotte, et le remplacer par le cardinal Scarampo. Raynaldi, an. 1456, n. 13 sq. Le légat partit pour Naples avec sa Hotte composée de 25 bâtiments ; il devait rallier les galères promises par le roi de Naples ; mais celui-ci, qui avait dépensé en fêtes et en guerres contre les Génois l’argent extorqué aux églises de ses États en vertu des bulles de croisade, retusa, sous divers prétextes, de tenir ses promesses. Le pape lui reprocha son indigne conduite. Raynaldi, an. 1456, n. 12. Cette lettre n’ayant produit aucun effet, Scarampo reçut l’ordre de prendre la mer malgré la faiblesse de sa petite escadre. Le cardinal obéit et, après avoir mis en état de défense les îles grecques, s'établit à Rhodes, où il avait un bon arsenal, pour attendre les secours envoyés par les princes chrétiens.

Ces secours, hélas ! ne vinrent pas. L’empereur Frédéric III, pacifique et sans autorité, ne pouvait réagir contre l’inlluence du clergé allemand, presque tout entier opposé à la croisade. Charles VII, prétextant l'état déplorable où se trouvait la France au sortir de sa longue guerre avec l’Angleterre, défendit d’abord la publication des bulles de la croisade ; et l’université de Paris eut la lâcheté d’interjeter appel de ces bulles au futur concile. Du Boulay, t. v, p. 609. Le duc de Bourgogne, manquant à toutes ses promesses, n’envoya pas plus de secours que les rois de Danemark et de Portugal Les États italiens eux-mêmes, plus rapprochés du pape, et sans cesse harcelés par ses messagers, n'étaient occupés que de leurs mesquines rivalités. La plupart des princes ne laissaient même pas passer à Rome l’argent des dîmes récolté dans leurs États, et le confisquaient sous prétexte de pourvoir à leurs armements pour la croisade. Calixte III, ne pouvant rien obtenir des hommes, se tourna vers le ciel et ordonna par une bulle touchante du 28 juin 1156, Raynaldi, an. 1156, n. 19 sq., des prières spéciales dans tout le monde catholique. C’est dans cette bulle, ibid., n. 22, que le pape accordait cent jours d’indulgence à tous les chrétiens qui réciteraient « entre none et vêpres, au son de la cloche, comme on le fait déjà pour la salutation angélique du soir, trois Pater et trois Ave » . Cette récitilion, jointe à celle déjà en usage dans l'Église des Ave Maria du matin et du soir également annoncés par les cloches, a beaucoup contribué à établir dans le monde chrétien la touchante pratique de l'Ângelus. Voir Am.ki.i s, I. i, col. 1278-1280.

L’héroïque confiance du pape fut presque aussitôt récompensée. Quelques jours après la publication de cette bulle, fihéros hongrois Jean Hunyade attaquai ! l’armée de Mahomet Il qui assiégeait Belgrade. Le 14 juillet Hunyade parvint à s’introduire dans Belgrade après avoir traversé la flotte turque qui barrait le Danube ; le 21, il repoussait victorieusement un assaut de Mahomet II qui, blessé d’une (lèche, dul donner le il de la retraite, abandonnant Bon camp et une partie on artillerie. Raynaldi, an. I 156, a. 35.

La joie du vieux pape fut un n <. Des fêtes et des

prières publiques comme Rome n’en avait pas vu de- |

puis son avènement, célébrèrent cette victoire. Surtout il fit part des événements de Belgrade à tous les princes chrétiens, leur montrant l’occasion propice pour ruiner la puissance des Turcs, et reprendre Constantinople et Jérusalem. Il ne put vaincre leur égoïsme. Charles VII de France permit bien de recueillir la dime dans ses Ktats, mais non pas d’y lever des soldats ; les sommes destinées à la croisade furent employées par lui à armer des vaisseaux qu’il garda pour ses entreprises contre l’Angleterre et contre Naples. En vain le pape rappelait-il au roi l’exemple de ses aïeux, et particulièrement de saint Louis. Raynaldi, an. 1456, n. 3. L’université et le parlement de Paris s’unissaient pour entraver la perception des dîmes par de nouveaux appels au concile ; et plusieurs évêques interdirent les collectes dans leurs diocèses. Raynaldi, an. 1456, n. 4 ; du Boulay, t. v, p. 017, 630.

En Allemagne la résistance fut pire encore. Pour échapper aux demandes des collecteurs pontificaux, les prélats allemands, sous la conduite de l’archevêque de Mayence, tinrent un conciliabule à Francfort-sur-leMain, et prétextant les abus de la cour romaine, refusèrent tout secours financier au légat Carvajal. En même temps ils élaboraient un projet d’union entre les diverses églises d’Allemagne contre Rome ; c'étaient les pires prétentions du concile de Bàle qui relevaient la tête. Gebhardt, Die Gravamina, p. 17 sq. Elles échouèrent grâce à l’esprit chrétien de l’empereur Frédéric III, qui refusa tout appui à ces révoltés ; des lettres du pape stigmatisèrent la lâcheté des prélats allemands. Raynaldi, an. 1456, n. 40. Enfin une lettre insolente de Martin Mayr, le chancelier de Mayence, ayant porté à Rome les griefs de la nation allemande contre la curie, vEneas Sylvius, qui venait d'être nommé cardinal, se chargea de répondre par deux des plus éloquents mémoires qu’il ait écrits. Epist., cccxxxviir, CCCLXIX.

De semblables échecs répondirent aux efforts du pape et de ses légats en Angleterre, à Naples, à Venise, en Portugal. Les croisés hongrois eurent la douleur de perdre à quelques semaines de distance Hunyade et Capistran emportés par la peste (M août et 23 octobre 1156) ; le roi Ladislas de Hongrie, qui s'était décidé à entrer en campagne pour poursuivre Mahomet II, vit la discorde se mettre dans son armée et dut la licencier sans avoir pu s’en servir.

Désespérant des princes de l’Occident, Calixte III se tourna vers les princes chrétiens de Bosnie, de Macédoine et même d’Ethiopie, vers les chrétiens de Syrie, de Géorgie et de Perse ; il s’adressa même au prince mahométan Usumcassan. roi de Perse et d’Arménie, Raynaldi, an. 1456, n. 45 ; 1457, n. 39, les suppliant de s’unir contre l’ennemi commun. L’inertie des monarques de l’Occident rendit ces efforts impuissants, et tous les fruits de la victoire de Belgrade furent perdus. Le pape voulut du moins que la reconnaissance du peuple chrétien célébrât chaque année ce beau triomphe ; la fête de la Transfiguration de Jésus-Christ, fixée au 6 août, devait le rappeler. Raynaldi, an. 1457, n. 73 sq.

La dernière année du vaillant pape fut réjouie par quelques nouveaux succès des armes chrétiennes. Georges Castriot, prince d’Albanie, plus connu sous le nom de Scanderberg, avait reçu de lui quelques sei en 1456 ; il battit à la Tomornitza quillet li.">7) une armée de Mahomel II, quelques semaines plus tard la Hotte du cardinal Scarampo remportait à Mételin une brillante victoire sur les Turcs, dont vingt-cinq vaisseaux furent capturés, Succès rendus stériles eux aussi par l’apathie « les grands États chrétiens.

Jusqu’au bout la lutte contre l’infidèle tint la première place dans les préoccupations de Calixte III. On le voit favoriser les princes en qui il espère trouver les chefs de cette guerre -unie, c’est ainsi que le roi de Hongrie étant mort le 29 novembre li.")7, lepape favorise de tout