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CANON DES LIVRES SAINTS


chsei, c.v, P. L., l. xlii, col. 176-177. Voir t. i, col. 2341. Saint Ildepbonse, Annolationes de cognitione baptisrai, c. ijcxvii-lxxix, P. L., t. xcvi, col. 139-140, dresse Ja liste des livres des deux Testaments que la tradition des anciens reconnaît comme inspirés. Les livres Carolins, 1. III, c. i, P. L., t. xcviii, col. 1114, reçoivent les Livres saints dans le nombre que fixe l’autorité de la sainte Église catholique.

Ce principe de l’autorité de la tradition ecclésiastique appliqué depuis le IIe siècle pour former le recueil des écrits inspirés, a toujours été reconnu par l’Église catholique, et M. Reuss, Histoire du canon des saintes Écritures, p. 243, le rappelait aux théologiens protestants et reconnaissait franchement que le recueil scripturaire a été ainsi constitué d’après un principe étranger au protestantisme. Cette tradition n’est pas une simple tradition humaine, mais c’est la tradition catholique vivante, organe infaillible de l’enseignement apostolique. Elle s’applique à l’Écriture entière, et elle n’exige pas essentiellement, pour le Nouveau Testament, l’origine apostolique de tous les livres. L’acceptation d’un livre par l’Eglise lui confère la canonicité ; l’origine apostolique d’un livre ne suffit pas à elle seule à prouver que ce livre est inspiré, et le critère de l’apostolat, imagine -’par Michælis, Introductio in N. T., t. i, p. 116, n’a pas été connu dans l’antiquité, qui a parlé seulement de la garantie donnée aux Livres saints par l’autorité apostolique, base et fondement de la tradition catholique. Cf. A. Catharin, In septem epistolas canonicas prœfalio. Cependant des théologiens catholiques regardent l’apostolicité, c’est-à-dire l’origine ou l’approbation apostolique, comme ayant été dans les premiers siècles le principal critère de la canonicité des écrits du Nouveau Testament. Joiion, Le critérium de l’inspiration pour les livres du N. T., dans les Etudes, janvier 1904, p. 80-91. A partir du montanisme cette apostolicité a été, à tout le moins, un moyen de reconnaître les livres que la tradition ecclésiastique avait admis dès le temps des apôtres et transmis comme divins.

3. Décisions explicites de l’Eglise.

L’Église a exercé son droit de reconnaissance officielle des Écritures en portant des décrets particuliers ou généraux, disciplinaires ou dogmatiques, touchant quelques livres inspirés ou la collection entière. Au témoignage de saint Jérôme, Prsef. in Judith, P. L., t. xxix, col. 39, le concile de Nicée (325) a déclaré le livre de Judith canonique. On en a souvent conclu que ce concile avait dressé un canon complet de l’Écriture ; mais saint Jérôme ne le dit pas et il ne reste aucune trace de ce canon. Ilefele, Hist. des conciles, trad. Delarc, t. ii, p. 130, pense que le concile n’a parlé du livre de Judith qu’en passant, en le citant directement ou indirectement et en approuvant ainsi tacitement sa canonicité. Le II" concile général de Constantinople (553) a anathématisé Théodore de Mopsuoste qui rejetait hors du canon le livre de Job et le Cantique des cantiques. Mansi, Concil., t. ix, col. 223-227. Le IVe concile de Tolède, en 633, excommunie quiconque ne reçoit pas l’Apocalypse, reconnue comme livre divin par l’autorité de plusieurs conciles et les décrets synodaux des pontifes romains. Mansi, t. x, col. 624. En effet, un concile romain sous le pontificat de saint Damase, en 382, avait donné une liste complète des Livres saintfl reçus dans l’Église catholique. A. Thiel, De décrétait Gelasii papæ, 1866, p. 21 ; Labbe, Concil., t. iv, col. 1260. Cette liste a été longtemps connue sons le nom de décret de Grélase, parce qu’elle a été reproduite par ce pape (492-496). E. Preuschen, Analecla, Fribourg-en-Brisgau, 1893, p. 147-149 ; Turner, dans70urnai o) theologicals’udies, 1900, t. i, [i. 554-560. Le pape saint Innocent I" l’a encore reproduite en 405 dans sa lettre à Exupére, évéque de Toulouse, n.43, /’. L., t. xx, col. 501. Les conciles d’Ilippone, en 393, et de Carthage, en 397 et 419, ont

dressé un canon analogue. Denzinger, Enchiridion, doc. xix ; Mansi, t. iii, col. 924, 839 ; t" IV, col. 430. Mais ces conciles africains ne prétendaient pas donner d’euxmêmes une décision définitive, puisqu’ils communiquaient au pape Boniface ou aux autres évoques pour le confirmer le canon des livres qu’ils avaient reçus de leurs pères pour les lectures publiques. Voir t. i, col. 2341. En 865, le pape Nicolas I er, dans une lettre aux évêques de la Gaule, s’appuie sur le décret d’Innocent I er concernant les Écritures pour prouver qu’il faut recevoir toutes les décrélales des pontifes romains. P. L., t. exix, col. 902. Le 4 février 1442, Eugène IV promulgua, avec l’approbation des Pères du concile de Elorence, une bulle d’union imposée aux monophysites syriens et éthiopiens. Il y inséra l’ancien canon romain des saintes Écritures ; toutefois son but n’était pas de définir expressément la canonicité des livres cités ; il affirmait seulement « qu’un seul et même Dieu est l’auteur de l’Ancien et du Nouveau Testament, c’est-à-dire de la loi, des prophètes et de l’Évangile, parce que c’est sous l’inspiration du même Saint-Esprit qu’ont parlé les saints de l’un et l’autre Testament dont elle reçoit et vénère les livres » . Mansi, t. xxxi, col. 1736. Voir t. i, col. 1385. Toutes ces décisions, concernant le canon complet de la Bible, n’avaient qu’une valeur disciplinaire ou ne définissaient pas directement la canonicité des Livres saints. C’est le concile de Trente, sess. IV, qui décida dogmatiquement pour la première fois, le 8 avril 1546, la canonicité de ces livres. Voir col. 1593 sq.

Tels sont les critères de la canonicité qui ont toujours été appliqués ou enseignés dans l’Église catholique dès le IIe siècle. Il faut ajouter que plusieurs théologiens modernes, tout en enseignant que les Livres saints sont distingués des livres profanes par le jugement infaillible et le témoignage officiel de l’Église, ont cependant indiqué un autre critérium de l’inspiration des Livres saints. Ils le trouvent dans le témoignage même de l’auteur inspiré, qui, ayant conscience de son inspiration, aurait attesté que le livre composé par lui était divin. François Sonnius, évêque de Bois-le-Duc, De verbo Dci, c. xi, dans Demonst. religionis christ., 2e édit., Cologne, 1563, p. 11-12, distinguait deux manières différentes dont sont discernées les saintes Ecritures. Les auteurs inspirés qui, d’après lui, recevaient immédiatement de Dieu la révélation des choses qu’ils écrivaient, reconnaissaient la parole de Dieu par une illumination surnaturelle et par le témoignage même de l’Esprit inspirateur. Us n’avaient besoin ni de miracles ni de témoignage extérieur. Quand Dieu révèle sa pensée à un homme, il éclaire son intelligence de façon à lui faire discerner que la révélation donnée est la parole même de Dieu. Les autres hommes, qui tiennent la révélation divine de la bouche des prophètes et des apôtres, ont besoin du magistère de l’Église qui leur atteste quels sont les livres inspirés. Or la conscience que les écrivains sacrés avaient de leur inspiration a été appliquée au discernement divin des Écritures. Voici par quel raisonnement : L’homme inspiré, ayant ainsi par révélation divine connaissance de sa propre inspiration, a pu, par ordre de Dieu, l’affirmer à ses contemporains, ou aux prophètes de l’ancienne loi, aux apôtres de la nouvelle, ou seulement à quelque personne digne de foi. Sa parole seule aurait été un témoignage humain sans autorité divine ; pour obtenir une adhésion de foi divine, il fallait des preuves surnaturelles de la vérité de son affirmation, il les fournissait par des miracles et des signes Certains d’une mission divine. Ce témoignage donné dans les circonstances supposées ou inséré dans l’Écriture deviendrai ! sans doute une parole infaillible de Dieu. Magnier, Etude sur la canonicité des sainte » Écritures, Paris, 1892, p. 121-121. Mais en a-t-il été ainsi ? Non. Les noms de beaucoup d’écrivains inspirés de l’Ancien Testament son ! Ignorés ; il n’est pas certain que les auteurs