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CANON DES LIVRES SAINTS

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nait, sa propre doctrine sur l’Évangile. Son critère théologique de la canonicité résultait donc de ion enseignement sur la justification par la foi, appliqué comme norme de démarcation des livres inspi E. Reuss, Histoire du canon des taintet Écritures, p. 339-354 ; Rabaud, Histoire de la doctrine de l’inspiration des san, 1rs Écritures, Taris 1883, p. 38-40. Mélaïuhlhon et Flacius s’appuyaient, connue Luther, sur l’analogie de la toi pour discerner les livres canoniques des non canoniques. Reuss, op. cit., p. 354-356.

2 » D’après Calvinet tes premiers calvinistes. — Calvin s’est demandé comment on peut se persuader que l’Ecriture vient de Dieu. Il a répondu que « l’Esoriture a de quov se faire cognoistre comme les clioses blanches et noires ont de quoi montrer leur couleur et les choses douces et amères leur saveur » . Institution, 1. I, c. VII, n. 2. L’Écriture elle-même, son enseignement, son esprit, ses formes et surtout les effets qu’elle produit sur les lecteurs bien disposés révèlent son origine et sa dignité et imposent les vérités qu’elle proclame. Toutefois ce témoignage que l’Écriture se rend ainsi à elle-même ne repose pas sur des raisons humaines ; c’est le témoignage même que le Saint-Esprit lui rend dans les cœurs. Cet Esprit fait valoir et garantit les marques intérieures que l’Écriture présente de son origine divine. « Que nous lisions Demosthene ou Ciceron, Platon ou Aristote, ou quelques autres de leur bande : je confesse bien qu’ils attireront merveilleusement et délecteront etesmouverontjusquesàravirmesme l’esprit ; mais si de là nous nous transportons à la lecture des sainctes Escritures, veuillons ou non, elles nous poindront si vivement, elles perceront tellement nostre cœur, elles se licheront tellement au dedans des moelles, que toute la force qu’ont les rhetoriciens ou philosophes, au prix de l’efficace d’un tel sentiment, ne sera que fumée. Dont il est aisé d’appercevoir que les sainctes Escritures ont quelque propriété divine à inspirer les hommes, veu que de si loing elles surmontent toutes les grâces de l’industrie humaine. » Ibid., c. VIII, n. 1. Les autres raisons ne sont pas suffisantes pour prouver la certitude de l’Écriture. Le Père céleste, qui y fait reluire sa divinité, l’exempte de tout doute et de toute question. Ibid., c. xi ; S. Iierger, op. cit., p. 113-118 ; Rabaud, op. cit., p. 58-G 0. Pour que ce sentiment se produise, il faut la foi, et Calvin fait appel à l’expérience intime des chrétiens. Voir col. 1399-1400. Les théologiens calvinistes ont reproduit la doctrine du chef de la secte. P. Viret, De vero verbi Dei ministerio, 1. I, c. v ; 1. II, c. in. Ils disaient que l’ancienne Église, en formant le canon, avait été guidée par le Saint-Esprit. Yermigli, Loci comniunes, cl. I, 1. VI, 8. La seconde Confession helvétique, c. i, déclare que l’effet de la lecture de l’Écriture dépend, comme celui de la prédication, de l’illumination intérieure du Saint-Esprit. La Confession des Pays-Bas reçoit ces livres comme saints et canoniques, c’est-à-dire comme règle suprême de la foi, et croit ce qu’ils contiennent, « parce que le Saint-Esprit atteste dans nos cceurs qu’ils émanent de Dieu et qu’ils portent en eux-mêmes son approbation » (a. 5). La Confession française les reconnaît « non pas seulement d’après le sentiment unanime de l’Église, mais beaucoup plus d’après le témoignage du Saint-Esprit et la conviction qu’il donne intérieurement, car c’est lui qui apprend à les distinguer d’autres écrits ecclésiastiques » (a. 4). Cette théorie de la canonioité, appuyée sur le témoignage intérieur du Saint-Esprit, découle du fond même du protestantisme qui écarte les intermédiaires entre Dieu et les âmes et s’en tient surtout à la conscience religieuse de chaque chrétien. Mais elle propose un critère incertain. L’action du Saint-Esprit sur les lecteurs de l’Écriture ne se l’ail pas toujours sentir et n’est pas uniforme. Les protestants répondent, il est vrai, que celle diversité « l’action dépend de la variété des dispositions des lecteurs et de la di versité des voies de Dieu dans l’œuvre du salut, l n pratique donc la théorie est insuffisante, et le* calvinistes eux-mêmes ont varié au sujet des livn - qu appellent apocryphes et ils ont dû recourir à d’autres critères. !.. Reuss, op. <it., p. 3204)

> D’après les calvinistes suisses et 1rs lutliérien* à partir du XVIIe siècle. — Tout en conlinuant à ex. ; l’autorité de lÉcriture au détriment de celle de la tradition, tout en maintenant en première ligne I action intérieure du Saint-Esprit dan^ le cour des fidèles, action sans laquelle la véritable foi n’existe pas. les tbéologiens protestants aboutirent bientôt à rendre < action inutile et superllue et proposèrent d’autres critères qui devaient produire la conviction humaine 1/ humana) préparatoire à l’acte de foi que l’Ecriture est divine. Ils distinguèrent deux sortes de critères. Les uns, dits internes, dérivaient de la forme et du contenu de l’Écriture ; les autres, dits externes, découlaient de son antiquité, de la propagation de l’Évangile, de la foi des martyrs, de la crédibilité des écrits bibliques, du caractère des écrivains inspirés, des miracles et des prophéties, enfin et surtout du témoignage de l’ancienne Église. Mais ils considéraient l’Eglise comme un témoin, qui garde le dépôt et veille à sa conservation, plutôt que comme un juge qui règle le recueil sacré de sa pleine autorité. Elle avait eu le devoir, et non le droit, d’approuver et de recevoir l’Écriture et de dresser le catalogue officiel des livres canoniques. Cependant quelques-uns évitaient de prononcer le nom de l’Eglise et se bornaient à dire que des individus pieux du judaïsme et du christianisme avaient possédé le don de discerner les Écritures canoniques et avaient comporecueils des deux Testaments. L’Église juive avait garanti l’Ancien Testament. Jésus-Christ et les apôtres avaient accepté la Bible hébraïque. L’Eglise primitive avait fixé le recueil des livres inspirés. On discutait seulement si elle y avait compris les deutérocanoniques dont finalement on admit la canonicité. E. Reuss, op. cit., p. 360-392 ; Rabaud, op. cit., p. 143-155.

D’après les critiques modernes.

Depuis Semler, Abhandlung von freier Vnlersuchung des Kanon, 4 vol., 1771 sq., beaucoup de protestants ont traité la canonicité des Livres saints exclusivement d’après les principes de la critique historique. Ils ont rejeté la tradition aussi bien que le témoignage intérieur du Saint-Esprit. Ils se bornent à écrire l’histoire de la formation du canon biblique. Ils discutent les témoignages anciens et les contrôlent par le contenu des livres eux-mêmes. Ils abandonnent en outre la notion traditionnelle de l’inspiration et recherchent seulement quelles et. lient les pensées des écrivains sacrés qu’ils replacent dans leur milieu social et religieux. Les livres bibliques ne sont plus pour eux que des documents de la pensée religieuse telle qu’elle s’est formée autrefois au sein du judaïsme et de la première génération chrétienne. Le canon biblique des deux Testaments n’est donc que la collection des restes de l’ancienne littérature hébraïque ou des livres, apostoliques ou non, qui expriment la pensée des premiers écrivains du christianisme.E. R op. cit., p. 411-431.

Pour la discussion de ces critères, voir Franzelin, Tractatus de divina traditione et Scriptura, part. II. sect. 1. c. II, th. v, vin. : e rdit.. Rome, 1882, p. 37’J-38’J, 397-399 ; Hurler. Theologim thc.r compendium, 3e édit. Inspruck, 1880, th. x.wu. xxviii. p. 154-157 ; Gilly, l’r.cis d’introduction à /Ecriture sainte. Nîmes. lM’, 7. t. i. p. Tli-TC ; Ubaldi, Introdv cram Scripturam, 2- édit, Rome, iss-j. t. î. p. 31-Ch’, 116-131 ; Trochon, Introduction générale. Paiis. 1886, t. I, p 8 F. Schmid, De inspirai orum vi et ratione, Brixen.

Crète, />< divina Bibliorum inspiration*, Uravaln, 1886, p. 11-82 ; Zanecchia, Dii sacra*

non Scripturarum ad mentem S. Thonis ? Aquit s. il 1898), p. 21-28 ; Chauvin, L’inspiration d, s divines h’eritui-sa, Parla, s. d. [1896), p. 7’j-toG.