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WARD. L’INFAILLIBILITE PONTIFICALE


]’ « Église libre dans l’État libre », et sur la « liberté de conscience » ; il s’était contenté de répandre cet article dans son entourage. Par contre, il ne prit aucun ménagement dans son attaque contre le libéralisme théologique que Dôllinger affichait dans son adresse au congrès de Munich. Il dénonça les deux congrès, dans lesquels il voyait un effort pour « décrier la légitime autorité de l’Église en politique aussi bien qu’en philosophie ». Thureau-Dangin, op. cit., t. ii, p. 342.

Aussi laissa-t-il éclater sa joie quand Pie IX publia, en décembre 1864, le Syllabus, accompagné de l’encyclique Quanta cura, condamnant les diverses formes du libéralisme. Il donna aux propositions l’interprétation la plus absolue, celle qui pouvait le plus effaroucher, en plein accord non seulement avec les autres rédacteurs de la Revue de Dublin, mais avec les controversistes ultramontains du continent, et aussi avec Manning qui, « sans tenir compte des exagérations que, avec plus de réflexion et de sang-froid, il eût sans doute hésité à admettre, encourageait Ward, louait ses écrits, approuvait ses interprétations ». Thureau-Dangin, op. cit., t. ii, p. 343.

Ardent propagandiste, il aurait voulu voir tous ses amis accepter ses idées. Une approbation surtout lui eût été précieuse, celle de Newman, qui autrefois avait été « son pape ». Mais Newman avait une égale aversion pour le libéralisme de Dôllinger et pour les outrances de Ward, tout en étant d’accord avec ce dernier sur certains principes. Il reprochait aux rédacteurs de la Revue de Dublin de tendre « les principes jusqu’à ce qu’ils fussent près de se briser » et de présenter « les vérités dans la forme la plus paradoxale ». W. Ward, W.-C. Ward and the Catholic Revival, p. 197-199, 434-459.

Les reproches de Newman ne ramenèrent pas Ward à plus de sagesse. Dans la controverse sur l’infaillibilité, qui suivit l’annonce faite par Pie IX, le 26 juin 1867, d’un grand concile œcuménique et la publication de la bulle d’indiction, Ward prit rang, comme de juste, parmi les défenseurs de l’infaillibilité pontificale. Mais là encore son tempérament outrancier apparut dans la revendication d’une Infaillibilité à peu près illimitée, s’étendant à toutes les paroles, aux moindres directives du pape, dans les refus qu’il opposait aux théologiens d’examiner la portée des actes pontificaux, dans l’accusation de déloyauté qu’il portait contre ceux qui ne partageaient pas ses idées et qui, selon lui, minimisaient le dogme catholique. Ses attaques étaient justes quand il visait les anti-infaillibilistes d’Allemagne, disciples de Dôllinger, suivis par sir John (plus tard lord) Acton, dont les articles dans le North British Review louaient le livre de Janus (Dôllinger), contestaient l’infaillibilité et s’attaquaient au dogme de l’immaculée conception. Mail il fut trop dur vis-à-vis de ceux qui, tout en admettant ce privilège personnel du souverain pontife, ne croyaient pas sa définition opportune ou demandaient que les conditions en fussent précisées. C’était le cas de beaucoup en Angleterre, à la suite de Newman qui s’était plusieurs fois prononcé pour l’infaillibilité du pape, mais s’exerçant dans des conditions strictement limitées. Ils craignaient qu’une telle définition troublât et Inquiétât ceux des anglicans qui se trouvaient sur le chemin de Home. C’est ce qui donna à la controverse son àpreté. Ward s’y engagea avec d’autant plus d’intransigeance qu’il se voyait encouragé par Manning. Celui-ci

lui écrivit : Ce qu’il nous faut, c’est une entière netteté et l’affirmation des plus hautes vérités..le suis convaincu que l’audace est prudence et que notre danger est la demi-vérité. Il me semble que nous ne devons rien faire de plus pratique et de plus sur que

de poursuivre la ligne que vous avez commencée et de nous y tenir à peu près exclusivement. » W. Ward, W.- G. Ward and the Catholic Revival, p. 187 (cité par Thureau-Dangin, op. cit., t. ii, p. 343).

Ward ne tint aucun compte des remarques de Newman qu’il aurait voulu gagner à sa cause et entraîner dans la polémique menée par la Revue de Dublin. C’est cette revue, en effet, qui servait toujours de tribune à Ward ; mais pour donner une plus large diffusion à ses idées, les articles de la revue étaient souvent publiés à part ou réunis en volumes : The aulority of doctrinal décisions wich are not définitions of faith considered in a short séries of essays reprinled from the « Dublin Review », in-8°, Londres, 1866 ; A Letter to Father Ryder, A Second Lelter to Fathcr Ryder, in-8°, Londres, 1867 ; puis À brief Summary of the récent Controversy on Infallibility : being a reply to Rev. Father Ryder on his Postscript, in-8°, Londres, 1868 ; De infallibilitatis extensione thèses quasdam et quæstiones theologorum judicio subjecit W.-G. Ward, in-8°, Londres, 1869 ; The condemnalion of Pope Honorius : an Essay republished and newly arranged from the « Dublin Review », in-8°, Londres, 1879 ; Essays on the Church’s doctrinal autority, mostly reprinted from the « Dublin Review », in-8°, Londres, 1880.

L’adhésion humble et sincère que tous les catholiques anglais, même ceux qui avaient cru inopportune la définition de l’infaillibilité pontificale et qui l’avaient combattue, donnèrent au dogme promulgué par le concile, amena l’apaisement. La déconvenue de Ward devant le triomphe au concile du parti modéré fut compensée par un bref de Pie IX du 4 juillet 1870 qui louait ses efforts et lui accordait la bénédiction pontificale.

Ward ne tarderait pas d’ailleurs à reconnaître lui-même qu’il s’était laissé entraîner au cours de la lutte à des exagérations. Dans la brochure que Newman publia en 1874, sous forme de lettre au duc de Norfolk, en réponse au pamphlet de Gladstone, l’auteur avait relevé et désavoué les outrances de certains catholiques et fait de nombreuses réserves sur certaines de leurs thèses excessives. Ward était visé. Newman l’avait loyalement prévenu. Ward lui répondit : « Je suis de plus en plus convaincu que ma direction était la bonne ; mais je suis aussi de plus en plus convaincu que, de temps en temps, j’ai commis de graves erreurs de jugement, soit dans ce que j’ai dit, soit dans ma façon de dire. » L’excuse qu’il invoquait était sa séparation d’avec Newman, le seul qui pouvait suppléer ce qui lui manquait et « corriger les extravagances, les crudités, suggérer des vues opposées, signaler les exagérations de plume… » W. Ward, IV.- G. Ward and the Catholic Revival. p. 270 sq. À la fin de sa vie, il compléta cet aveu : « Je n’ai maintenant aucun doute que dans diverses parties de mes écrits j’ai été sur un ou deux points beaucoup trop loin. Cela était dû en partie, je l’admets, à réchauffement de la polémique ; mais c’était dû encore plus, je (lois, à un certain désir passionné de pousser tout de suite jusqu’au bout la logique, que je reconnais hautement être l’un de mes principaux défauts intellectuels. » W. Ward. W.-G. Ward and the Catholic

Revival, p. 261 (Thureau-Dangin, <>/<. cit., t. iii, l>. 184).

D’autres questions attirèrent encore l’attention de

Ward. l’usev avait publié successivement en 186°). 1869 et 1870. trois Eirrnikon sur la réunion de l’Église anglicane à l’Église romaine (cf. ici. PuSEYISMl. t. xui, col. 1366, 1384 sq.) : il prenait comme base de l’accord le concile de Trente, mais il se montrait

opposé au svsteme pratique du romanisme », surtoul à ce qu’il appelai ! la mariolfltrie. Dès l’apparition