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VULGATE

VULPES (ANGE)

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serpent, fournit un argument en faveur de l’immaculée conception de Marie, par application à la Mère du Sauveur de ce qui est dit directement d’Eve, tandis que l’hébreu actuel, qui doit se traduire : ipse conteret…, n’exprime que le dogme de la Rédemption sous sa forme générale, auquel le privilège de Marie peut être seulement rattaché comme une dépendance et une conséquence… En fait, la thèse de Franzelin ne trouve aucun appui dans l’histoire des délibérations du concile, où le problème de la conformité de la Vulgate avec l’original dans les textes dogmatiques n’a nullement été envisagé, puisque c’est sur le terrain pratique que s’est toujours placé le concile qui n’a jamais considéré autre chose que l’authenticité au sens juridique de la Vulgate. D’autre part la thèse de Franzelin ne s’accorde pas avec les faits : à plusieurs énoncés dogmatiques de la Vulgate ne correspond pas dans l’original, étudié critiquement, une doctrine même approximativement semblable. On peut citer les passages suivants signalés par le P. Durand, 'Dict. apologétique, t. iv, col. 1978 : Is., ix, 2 ; xvi, 1 ; Jer., xxxii, 22 ; Ps., cix, 3 ; cxxxviii, 17 ; Prov., viii, 35 ; Eccl., vii, — 14 ; Cant., iv, 1 ; Luc, xxii, 1920 ; Joa., i, 9, 13 ; v, 14 ; viii, 25 ; Rom., v, 12. Le cas de Ps., cix, 3, est ainsi traité dans un article publié dès le 1er mars 1895 par M. E. Levesque, P. S. S., sous la signature E. Langevin, dans la Revue du clergé français :

« Le verset Tecum principium in die virtutis tuæ… ex utero ante luciferum genui te enseigne clairement la

génération éternelle du Messie. Or le texte hébreu offre un sens tout autre, où il n’est nullement question de ce dogme ou d’un autre approchant :

« Votre peuple s’offrira spontanément à vous au jour où vous déploierez votre force — Plus [abondante] que la rosée du sein de l’aurore, vous viendra la rosée de votre jeunesse [de vos jeunes gens]. » 

C’est une prophétie de la fécondité de l’Église, royaume du Messie, de sa catholicité et de sa perpétuelle jeunesse. Il ne reste plus rien de la génération éternelle, dans ce sens qui s’adapte plus facilement au contexte et suit mieux le parallélisme. On me dira que le texte hébreu a pu être altéré. Sans avoir un respect exagéré pour le texte hébreu actuel, dont la leçon, il est vrai, ne vaut pas parfois celle des Septante ou de la Vulgate, il faut dire que, dans le cas présent, son sens s’adapte mieux au contexte. Et d’ailleurs comment un texte si formel en faveur de la génération éternelle (selon la leçon de la Vulgate) eût-il été passé sous silence dans un psaume si souvent cité dans le Nouveau Testament, surtout par l’auteur de l’épître aux Hébreux qui avait là un texte convenant admirablement à sa thèse ? La Vulgate présente ici un dogme qui fait défaut dans l’original. » Une telle divergence de sens entre la Vulgate et l’original dans ce cas et les cas analogues, relativement peu nombreux, où elle se présente, ne déroge en rien à l’authenticité de la version latine, au sens où le concile de Trente l’a entendue, et à la sécurité qui doit être assurée aux catholiques dans l’usage liturgique ou théologique de cette version. « Car, dit très bien M. Levesque dans l’article déjà cité, la Vulgate est un document traditionnel en même temps qu’un document biblique. Au lieu d’avoir une preuve exclusivement et formellement biblique, j’aurai une preuve, ou bien à la fois biblique et traditionnelle, ou bien une simple preuve de tradition, selon qu’il y aura ou non un appui dans le texte inspiré. Quand on sait le rôle de la tradition dans l’Église, il n’y a pas lieu de s’étonner en voyant l’Église et la théologie appuyer parfois leurs conclusions sur des textes de la Vulgate, dont l’autorité est faible ou nulle, mais dont la valeur traditionnelle est toujours considérable. »

L’Encyclique Divino afflante Spiritu, publiée le 30 septembre 1943 par le pape Pie XII, a tranché, d’une manière définitive, un certain nombre de questions relatives à la Bible et spécialement celle de la valeur de la Vulgate. Elle a été provoquée par les exagérations d’un anonyme italien qui, dans une brochure adressée aux évêques d’Italie, faisait le procès des méthodes d’exégèse en usage dans l’enseignement, s’en prenait aux méthodes critique et scientifique, faisait fi du sens littéral et déclarait que, d’après le concile de Trente, il fallait s’en tenir exclusivement à la Vulgate. Toute entreprise de critique textuelle est une mutilation de l’Écriture et la substitution du jugement individuel à l’enseignement des Livres saints. Ces thèses, qui n’allaient à rien de moins qu’à confondre les disciplines scripturaires, furent d’abord blâmées par une lettre de la Commission biblique, dans Acta apost. Sed., t. xxxiii, 1941, p. 465 sq., sous la signature du cardinal Tisserant et revêtue de l’approbation pontificale. Deux ans plus tard, le pape devait intervenir personnellement dans l’encyclique citée. Ce document est de capitale importance, faisant très exactement le point sur la question du texte original. L’essentiel n’est-il pas d’en revenir au texte rédigé par l’auteur inspiré, qui nécessairement a plus de poids que toute version ancienne ou récente, si bonne qu’elle soit ? La critique textuelle, qui a fait en ces derniers temps d’immenses progrès, est la réponse des hommes à l’attention de la Providence qui a bien voulu s’adresser à l’humanité. Que l’on ne s’imagine pas qu’il y a une rupture aux prescriptions du concile de Trente sur la Vulgate latine. La déclaration de l’authenticité de cette version ne concerne d’abord que l’Église latine et l’usage public chez elle de l’Écriture et ne diminue en rien l’autorité des textes primitifs. En fait il ne s’agissait pas alors des textes primitifs, mais des diverses traductions latines, mises pour lors en circulation. Parmi elles, le concile a déclaré à juste titre qu’il fallait préférer celle que l’usage des siècles avait confirmée dans l’Église. Cette autorité particulière de la Vulgate et, comme on dit, son authenticité n’ont pas été déclarées par le concile pour des raisons surtout critiques, mais à cause de son usage légitime pendant des siècles, usage qui démontre que, dans les questions touchant la foi ou les mœurs, le texte est exempt de toute erreur, en sorte que, au témoignage et avec la confirmation de l’Église, le texte peut en être allégué dans les discussions, les leçons, les sermons sans crainte d’erreur. Et dès lors cette authenticité n’est pas à proprement parler critique, mais plutôt juridique. Cette autorité de la Vulgate, en matière doctrinale, n’interdit pas, demande plutôt que la doctrine soit prouvée et confirmée par les textes primitifs, que ces textes soient appuyés par d’autres qui mettent en pleine lumière la signification des saintes Lettres. Le décret de Trente, par ailleurs, n’interdit nullement que, pour l’usage des fidèles et pour une meilleure intelligence des saintes Écritures, des versions soient faites en langue vulgaire, en partant des textes primitifs, comme nous savons que cela se pratique avec l’approbation de l’autorité ecclésiastique. Texte latin de l’Encyclique dans Vivre et penser, 3e série ( = Revue biblique, 1945) ; renseignements dans le même cahier, p. 162-164.

L. Venard.


VULPES Ange, des mineurs conventuels († 1647). — Né à Monte-Pelusio, il entra de bonne heure chez les frères mineurs conventuels, où il se distingua bientôt par son ardeur à l’étude et l’extrême subtilité de son intelligence. En 1614, il est admis à Rome au collège de Saint-Bonaventure, puis bientôt va enseigner la théologie à Assise avec le titre de