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    1. TRINITÉ##


TRINITÉ. DÉCISIONS ECCLÉSIASTIQUES

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la Trinité dans Is., vi, 3 : Quem milfam et quis ibit nobis ?N. 66, col. 798.

Gauthier de Châtillon, au 1. III du Contra Judieos, accumule des textes sans valeur de l’Ancien Testament pour prouver la Trinité. P. L., t. ccix, col. 453458. De son côté, Alain de Lille, au 1. III du Contra hæreticos, démontre aux Juifs qu’il n’y a pas contradiction à affirmer une essence et trois personnes, c. iii, P. L, t. ccx, col. 399 D-403 A. Il développe ensuite les preuves ( ?) par l’Écriture, c. iii, col. 403-405 B, et par la raison : arguments tirés de l’unité et du nombre, de la sagesse issue du Père et du nœud qui la rattache au Père ; comparaison de l’âme (mémoire, intelligence, volonté) et de la lumière (l’unique flamme de trois flambeaux conjoints), c. iv-v, col. 405-407 A.

Les autres controversistes ou font silence ou n’ont que de vagues allusions au problème trinitaire. Le meilleur exemple qu’on puisse apporter est celui de Pierre le Vénérable rappelant à propos des « sarrasins » les anciennes hérésies d’Arius, de Macédonius, de Sabellius. P. L., t. clxxxix, col. 665.

Quant aux hérétiques inféodés au dualisme manichéen, ils ne pouvaient que difficilement admettre le principe de la Trinité chrétienne, surtout en considération du Dieu de l’Ancien Testament, le Dieu mauvais. Comment pourraient-ils concéder que le Fils fût l’égal du Père ? Cf. Bonacorsi, op. cit., t. cciv, col. 777 B ; Alain de Lille, op. cit., t. I, c. xxiii, t. ccx, col. 334 C sq. Comment pouvaient-i’s admettre l’action du Saint-Esprit conjointe à celle des autres personnes, puisqu’ils rejetaient le baptême ? Bonacorsi, col. 777 C. D’ailleurs, tous se réclamaient du règne de l’Esprit, qui avait définitivement remplacé celui du Fils de Dieu et de l’Église. Moneta de Crémone nous apprend que ces hérétiques admettaient l’existence des trois personnes, mais formulaient toutes sortes de théories à leur propos en particulier sur ce qui concerne le Saint-Esprit. Op. cit., p. 4, 6, 36. Bien d’étonnant que les papes ou les conciles aient imposé à tous, dès le début du xiiie siècle, la foi en la sainte Trinité.

b) Controverses intérieures.

Les lointains disciples d’Abélard, a-t-on dit, col. 1714, sombrèrent dans une sorte de panthéisme. Amaury de Bène, voir t. i, col. 937, est à citer en premier lieu. Pour lui. Dieu est la forme de toute créature. On se demande quelle est sa pensée au sujet de la Trinité. Ses disciples nous l’apprennent. Selon eux, le Père s’est incarné en Abraham et son rôle se termine au moment où le Fils s’incarne en Marie et commence à agir dans le monde. Mais ni Abraham, ni Jésus ne sont Dieu. Enfin, à l’époque où vivait Amaury, le règne du Fils est terminé. C’est le Saint-Esprit, s’incarnant en tout homme, qui leur apporte à tous et à chacun les prérogatives qui, jusque, la, avaient été le propre d’Abraham, puis du Christ. Cette singulière doctrine qu’on retrouve chez hs joachimites et les guillclmites, voir ces mots, dérivait-elle du trithéisme de Joachim de Flore ? Voir t. viii, col. 1437 sq. Ce qui est certain, s’est qu’elle favorisait singulièrement la rébellion chez les révoltés. Pour les « spirituels » de toute sorte, le règne de l’Église était terminé et devait faire place à celui de l’Esprit. Nous avons là une explication de l’attitude ajrtiecclésiastique de bon nombre des hérétiques du xir » et du xiir » siècles.

David de Dînant, avec un panthéisme plus accentué dans h’sens du matérialisme, aboutissait aux mêmes équenecs en ce qui concerne la Trinité. David fut pareillement condamné au concile de Sens de 1210 et par Robert di Courçon, légat du pape, dans le règlement donné à l’université de Paris, en 1215.

Une figure plus attachant d Joachim de More. Voir t. viii, col. 1425 sq. C’est dans son Libella* de imitâte seu essenlia Trinitatis (non publié) que se trouve la controverse engagée par lui contre Pierre Lombard. Joachim avait traité celui-ci d’hérétique et d’insensé pour avoir enseigné, à la dist. V, qu’ « une chose souveraine est Père, Fils et Saint-Esprit » et dit qu’ « elle n’engendre, ni n’est engendrée, ni ne procède ». Joachim s’imaginait qu’il fallait admettre en Dieu quatre réalités : trois personnes et une essence distinguée des trois personnes et qu’en Dieu donc aucune chose n’existait qui fût tout ensemble Père, Fils et Saint-Esprit, car ce serait admettre une quaternité, savoir : l’essence commune et les trois personnes. Joachim ajoutait même que cette unité d’essence n’était pas proprement et véritablement une unité numérique, mais une simple unité collective et de ressemblance, comme il est dit dans les Actes des apôtres « que la multitude des croyants n’avaient qu’un cœur et qu’une âme ». Ce qui n’empêcha pas Joachim, dans un âge plus avancé, de s’exprimer fort correctement sur la Trinité. Cf. Psalterium decem chordarum. Texte dans Ceiliier, op. cit., p. 831.

4. Les décisions de l’Église.

Il n’est ici question que, des décisions doctrinales, lesquelles se réduisent à deux :

a) Profession de foi imposée par Innocent III à Durand de Huesca (1208).

— En ce qui concerne le dogme trinitaire, deux points y sont fortement accentués :

1. Corde credimus, fide intelligimus, ore eonfltemur et simplicibus verbis allirmamus : Patrem et Filium et Spiritum sanctum très personas esse, unum Deum, totamque Trinitatem coessentialem et consubstantialem et coœternalem et ommpotentem et singulas quasque in Trinitate personas plénum Deum…

Denz.-Baruvw., n. 420.

Nous croyons de cœur, admettons par la foi et confessons de bouche, affirmant notre croyance par ces simples mots : le Père et le Fils et le Saint-Esprit sont trois personnes et un seul Dieu et toute la Trinité est coessentielle, consubstantiellc, eoéternelie et toute-puissante, et chacune des personnes de la Trinité est Dieu tout entier…

On remarquera la formule « coessentielle, consubstantielle, coéternelle », appliquée à la Trinité elle-même et la plénitude de la divinité reconnue à chaque personne. Il y a là une réminiscence du symbole de Léon IX emprunté, quant au sens, aux interrogations proposées par les Slatuta Ecclesise anliqua aux candidats à Pépiscopat. Voir Denz.-Bannw., n. 343 et note. Innocent III ajoute que cette unité divine dans la Trinité est bien celle que nous affirmons en récitant le symbole des apôtres ou le symbole de Nicée et le Quicumque.

2. Patrcm quoque et Filium et Spiritum Sanctum unum Deum de quo ndbts sermo, esse ereatorem, factorem, gubernatorem et dispositorem omnium corporalium et spiriiualiiun, visibilium et invisibilium, conle credimus et ore eonfltemur. N » vi et Veteris Testa unum cumdemque anctorem credimus esse Deum irai in Trinitate, ut diction est, |>ermanens, de nihilo cuncta en ivil … I l, r 1 L.|| : ininv., il. 121.

Nous croyons de cœur et confessons de bouche que cet unique Dieu dont nous parlons, le Père, le Fils et le Saint-Esprit, est le créateur, l’auteur, le gubernateur et l’ordonnât en r de toutes lis choses corporelles et spirituelles, visibles et invisibles. Nous croyons que Dieu est l’unique et le même auteur a la lois il" l’Ancien et du Nouveau Testament, ce Dieu qui, demeurant dans sa Trinité, a crée toutes choses de rien.

L’hérésie dualiste est ici nettement atteinte avec le caractère spécial que lui avalent donné les albigeois, en distinguant l< i >li ii, auteur de l’Ancirn Testami ht, i i le Dit ii, Hifi ur dU Nouveau. Voir ALBIGEOIS, t. i, col. G78. Il s’agit de prémunir les nouveaux convertis conUn l’héré le dualiste ambiante. D’ailleurs cette profession de foi servit à plusii urs reprises pour reoe*