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    1. VULGATE##


VULGATE. AUTHENTICITE

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d’après laquelle le concile aurait voulu dire que l’insertion dans la Vulgate suffit à elle seule pour assurer la canonicité d’un texte. C’est principalement à propos du Commit johanneum que Franzelin avait formulé cette opinion. En ce qui concerne la finale de Marc et le récit de la femme adultère, tous les catholiques sont d’accord pour admettre que ces deux morceaux font réellement partie de l’Écriture et sont canoniques, quelque opinion qu’on puisse avoir par ailleurs sur leur authenticité littéraire et sur la façon dont ils ont été insérés dans les évangiles où ils figurent. Mais les controverses ont été beaucoup plus vives au sujet du Gomma johanneum. Ce verset de la première épître de saint Jean, le « verset des trois témoins célestes », qui constitue une nette affirmation du dogme de la sainte Trinité, ne figure dans aucun manuscrit grec ancien et n’est cité par aucun Père et écrivain ecclésiastique grec, il ne figure même pas dans les meilleurs et les plus anciens manuscrits de la Vulgate, où on ne le trouve guère qu’à partir du xiie siècle, mais la Bible Sixto-Clémentine l’a conservé. Du fait de son absence dans les anciens manuscrits de la version hiéronymienne, il semble bien que le décret du concile de Trente ne lui soit pas applicable. Cependant le Saint-Office intervint dans la controverse élevée au sujet de ce verset, en publiant le 13 janvier 1897 le décret suivant : Proposito dubio, ulrum tuto negari aut saltem in dubium revocari possit, esse authenticum textum I x Johannis, in epistola prima, cap. v, ꝟ. 7, qui sic se habet : Quoniam ires sunt qui lestimonium dant in cœlo, Pater, Verbum et Spiritus Sanctus, et hi très unum sunt ? Omnibus diligentissimo examine perpensis, prsehabitisque B. D. Consultorum voto, iidem Emi Cardinales respondendum mandarunt : Négative. Devant l’émoi causé par cette décision, principalement chez les anglicans, on laissa tout de suite entendre qu’elle ne devait pas limiter la recherche scientifique sur l’origine du Comma, le décret étant surtout d’ordre disciplinaire, et de fait, dès 1905, Kûnstle se prononçait contre l’authenticité du verset, qu’il attribuait à Priscillien. En 1927, la question a été tranchée officiellement par l’insertion dans Y Enchiridion biblicum, à la suite du décret de 1897, d’une déclaration du Saint-Office qui en détermine le sens et la portée : Decretum hoc latum est ut coerceretur audacia privalorum doctorum jus sibi tribuentium authentiam commatis Joannei aut penitus rejiciendi aut ultimo judicio saltem in dubium evocandi. Minime vero impedire voluit, quominus scriptores catholici rem plenius investigarent atque, argifmentis hinc inde perpensis, cum ea, quam rei gravitas requirit, moderantia et temperanlia, in sententiam genuitati contrariant inclinarent, modo profiterentur se paratos esse slare judicio Ecclesise, cui a Jesu Christo munus demandatum est sacras Litteras non solum interpretandi sed etiam fldeliter cuslodiendi. En fait, les travaux les plus récents sur l’origine du Comma n’ont fait que confirmer son caractère de glose privée inscrite d’abord en marge d’un manuscrit, et de là passée dans le texte. L’accord n’est pas fait cependant entre les critiques sur l’origine du verset, et sur la date de son insertion dans les versions latines de la I a Joannis. Priscillien paraît en être le premier témoin certain (fin du ive siècle), mais l’interprétation allégorique en formule trinitaire du texte johannique sur les trois témoins terrestres est beaucoup plus ancienne (on la trouve chez saint Augustin, et saint Cyprien y fait déjà allusion) : si donc le Comma johanneum ne peut être la base d’un argument scripturaire, il demeure un témoin très ancien de la tradition ecclésiastique sur la doctrine trinitaire. Sur le Comma, on peut consulter : J. Lebreton, Histoire du dogme de la Trinité, t. i, 2e édit., 1927 (note K) ; E. Riggenbach, i Bas Comma johanneum, Gutersloh, 1928 ; A. Lemonnyer, art. Comma johannique, dans Suppl. Dicl. Bible, t. ii, col. 67-74 ; J. Chaine, Les épîlres catholiques, j 1939, p. 126-137.

L’authenticité de la Vulgate.

Quand la question dogmatique de l’inspiration et du canon des Écritures i eut été réglée par le décret Sacrosancta, le concile de

Trente, se plaçant cette fois sur le terrain de la pratique

et de la discipline, se préoccupa de parer aux j abus qui s’étaient glissés dans l’usage des Écritures. Le premier de ces abus fut dénoncé par le président de la Commission désignée à cet effet dans les termes suivants : Primus abusus est habere varias editiones sacrx Scripturæ, et illis velle uli pro authenticis in publicis leclionibus, dispulationibus, expositionibus et prœdicationibus… Remedium est habere unicam tantum editionem, veterem scilicet et vulgatam, qua omnes ulantur pro authenlica in publicis leclionibus, dispulationibus, expositionibus et prædicationibus, et quod nemo illam rejicere audeat aut Uli contradicere : non detrahendo tamen auctoritati purse et verse interprelalionis sepluaginla interpretum, qua nonnunquam usi sunt apostoli, neque rejiciendo alias editiones, qualenus authenticse illius intelligentiam juvant.

On voit dans quel sens la question était posée : il ne s’agissait nullement de définir, sous le nom d’authenticité, la conformité de la Vulgate aux textes originaux, mais de lui conférer une authenticité d’ordre juridique, qui en ferait la version latine officielle de l’Église, devant être comme telle employée dans l’usage théologique et liturgique, à l’exclusion des autres traductions latines, sans que personne pût en contester l’autorité. Certains Pères du concile, préférant une solution plus radicale, auraient voulu qu’on condamnât l’usage de toutes les versions autres que la Vulgate : leur avis ne prévalut pas. D’autres souhaitaient que l’on décrétât, en même temps que l’authenticité de la Vulgate, celle des textes originaux et de la version des Septante, mais c’eût été déplacer la question du terrain sur lequel elle avait été portée. A Rome aussi, le sens du décret en préparation n’avait pas été bien compris, et les théologiens du pape Paul III faisaient des objections en raison des fautes qui existaient dans la Vulgate, et qui devraient d’abord être corrigées, pensaient-ils, ce qui demanderait beaucoup de temps et s’avérait presque impossible. Les légats pontificaux à Trente expliquèrent qu’il ne s’agissait pas de canoniser la Vulgate comme une traduction parfaite, mais seulement de donner aux catholiques un texte biblique sûr, qui pût faire autorité, parce que non suspect d’hérésie, ce qui est l’essentiel dans les Livres saints, et la Vulgate réalisait parfaitement cette condition. Après ces explications, Paul III se décida à approuver le décret Insuper promulgué par le concile, et dont voici la teneur : Insuper eadem sacrosancta Synodus, considerans non parum utilitatis accedere posse Ecclesiæ Bei, si ex omnibus latinis editionibus, quæ circumferuntur, sacrorum librorum, quænam pro authentica habenda sit, innotescat ; statuit et déclarât, ut hsec ipsa vêtus et vulgata editio, quæ longo tôt sœculorum usu in ipsa Ecclesia probata est, in publicis leclionibus, dispulationibus, prœdicationibus et expositionibus, pro authentica habeatur, et ut nemo illam rejicere quovis prætexlu audeat vel præsumat. Denz.-Bannw., n. 785.

L’histoire même de la rédaction du décret indique nettement le sens du mot authentique appliqué à la Vulgate par le concile. C’est, explique le P. Lagrange, « celui-là même que le concile a mis en lumière : un texte qui fait absolument autorité dans les questions de foi agitées en public. C’est le sens juridique du mot : un acte authentique est celui qui est revêtu de toutes les formes et qui fait foi en public ». Il ne