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VL’LGATE. VALEUR THÉOLOGIQUE

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préférerait certaines leçons, comme plus conformes sans doute à l’original hébreu, à certaines leçons de la Vulgate. D’ailleurs saint Jérôme lui-même aurait, semble-t-il, fait de même, car il déclare qu’il n’aurait pas eu besoin de faire une traduction du texte hébreu, si le texte primitif des Septante n’avait été altéré.

Conclusion.

Peut-on prévoir dans un avenir plus ou moins prochain une revision officielle de la Vulgate qui, utilisant les méthodes modernes de la critique textuelle en vue de rétablir le texte original de l’Ancien et du Nouveau Testament, mettrait entre les mains des catholiques un texte latin de la Bible aussi rapproché que possible. du texte primitif, tel qu’il est sorti de la main des. auteurs sacrés, intermédiaires eux-mêmes de la révélation divine ? Il ne paraît pas que l’accord soit suffisamment fait dès maintenant entre les spécialistes de la critique textuelle sur ses méthodes et les résultats de leur application à la Bible. Pour le moment — l’initiative prise par Pie X l’indique — l’autorité ecclésiastique semble plutôt n’envisager autre chose que le rétablissement du texte primitif de la Vulgate, purgé des altérations qui s’y sont introduites au cours des siècles. Beaucoup souhaiteraient cependant que, pour certains livres au moins, dont la traduction, même en sa forme primitive, laisse particulièrement à désirer, pour le psautier surtout qui tient une si large place dans la liturgie, on fît des corrections plus profondes. Le remplacement du psautier gallican, c’est-à-dire du psautier hexaplaire de saint Jérôme, par sa version des Psaumes d’après l’hébreu, comme pour les autres livres de l’Ancien Testament, constituerait déjà un notable progrès. « Contre ce vœu, fait remarquer dom de Bruyne, Rev. bénéd., 1929, p. 324, on objecterait vainement qu’il ne faut pas toucher à un psautier vénérable par un usage immémorial. L’usage du psautier hexaplaire n’est nullement ancien, et son introduction dans la liturgie a été une faute ; il était uniquement destiné à l’étude, et Jérôme, mieux informé, l’a remplacé plus tard par un psautier plus parfait : le psautier hébraïque. » Mais on peut se demander s’il y a même lieu de passer par cette étape, et s’il ne vaudrait pas mieux s’orienter immédiatement vers le remplacement dans la Bible catholique officielle du psautier actuel par une traduction nouvelle, faite sur l’original hébreu préalablement rendu, autant que faire se peut, à sa pureté primitive. Ue fait ces vœux viennent de recevoir satisfaction. Par un motu proprio, donné le 24 mars 1945, le pape Pie XII a autorisé l’usage, dans la récitation tant privée que publique des Heures, d’une nouvelle traduction latine du psautier, entreprise ! sur son ordre, par une commission de professeurs de l’Institut biblique de Home. Après avoir rappelé que le psautier dit gallican laissait beaucoup à désirer, que le psautier hébraïque offrait, à condition d’être amendé, un texte bien supérieur, il exprime sa confiance que le nouveau psautier pourra rendre des services et il en autorise l’usage sine in privala, sive in publica recitatione, dès qu’il aura été arrangé de façon à pouNoir Être distribué selon les exigences de l’ancien Bréviaire de Pie X. En fait le psautier n’a pas été seul i lire retouché, les cantiques qui y sont insérés soit à Laudes, soit à Vêpres ont été quelque peu arrangés. Il n’est pas Jusqu’au Magnificat et au Xunc dimillis qui n’aient été rendus plus conformes aux règles de la latinité classique.

III. Valeur théologique.

La Vulgate possède, pour les catholiques, une autorité particulière d’ordre théologique, du fait des deux décrets du concile de Trente qui la concernent : le décret Sacrosancta, qui a pour objet le canon des Écritures, et le décret Insuper, qui vise directement l’usage ecclésiastique de la Vulgate, et en déclare l’authenticité.

La Vulgate et le canon des Écritures.

Au xvie siècle, des doutes avaient été élevés, soit par les auteurs de la Réforme protestante, soit par quelques catholiques au sujet, non seulement de l’authenticité littéraire de certains livres de la Bible, mais même de leur canonicité, de leur droit à être considérés, au même titre que les autres, comme faisant partie des Écritures inspirées. Luther, moins pour des raisons d’ordre critique que pour des motifs doctrinaux, avait distingué dans le Nouveau Testament trois catégories de livres, auxquelles il attribuait une autorité inégale : à la troisième catégorie, comprenant l’épître de Jacques, l’épître de Jude, l’épître aux Hébreux et l’Apocalypse, il semble bien qu’il refusait une valeur pleinement canonique. Érasme, frappé plutôt par certaines hésitations dans la tradition ecclésiastique ancienne, doutait aussi de l’authenticité littéraire de l’épître aux Hébreux, des épîtres de Jacques et de Jude, de la seconde de Pierre, des seconde et troisième de Jean, ainsi que de l’Apocalypse, et, quant à ce dernier livre, il semble bien qu’il ne lui reconnaissait pas le caractère canonique au même titre qu’aux autres livres du Nouveau Testament. Le cardinal Cajétan, influencé par l’autorité d’Érasme, désireux d’autre part de faciliter les controverses avec les protestants qui refusaient de prendre pour base le texte de la Vulgate et entendaient fonder leur argumentation sur les seuls textes originaux, adopta dans l’ensemble la position d’Érasme, attribuant par exemple une autorité théologique moindre à l’épître aux Hébreux et aux deux petites épîtres johanniques, rejetant nettement aussi l’authenticité de la finale de Marc, xvi, 9 sq., du récit de la femme adultère, Joa., vii, 53-vm, II, et même, quoique avec moins d’assurance, celle de l’ange de Gethsémani, Luc, xxii, 43, et du Comma johanneum (I Joa., v, 7 sq.). Pour remédier à la situation créée par ces doutes, le concile de Trente jugea nécessaire de promulguer à nouveau la liste des livres tenus pour canoniques par l’Église, en indiquant le nom de leurs auteurs d’après l’attribution traditionnelle, mais sans préciser d’ailleurs plus qu’on ne l’avait fait jusqu’alors la valeur de cette attribution. Quant aux parties de livres qui étaient contestées, le concile se refusa à en définir nommément la canonicité, préférant formuler la règle générale d’après laquelle doit être jugée la canonicité d’un livre ou fragment de livre figurant dans la Bible. Cest l’objet du décret, de caractère nettement dogmatique, publié le 8 avril 1546 : Si guis autem libros ipsos integros cum omnibus suis parlibus, prout in Hcclesia catholica legi consuevcrunt et in veteri vulgata editione habentur, pro sacris et canonicis non susceperit… analhema sil. Denz.-Bannvv., n. 784. L’incise cum omnibus suis parlibus ne figurait pas dans la première rédaction du décret, elle y fut ajoutée pour donner satisfaction à ceux des Pères qui auraient voulu qu’on mentionnât nommément les trois ou quatre passages bibliques contestés, elle ne fait donc que préciser, sans y ajouter rien de nouveau, le sens des mots libros integros qui la précèdent. Deux conditions sont exigées pour la canonicité d’un fragment biblique : il doit avoir été toujours lu dans l’Église universelle, c’est à-dire avoir été toujours employé dans l’Église non seulement dans la lecture liturgique, mais pour l’usage théologique, et il doit figurer dans la Vulgate. Ces deu conditions ne sont pas séparables, elles apparaissent plutôt comme complémentaires que comme entièrement distinctes, l’insertion dans la Vulgate étant simplement le signe le plus clair de l’usage constant du texte d.ms l’Église latine. et on ne saurait admettre l’opinion de Franzelin,