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347’VULGATE. DEPUIS SAINT JEROME

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que la révision du texte latin des évangiles, saint Jérôme avait entrepris — non, semble-t-il, sur la demande du pape Damase, comme on l’a cru longtemps, mais plutôt à la sollicitation des dames romaines dont il était le conseiller spirituel — la révision, d’après le grec des Septante, du texte latin des Psaumes alors en usage, lequel était, lui aussi, une traduction de la version alexandrine. L’opinion commune, d’après laquelle le résultat de cette revision, qui d’ailleurs fut, de l’avis même de Jérôme, rapide et sommaire, serait représenté par ce qu’on a appelé le psautier romain, qui, bien qu’usité en Italie pendant plusieurs siècles, n’a jamais trouvé place dans l’édition officielle de la Vulgate, a été battue en brèche par dom de Bruyne, Rev. bénéd., 1930, p. 101126, qui, sur le fond de sa thèse tout au moins, a entraîné l’adhésion à peu près générale de la critique. Cf. en particulier R. P. Lagrange, Rev. bibl., 1932, p. 179 sq. Ce psautier, version antérieure aux travaux de saint Jérôme, fut remplacé peu à peu, à partir du ix c siècle, dans l’usage liturgique, sauf pourtant à Rome, par une autre version, faite celle-là sûrement par Jérôme d’après les Septante, et connue sous le nom de psautier gallican en raison de l’usage qui en fut fait d’abord en Gaule. C’est le pape saint Pie V, qui substitua en 1568 cette seconde version hiéronymienne au psautier romain dans le Bréviaire romain. Ce nouveau travail de saint Jérôme n’était encore qu’une revision de l’ancienne version latine du Psautier d’après les Septante. Il est probable, d’ailleurs, qu’il ne se limita pas au psautier, mais s’étendit à l’ensemble des livres protocanoniques de l’Ancien Testament. Ce qui en fait le caractère particulier, c’est que cette fois saint Jérôme prit pour base la recension des Septante qui figurait dans les Hexaples d’Origène, auxquels il emprunta l’usage de signes : astérisques et obèles, par lesquels le grand docteur alexandrin avait indiqué les omissions ou additions faites à l’original par les traducteurs grecs. Il est possible aussi que saint Jérôme, dans cette revision, plus soignée que son premier travail sur l’Ancien Testament, ait utilisé dans une certaine mesure le texte hébreu. De ce travail de saint Jérôme il ne subsiste, avec le Psautier qui fut adopté pour la Vulgate officielle, que le livre de Job, dont le texte est reproduit dans P. L., t. xxix, col. 59-358.

2. Traduction du texte hébreu de l’Ancien Testament. C’est entre 387 et 390 probablement que saint Jérôme fit sur l’Ancien Testament latin ce travail de revision définitif. Il se trouvait alors à Bethléem, où il s’était fixé après avoir quitté Rome en 385 et entrepris un nouveau voyage d’études en Egypte et en Palestine. Il s’était employé aussitôt à perfectionner sa connaissance de l’hébreu en se mettant à l’école de maîtres juifs d’une particulière compétence, et se trouvait dès lors préparé à entreprendre une traduction latine directe du texte hébreu de l’Ancien Testament, qui lui était réclamée de toutes parts : les instances surtout des dames romaines Paula et Eustochium qui, parties de Borne avec lui, s’étaient aussi fixées : i Bethléem, le décidèrent enfin, et il commença en 390 ou 391 ce grand travail, qui devait durer une quinzaine d’années, avec une interruption de trois ; ms (398-401) due à une longue maladie. Les premiers livres qu’il traduisit furent les livres historiques : Samuel et les Bois, qu’il publia en taisanl précéder son travail du célèbre Prologiu galealux, qui explique ses intentions et défend contre de probables détrac leurs l’œuvre qu’il entreprenait, il termina en 405 par Esther, lubie, Judith, laissant en dehors de son travail la Sagesse ci l’Ecclésiastique, et peut-être les Machabées, ainsi que Baruch. Le bui que se proposait saint Jérôme était de donner a l’église latine un texte biblique conforme à la veritas hebraica, dont — il s’en était convaincu dans son précédent travail de revision — la version grecque des Septante, et à sa suite l’ancienne version latine, s’écartaient souvent, et de faciliter ainsi les discussions avec les Juifs, qui se retranchaient trop aisément derrière les désaccords entre le texte ecclésiastique, grec ou latin, et l’hébreu. Mais il se heurta à une vive opposition, due principalement à l’autorité dont jouissait la version des Septante dans l’Église chrétienne : son origine était entourée, dans la croyance populaire, de circonstances merveilleuses ; surtout, c’était la version — du moins le croyait-on — dont les apôtres et évangélistes s’étaient constamment servis et il semblait qu’elle participât à leur infaillibilité. Enfin quelquesuns craignaient peut-être que l’emploi par l’Église latine d’une version de la Bible différente de celle dont se servaient les Églises d’Orient créât de nouveaux malentendus entre l’Orient et l’Occident. Si bien que saint Augustin lui-même, qui avait accueilli très favorablement la revision hiéronymienne du Nouveau Testament, aurait voulu que, pour l’Ancien Testament, saint Jérôme se contentât également d’une revision d’après les Septante. Néanmoins la version latine de saint Jérôme d’après l’hébreu devait peu à peu triompher et, sauf pour les Psaumes, se substituer à l’ancienne version dans l’usage ecclésiastique.

La Vulgate depuis saint Jérôme.

L’histoire de la version hiéronymienne de la Bible, qui a fait l’objet de nombreux et savants travaux, particulièrement F. Kaulen, Geschichte der Vulgata, Mayence, 1868 ; S. Berger, Histoire de la Vulgate pendant les prepiers siècles du Moyen Age, Paris 1893, a été résumée avec beaucoup de précision par E. Mangenot dans l’article Vulgate du Dict. de la Bible, t. V, col. 24562500. On ne notera ici que les faits principaux.

1. La Vulgate jusqu’au concile de Trente. — Malgré sa supériorité, la version hiéronymienne ne s’imposa pas immédiatement. C’est en Gaule qu’elle pénétra d’abord le plus largement, tandis que l’Afrique devait rester plus longtemps fidèle à l’ancien texte latin. A Rome, au temps de saint Grégoire le Grand, et d’après le témoignage de ce pape, les deux versions étaient utilisées concurremment. On peut dire cependant que, deux siècles après sa composition, la version de saint Jérôme était répandue dans toute l’Église latine, et aux viie et viiie siècles les manuscrits s’en multipliaient, particulièrement en Espagne (d’où viennent le Tolelanus et le Cavensis, deux manuscrits du viiie siècle contenant l’Ancien et le Nouveau Testament), ainsi qu’en Irlande et Grande-Bretagne (le célèbre Codex Amialinus, écrit en 716, et contenant aussi toute la Bible, est un manuscrit northumbrien, copié d’ailleurs sur un manuscrit italien). Mais l’emploi qu’on continuait à faire des anciennes versions latines eut pour conséquence une contamination progressive du texte hiéronymien par des leçons provenant de ces versions. Une révision fut tentée à l’époque carolingienne en vue de ramener à l’unité, et, autant que possible, à la pureté primitive, en même temps qu’à la correction grammaticale, le texte latin courant. Sur la demande de Charlemagne, Aleuin mena à bien ce travail, entre 799 et 801, en prenant pour base des manuscrits d’origine anglo-saxonne, et sa recension acquit une autorité presque officielle (on possède dans le Valltcellanm un excellent représentant de cette recension), tandis que celle qu’entreprit, à peu près à la même époque, Théodulphe, évûque d’Orléans, d’après des manuscrits espagnols, n’eut qu’une influence restreinte. Mais très rapidement le texte d’Alculn s’altéra à son tour dans les copies qui eu furent faites, et des leçons étrangères s’introdui sirent. Des essais de correction furent entrepris a