Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/955

Cette page n’a pas encore été corrigée
3439
3440
VOLTAIRK. PRINCIPAUX ŒI VUES


Quoi qu’en ail dit « une foule de francs pensants », ]>. 201, lui attribuant la lettre des évangiles, « où ils trouvent des maximes odieuses », p. 203, il prêcha « la morale universelle ». Il n’a jamais songé à fonder une religion nouvelle et « le christianisme, tel que Rome l’a fait ». P. 203. Ce sont les disciples de Jésus, qui, rejetés par les Juifs, firent de leur secte une religion nouvelle. Pendant quatre siècles, aucune fourberie ne leur coûte ; ils inventent prophéties, miracles, martyrs, exploitent la crainte populaire de la fin du monde et l’espérance de la résurrection, empruntent au platonisme alexandrin sa métaphysique. C’est à Alexandrie que Jésus fut appelé le Verbe et que l’on fabriqua l’Évangile de Jean. C. xxxv-xxxviii. Ainsi commencèrent les dogmes chrétiens, bien différents de ceux de Jésus qui était de religion juive. C. xxxix. Plus de six cents querelles sortiront de ces dogmes inventés. C. XL. Autant Jésus fut humble, autant ses représentants le sont peut II fut un homme très doux ; or « neuf millions quatre cent soixante-huit mille huit cents personnes » furent « ou égorgées, ou noyées, ou brûlées ou pendues » en son noml P. 236. Faut-il donc abolir la religion chrétienne, son culte et ses prêtres ? Non, mais rendre ce culte moins indigne de Dieu en ne louant plus celui-ci « dans le barbare galimatias attribué au juif David », p. 241, en demandant aux prêtres de ne plus faire aux peuples que des discours de morale. P. 243.

Pour finir, une vingtaine d’axiomes : « Nulle société ne peut subsister sans justice, annonçons donc un Dieu juste. Si vous défiguriez cette probabilité consolante et terrible par des fables absurdes, vous seriez coupables envers la nature humaine. — Dieu parler ! Dieu écrire sur une montagne 1 Dieu devenir homme ! idées dignes de Punch. Voulez-vous que votre nation soit pensante et paisible ? Que la loi commande à la religion 1

34° De la paix perpétuelle par le docteur Godhearl. Traduction de M. Chambon, in-8°, s. 1. n. d. (Genève, 1769) (xxviii, 103-128). Réimprimé dans l’Évangile du jour. Mis à l’Index, le 3 décembre 1770. — La paix perpétuelle de l’abbé de Saint-Pierre est une chimère ; mais une paix perpétuelle est possible : celle de la tolérance. C. i, p. 108. C’est « des cavernes habitées par les premiers chrétiens » qu’est sorti « le monstre de l’intolérantisme ». v, p. 105. Ni Athènes ni Rome n’ont persécuté pour délit de croyance, ix et x, p. 107. Si Rome poursuivit les chrétiens, c’est pour les dangers qu’ils firent courir à l’empire, xiii, p. 110. D’un Dialogue entre un chrétien, un Juif et un sénateur, Marc-Aurèle conclut en effet : « L’empire n’a rien à craindre des Juifs, mais tout des chrétiens. » xv-xvii, p. 111-120. L’histoire du christianisme n’est que l’histoire de persécutions sanglantes autour de ses dogmes, xviii-xxiv, p. 120-125, des crimes où l’ambition a conduit les évêques de Rome. xxv. II y a « une différence infinie entre les dogmes et la vertu. Le dogme n’est nécessaire ni en aucun temps ni en aucun lieu ». xxviii, p. 127. « La vertu, c’est-à-dire l’adoration d’un Dieu et l’accomplissement de nos devoirs », l’est au contraire. Ibid. Les dogmes font du monde » un théâtre de carnage » ; la vertu fait « de l’univers un temple et des frères de tous les hommes ». Ibid. La paix perpétuelle sera donc quand on aura « détruit tous les dogmes qui divisent » et « rétabli la vérité qui les réunit ». xxxii, p. 127.

35° // faut prendre un parti ou le principe d’action. Diatribe, 1772 (xxviii, 517). — « Il ne s’agit que d’une petite bagatelle : savoir s’il y a un Dieu. » P. 518. Voltaire entend réfuter le Système de la Nature, paru en 1770. Cf. ici Holbach, t. vii, col. 21-30. « Tout est mouvement.., tout est action. Quel est le principe de cette action universelle ? Il est unique, puisque les lois

sont constantes et uniformes ; très puissant, très intelligent : cela découle de cette machine qu’il dirige ; nécessaire, puisque sans lui la machine n’existerait pas », et éternel, i et ii, p. 517-520.

Que puis-je savoir de lui ? Où est-il ? S’il anime tout, il est dans tout, « comme le mouvement est dans tout le corps d’un animal ». P. 521. Est-il infini ? Qu’importe ? Infini ou non, nous dépendons de lui. iv. Tous ses ouvrages sont éternels, puisqu’il est éternellement agissant, v, et nécessaire, bien qu’il les ait faits librement, « la liberté n’étant que le pouvoir d’agir ». vi. « Tous les êtres sont soumis aux lois éternelles », c’est-à-dire aux lois « du grand Être qui anime toute la nature », p. 524, même l’homme, viii, en qui « fait tout le principe universel d’action ». P. 526.

Mais l’âme ? C’est là un terme abstrait comme « mouvement ». x. Ou, en effet, l’homme est un dieu et alors il agit par lui-même ; ou il est « une machine, ainsi que tous les autres animaux… ayant reçu du grand Être un principe d’action que nous ne pouvons connaître », p. 530, « nécessairement, éternellement disposé par le maître ». L’animal obéit nécessairement à ce principe, mais volontairement, puisqu’il a une volonté, et librement, quand rien ne l’empêche de faire ce qu’il veut nécessairement, xii. Ainsi de l’homme. « La chaîne éternelle, comme l’a vu Leibnitz, ne peut être rompue. Un destin inévitable est la loi de toute la nature. » P. 532. L’homme n’est pas libre de vouloir, xiii. Ridicule est la liberté d’indifférence, xiv.

Le mal ? Dans les animaux d’abord ? Ici » les choses se passent de telle sorte que le grand Être est justifié chez nous de cette boucherie ou bien qu’il nous a pour complices ». P. 535. « L’animal appelé homme » compte « quelques minutes de satisfaction » pour « une longue suite de jours de douleurs ». P. 535. Des romans expliquent l’origine du mal, xvii ; mais le mot d’Épicure reste toujours : « Ou Dieu a voulu empêcher le mal et il ne l’a pas pu ; ou il l’a pu et ne l’a pas voulu ». P. 539. Que répondent les religions et les écoles ? L’athée : Puisque tout découle d’un principe nécessaire, le mal est inévitable comme le bien. Le manichéen : Il y a deux dieux, un pour le mal. Le païen : Ils ne sont pas deux, mais mille, sous un Dieu suprême. Ils auraient pu s’entendre, mais les prêtres s’en mêlèrent ; tout fut perdu ; les chrétiens se substituèrent à nous. Corrompus à leur tour, ils ont aujourd’hui besoin d’une réforme. Le Juif résume, à la Voltaire, l’histoire de l’humanité et de son peuple. Le Turc, prenant à parti le De veritate religionis chrisiianse liber de Grotius, exalte Mahomet, qui ne fit pas de miracles, à la manière de l’Évangile, « dans un village et dont on ne parle que cent ans après », ni à la manière de la Légende dorée et du cimetière Saint-Médard, et dont la religion est « sage, sévère, chaste et humaine », ainsi que tolérante. P. 547. Le déiste condamne l’athée qui, « de l’ordre admirable de l’univers ne conclut pas à une intelligence ordonnatrice », p. 548 ; le païen dont il préfère le polythéisme au culte des saints, mais qui multiplie « les êtres sans nécessité », p. 549 ; le manichéen, qui suppose inutilement un dieu du mal ; le Juif dont « les ancêtres l’ont emporté sur toutes les nations en fables, en mauvaise conduite et en barbarie ». Il loue le Turc de sa tolérance. Un citoyen demande à tous de s’entendre ; c’est une nécessité. Pour cela, qu’ils jettent au feu les livres de controverses, surtout des jésuites Garasse, Guinard, Malagrida, Patouillet, Nonotte et Paulian « le plus impertinent de tous ». P. 550.

36° Histoire de Jenni, ou le sage et l’athée, par M. Sherla. Traduit par M. Caille, in-8°, Londres (Genève). 1775 (xxi, 523). — Ce roman est dirigé contre les doctrines encyclopédistes qui étaient celles de Cou-