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VOLTAIRE. PRINCIPALES ŒUVRES


Collins, Bolingbroke et d’autres » philosophes jugent invraisemblable que Dieu dérange le plan de l’univers où tout s’enchaîne, où « la masse commune est invariable », par des miracles. Et pourquoi ? « Pour que dans ce petit tas de boue appelé la terre les papes s’emparent enfin de Rome, … que Servet soit brûlé vif à Genève. » Puis elle examine l’authenticité des livres de l’Ancien et du Nouveau Testament, donc des miracles. Pour l’Ancien, rien n’est moins démontré que l’existence de Moïse et que l’authenticité de ses écrits, et toute l’histoire des relations du peuple juif avec Dieu est un insoluble problème. P. 373-375. Pour le Nouveau, ses récits miraculeux sont également dépourvus d’authenticité. « Il faut au moins que les livres qui annoncent des choses si incroyables aient été examinés par les magistrats, que les preuves de ces prodiges aient été déposées dans les archives publiques, que les auteurs de ces livres ne se soient jamais contredits ». Or, les prodiges évangéliques n’ont jamais été juridiquement constatés avec la publicité la plus authentique, « … les évangiles se contredisent continuellement et les premiers chrétiens formèrent mille faux actes ». P. 375-379.

Troisième lettre. Et en faveur de quitant de miracles ? D’un Christ qui n’est pas celui de l’histoire, d’une doctrine qu’il n’a point annoncée, qui a été la source ininterrompue de divisions sanglantes et dont les meilleurs préceptes sont empruntés. P. 378-386.

Or un prêtre anglais, Needham — Voltaire le dit jésuite irlandais — qui concluait d’expériences mal faites à la génération spontanée des anguilles (cf. Voltaire, Des singularités de la nature, c. xx), ayant publié dans l’intervalle une Réponse d’un théologien au docte proposant des autres questions, in-8° de 25 p., s. n. d. a., où il examine la Seconde lettre, Voltaire tourne en dérision l’auteur, la Réponse et la génération spontanée des anguilles, dans les Quatrième, Cinquième et Sixième lettres, dans la Septième de M. Covelle, qui a fait ce miracle de résister avec succès au consistoire de Genève, et dans la Huitième… écrite pur le proposant. P. 394-401. Needham ayant publié une seconde brochure : Parodie de la troisième lettre du proposant adressée à un philosophe, in-12 de 25 p., dans la Neuvième lettre attribuée au jésuite des anguilles, ou galimatias dans le style du prêtre.Xeedham, Voltaire prête à Needham une explication grotesque de la Transfiguration et du miracle de Cana et lui fait dire par le professeur en théologie M. R. : « Nous ferions des miracles tout comme les autres si nous avions à faire à des sots, mais notre peuple est instruit et malin. » P. 405.

A partir de là, les correspondants traitent d’autres questions que les miracles. Ils attaquent le consistoire de Genève, l’intransigeance des Églises, etc. Dans la Onzième, le proposant définit la foi : o Elle consiste à croire ce que l’entendement ne saurait croire », donc l’absurde. Celui qui croit l’absurde peut, sous l’influence de la même volonté, commettre l’injustice. C’est là ce qui a produit tous les crimes religieux dont la terre a été Inondée. P. 412-413. Enfin, pour bien comprendre l’Evangile, dit-il, il faut « avoir recours à ce miracle toujours subsistant d’entendre le contraire de ce qui est écrit ». P. 407 et 413. I.a Douzième raconte l’expérience que lit la comtesse de la vanité des promesses faites pas.lésus-Christ à la prière. Dans la Treizième. M. Covelle dit à ses concitoyens que les miracles servent uniquement « à la fureur de dominer des hommes vêtus de noir qui veulent nous rendre Imbéciles pour nous gouverner ». Usons du droit i de tout homme libre de dire cl d’imprimer ce que nous pensons. La liberté de l ; i presse est la condition de toutes les aulres. Les prêtres n’en veulent pas, mais de prêtres, la l’enss I

vanie s’en passe. » P. 414-420. Les lettres Quatorzième, Quinzième et Seizième racontent les mésaventures de Rousseau à Moutiers-Travers et critiquent les pasteurs de Genève en la personne de Montmolin. La Dix-septième s’en prend à l’Église catholique. Needham y soutient que, « n’étant pas chrétiens », les païens sont incapables, sans miracles, de beaux sentiments. P. 432. II annonce : « Les élus ne doivent jamais ménager les réprouvés. » P. 434. Ainsi : « des coquins se bornent insolemment à l’adoration d’un Dieu, auteur de tous les êtres, … juste, … rémunérateur et vengeur, … qui a imprimé dans nos cœurs sa loi naturelle et sainte. Ils adorent ce Dieu avec amour ; ils chérissent les hommes ; ils sont bienfaisants. Quelle absurdité et quelle horreur ! » P. 435. La Dix-huitième annonce que Covelle va se faire ministre pour devenir quelqu’un et « combattre les prêtres de Genève avec des armes égales ». Il pourra « faire brûler saintement quelque Servet, en criant contre l’Inquisition des papistes ». Les Dix-neuvième et Vingtième s’en prennent encore à Needham qui a publié une troisième brochure, sur la Seizième lettre du proposant (aujourd’hui la Dix-septième).

22° Le philosophe ignorant, in-8°, s. 1. (Genève), 1766. À la suite de la première édition se trouvait un Supplément au Philosophe ignorant : André Destouches à Siane (dialogue) (xxiv, 47). — Ce livre se rattache au Traité de métaphysique. Voltaire y reprend avec, plus de netteté les questions de l’âme, de Dieu, de la morale.

De l’âme. — C. iii, Comment puis-je penser ? Il ne peut davantage, dit-il, affirmer la spiritualité de l’âme. P. 49. De la liberté, c. xiii. Suis-je libre ? Avec Collins, Discourse of free Thinking, 1713, il écrit : « Être véritablement libre, c’est pouvoir. Quand je puis faire ce que je veux, voilà ma liberté, mais je veux nécessairement ce que je veux, autrement, je voudrais sans cause… L’homme est en tout un être dépendant. » P. 57.

De Dieu. — 1. L’intelligence de Dieu, XV. « En apercevant l’ordre, les lois mécaniques et géométriques qui régnent dans l’univers, les fins innombrables de toutes choses, … je dois reconnaître une intelligence supérieurement agissante dans la multitude de tant d’ouvrages. » P. 59. — 2. L’éternité de Dieu, xvi et xx. La matière existant, « je ne puis rejeter l’existence éternelle de son artisan suprême… Une succession infinie d’êtres qui n’auraient point d’origine est absurde. » Mais « je suis porté à croire que le monde toujours émané de cette cause primitive est nécessaire », donc éternel. P. 67. — 3. Incompréhensibililé de Dieu, xvii. L’intelligence divine est-elle absolument distincte de l’univers, comme le sculpteur de la statue ? Est-elle l’âme du monde ? Mystère ! P. 60. — 4. Infinité de Dieu, XVIII. Cette intelligence est-elle Infinie en puissance comme elle l’est en durée ? Mystère encore. « Quelle idée puis-je avoir d’une puissance infinie ? » Ibid. — 5. Ma dépendance envers Dieu, xix et xx. « Tout est moyen, fin dans mon corps ; il est donc arrangé par une intelligence. » P. 61-62. « Mais j’adore le Dieu par qui je pense, sans savoir comme je pense. » P. 63. Sur tels de ces points « Spinoza, les scolastiques, Pascal. Leibnitz, C.udworth et d’autres » ont fait entendre des chimères. P. 65-70. Seul, Locke, « qui ne feint jamais de savoir ce qu’il ne sait pas » oITre < des fonds bien assures.. P. 74-75.

De la morale. 1. V a t-il une morale ? xxxi. fous

les hommes, Indépendamment de tout pacte, de toute loi, de toute religion… ont une notion grossière du Juste et de l’injuste. … acquise dans l’âge où la raison se déploie… Cette notion leur était donc nécessaire. .. L’intelligence suprême a donc voulu qu’il y ait de la justice sur la terre, sans quoi il n’y aurait