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VOLONTÉ. DES ANGES, ROLE


col. 1242-1245, la part prépondérante en ces communications d’ordre nécessairement tout spirituel doit être attribuée à la volonté. Toute illumination est une locution. Or, pour qu’un ange puisse manifester sa pensée à un autre, il faut que l’ange qui parle dirige vers l’autre, par sa volonté, la pensée qu’il veut manifester, et que l’autre ange, par un acte de sa volonté, se dispose à la recevoir. Saint Thomas, q. cvi, a. 1-2. Telle est l’explication fondamentale, à laquelle se superposent les hypothèses les plus subtiles des théologiens. Cf. Suarez, De angelis, t. II, c. xxvi-xxvii ; t. VI, c. xi-xil ; Billuart, De angelis, dissert. VII, De locutione et illuminatione angelorum.

Par rapport à Dieu, la locution des anges s’explique par un mouvement analogue de leur volonté manifestant à Dieu leurs louanges et leur pensée intime. Ibid., q. 3.

Par rapport aux autres anges, la locution dépendant de la volonté de celui qui parle parvient à l’ange interpellé qui veut bien l’accueillir, quelle que soit la distance locale qui pourrait séparer les deux anges, et sans que d’autres puissent intercepter la communication. Telle est du moins la conclusion tirée par saint Thomas du principe général, a. 4 et 5.

Quant à l’influence d’un ange sur un autre, elle ne saurait s’expliquer à la façon de l’influence divine s’exerçant par une motion sur la volonté créée ; elle est simplement le résultat d’une illumination plus intense et de la présentation d’un objet désirable. Q. cvi, a. 2. C’est par ces principes qu’on peut expliquer l’influence de saint Michel sur les bons anges et celle de Lucifer sur les mauvais. Cf. q. lxiii, a. 7.

Les démons, en principe, ont conservé toutes les prérogatives naturelles de la nature angélique. I a, q. lxiv, a. 1. Mais leur volonté corrompue est obstinée dans le mal, et leur puissance est, en beaucoup de ses manifestations possibles, liée par Dieu soit directement, soit par l’intermédiaire de la peine du sens. Cf. saint Thomas, I a, q. lxiv, a. 3 ; Suppl., q. lxx, a. 3.

Rapports des anges avec les hommes.

L’action volontaire

de l’ange, dans le sens du bien comme du mal, peut s’exercer sur l’âme et sur le corps de l’homme.

1. Sur l’âme.

Saint Thomas envisage une quadruple influence : sur l’intelligence, la volonté, l’imagination, les sens, q. cvi, a. 1-4. L’analyse de ces quatre aspects de l’action angélique sur les facultés cognitives de l’homme ramène essentiellement cette action à une influence exercée primordialement sur les sens et sur l’imagination, toute connaissance humaine ayant son principe dans la sensation ou l’image. Ce qui peut se faire d’une double manière : ou par mode de manifestations extérieures, ou par mode de représentations Imaginatives. De veritate, q. xi, a. 2 ; De malo, q. xvi, a. 12. Le premier mode implique une certaine intervention extraordinaire de l’ange, le second lui convient en propre. C’est en agissant sur l’imagination que l’ange provoque nat urellement des pensées dans l’intelligence de l’homme. Ce qui n’empêche pas que l’ange puisse également « fortifier » (l’expression est de saint Thomas) l’intelligence humaine, non certes en lui Conférant un surcroit de vertu intellect ive, mais (comme l’Angélique Docteur l’explique à propos de l’illumination angélique, q. evi, a. 1) en adaptant plus parfaitement à la puissance de l’intelligence humaine l’objet a saisir. C’est ainsi que, par ses explications, le maître aide son disciple a faire a< te d’intelligence beaucoup plus excellemment qu’il n’aurait pu le faire laissé a lui même.

L’intelligence subtile île l’ange lui fait deviner le processus des réa< lions de l’intelligence sur la volonté humaine. Il peut ainsi exercer sa puissance sur nos facultés affectives pour y éveiller, s’il est lion, dl attraits pour le bien, s’il est mauvais, des tentations

troublantes. Mais l’action de l’ange ne fait que disposer la volonté humaine à l’élection par mode de persuasion : jamais, dans le cours normal de l’existence humaine, la volonté angélique n’aura assez d’emprise sur notre volonté pour la contraindre pour ainsi dire nécessairement au bien ou au mal. La liberté humaine, parfois peut-être diminuée, comme dans le cas des obsessions prolongées, demeure suffisante pour engager notre responsabilité. Cf. Sum. theol., I », q. cv, a. 4 ; q. evi, a. 2.

Toutefois, par une permission spéciale de Dieu, la volonté diabolique peut se substituer entièrement à la volonté humaine dans le cas d’une possession complète. Mais alors l’irresponsabilité du possédé dérive primordialement de ce qu’il n’est plus maître même de son corps.

2. Sur le corps.

Sans aller jusqu’à la possession complète, le démon peut violenter extérieurement l’homme dans son corps et provoquer des troubles dans sa santé physique. Dans la possession, l’action sur le corps amène fréquemment des troubles dans les organes avec des répercussions dans les facultés supérieures. Obsession physique et possession impliquent la possibilité pour la volonté angélique d’agir directement sur les êtres matériels. Cf. ci-dessous, 3°.

Voir, pour le dévefoppement de cette doctrine générale : Ange, t. i, col. 1246 (S. Thomas), 1247 (Scot et Suarez) ; Démons, t. iv, col. 405 ; Démoniaques, ibid., col. 409 sq. Sur le rôle du démon dans la tentation, Péché, t.xii, col. 207 ; Tentation, t. xv, col. 122-123. Sur l’obsession psychologique et physique, Possession diabolique, t.xii, col. 2645-2646 ; sur l’explication de la possession, ibid., col. 2642-2643. Sur l’influence bienfaisante des anges gardiens, voir Ange, t. i, col. 1246.

Les anges et les êtres matériels.

Les explications

précédentes reposent toutes sur une base primordiale. Si l’on veut combler la distance qui sépare l’esprit pur de l’homme, créature composée d’esprit et de corps, mais dont l’esprit ne peut agir et recevoir d’impressions que par le corps, il faut affirmer, pour la volonté angélique, la possibilité d’appliquer sa puissance à la matière créée. Esprit pur, n’ayant pas de corps naturellement uni, I*, q. li, a. 1, l’ange peut cependant attacher sa puissance à la matière, mouvoir ainsi les corps et parfois même, avec la permission de Dieu, se donner à lui-même un corps ayant l’apparence de la vie, sans vie organique réelle, a. 2 et 3. C’est en appliquant ainsi volontairement son activité à un corps ou à un lieu que l’ange est dit présent à ce corps ou à ce lieu et, d’après saint Thomas, sa puissance d’action n’est pas nécessairement absorbée en un seul endroit. Un ange peut ainsi être présent simultanément en plusieurs endroits, q. lii, a. 1 et 2, tout comme, sous certaines conditions, plusieurs anges peuvent conjointement appliquer leur activité au même objet. C’est donc par un mouvement local imprimé à la matière, soit inorganique, soit vivante, que se réduit finalement l’influence des anges, bons ou mauvais, sur les corps et, par le corps humain et ses organes, sur l’âme. C’est l’explication proposée à Pos-SBSSION diaholiquk, t.xii, col. 2642-2643, explication qu’il faut reprendre pour rendre raison objectivement (ce qui ne supprime pas d’ailleurs l’explication subjective) des apparitions d’anges, voir AppaiiiriiiN, t. i, col. 1687 ; qui est sous-jacente aux prodiges préternaturels, angéliques ou démoniaques, voir Mnivc.LK, t. x, col. 1835 1836, et qui, enfin, apporte

une interprétation plausible aux bouleversements OU Catastrophes attribués aux démons ; cf..Job, i, 16, 19. Noir également sain ! Thomas, I’. q. i.i. a. 2 ; q. CXI, a. 3 ; De polrntia, q. VI, a. (i ; In 1 l" m Sent.. dist. III, q. i, a. 2 ; ExpOsltio in librurn beati Job, c. i, lect. 3.