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VOLONTE. DE DIEU, EXISTENCE ET NATURE
« Que votre volonté soit faite », Matth., vi, 10. Saint

Paul rappelle que ce que Dieu veut, c’est notre sanctification, I Thess., iv, 3 ; et il nous in vile à nous transformer par le renouvellement de l’esprit, afin d’éprouver quelle est la volonté de Dieu. Rom., xii, 2. D’ailleurs, le c. ix de l’épître aux Romains esquisse le rôle de la volonté divine dans notre élection et notre prédestination. Rom., i, 15-18.

A plusieurs reprises, le Christ manifeste qu’il entend faire la volonté du Père, Joa., vi, 38 ; Matth., xxvi, 39 ; Luc, xxii, 42. C’est par un acte de sa volonté personnelle qu’il accomplit ses miracles, cf. Matth., viii, 3, qu’il révèle les mystères connus de lui seul et du Père, Luc, x, 12, qu’il demande au Père de maintenir l’union entre lui-même et ses disciples. Joa., xvii, 24.

2. Tradition.

a) Les Pères.

L’enseignement des Pères sur la volonté divine doit être recueilli surtout à propos des. problèmes connexes, toute-puissance, liberté, création, voir ce mot, t. iii, col. 2140 sq., volonté salvifique, antécédente et conséquente, etc., ou bien encore dans l’exposé du problème trinitaire de la seconde procession, secundum uoluntatem, voir Processions divines, t. xiii, col. 657 ; Trinité, t. xv, col. 1808. Aussi la plupart des auteurs jugent inutile d’insister sur la doctrine des Pères touchant le seul fait de l’existence d’une volonté en Dieu.

Il est bon toutefois de faire observer qu’indépendamment des questions connexes, les premiers Pères, dans leurs recommandations morales, ont insisté sur la nécessité de se conformer à la volonté divine et d’observer ses commandements. Voir Didachè, i, 5 ; iv, 13 ; viii, 2 (le « fiât voluntas tua » du Pater) ; Epist. Barnab., ii, 5, 10 (rappelant Is., i, 11-13 ; ps. l, 19) ; x, 2 (cf. Deut., iv, 1, 5) ; Clément, / Cor., xxxiii, 8 ; xxxiv, 5 ; xli, 3 ; xlix, 6 ; lxi, 1 ; cf. xlii, 2 (le bel ordre de la volonté de Dieu) ; // Cor. (homélie pseudo-clémentine), iv, 2 (rappelant Matth., vii, 21, en l’abrégeant : pratiquer la justice est substitué à « faire la volonté du Père » ) ; v, 1, cf. vi, 7 ; viii, 4 ; x, 1, cf. xiii, 2 ; xiv, 1.

Dans plusieurs de ses lettres, saint Ignace d’Antioche fait mention de la volonté divine : suscriptions des épîtres. Eph. ; Rom. ; Trait., i, 1 ; Smyrn., i, 1 ; xi, 1 ; Polyc., viii, 1. Voir aussi l’épître de Polycarpe ad Phil., i, 3 ; ii, 2 et le Martyre de S. Polycarpe, i, 1 ; vii, 1. Saint Clément enseigne que notre élection à la vie chrétienne et à la sanctification est l’effet, non de nos œuvres, mais de la volonté divine. / Cor., xxxii, 3, 4.

Les Pères rappellent aussi la puissance de cette volonté : « Rien d’impossible à Dieu, sauf le mensonge. .. Il fait tout quand et comme il veut et rien ne passe de ce qu’il décrète. » Clément, / Cor., xxvii, 2, 6. Voir Aristide, Apol., n. 4, P. G., t. xcvi, col. 1109 AB ; S. Irénée, fragm. v et vi, P. G., t. vii, col. 1231 BC ; S. Hippolyte : « Dieu n’a fait que ce qu’il a voulu faire », Philos., t. X, n. 32, 33, t. xvi c, col. 3447 À et C ; cf. Adv. Noetum, c. viii, t. x, col. 816 AB. On rencontre des affirmations analogues chez Clément d’Alexandrie, Protrept., c. iv, n. 63, t. viii, col. 164 À et son disciple Origène, De principiis, t. I, c v, 3 ; t. II, c viii, 3 ; III, c. iv, 6 (il s’agit de la volonté du Créateur), t. xi, col. 158-159 ; 221-223 ; 339-340, etc. De là une domination souveraine de Dieu sur le monde : cf. Théophile d’Antioche, Ad Autol., i, n. 4, t. vi, col. 1029 AB. C’est le sens qui ressort de toutes les regulse fidei rapportant à Dieu l’existence de tous les êtres.

On sait que le gnosticisme avait obscurci, sinon nié, cette dernière vérité. Contre la conception gnostique de Ptolémée, saint Irénée a précisé le concept chrétien de la volonté divine : intelligence et volonté ne sont pas deux êtres distincts et séparés, car c’est le même et unique Dieu qui, « en même temps qu’il a pensé, a réalisé ce qu’il a pensé ; et, en même temps qu’il l’a voulu, a pensé ce qu’il a voulu ; pensant ce qu’il veut, voulant quand il pense… » Cont. huer., i, xii, 2, P. G., t. vii, col. 574 A. Cette volonté divine, Irénée l’appelle « la substance de toute chose », non certes au sens de certains panthéistes modernes, mais parce que c’est d’un acte de la volonté divine que toutes choses créées ont reçu l’être. Ibid., II, xxx, 9, col. 822 A. Ainsi la volonté divine les maintient dans l’être, ibid., xxxiv, 2, col. 835 C ; n. 3, col. 836 A, et les domine, n. 4, col. 837 A.

b) Documents du magistère.

La croyance en la volonté divine, si fortement marquée dans les écrits des premiers Pères de l’Église, a laissé son empreinte dans les documents du magistère, même en dehors de toute controverse.

Les premières formules conciliaires n’emploient pas le mot « volonté » pour confesser l’unité d’action des trois personnes de la Trinité. La formule Clemens Trinitas emploie une expression qu’on retrouve fréquemment ensuite : una virlus, una potestas. Denz.-Bannw., n. 17. Le symbole de Pastor (I er concile de Tolède) proclame les trois personnes indivisibles virtute et potestate. Ibid., n. 19. Le concile romain de 389 porte l’anathème contre ceux qui n’accordent pas au Saint-Esprit la même puissance qu’au Père et au Fils, can. 1, ibid., n. 59 ; cf. can. 24, n. 82. Le concile de Braga de 561 affirme les trois personnes unius substantiee, et virtutis ac potestatis, can. 1, n. 231, qu’on retrouve avec une légère variante au XIe concile de Tolède, unius majestatis atque virtutis, n. 275. Entre temps, le concile du Latran de 649 reconnaît aux trois personnes « une seule déité, nature, substance, vertu, puissance, royauté, autorité, volonté, opération, ete ». Ibid., n. 254. Le XIe concile de Tolède lui-même fait intervenir, dans l’œuvre de l’incarnation, l’unique volonté des trois personnes : le Fils est envoyé, non seulement par le Père et le Saint-Esprit, … mais encore par lui-même : la raison en est dans l’inséparabilité, non seulement de volonté, mais d’opération, de toute la Trinité, ibid., n. 285. Le symbole de foi de saint Léon IX, dont le texte provient des Statuta Ecclesiæ antiqua, précise l’ancienne formule en proclamant, dans la Trinité, « la déité… d’une seule et même volonté, puissance et majesté », Denz. -Bannw., n. 343, formule reprise par Clément IV et imposée à Michel Paléologue, qui la lit au IIe concile de Lyon. Ibid., n. 461. Le concile du Vatican, dans sa déclaration, est donc l’écho d’une tradition authentique.

Les documents conciliaires parlant expressément de la volonté divine à propos de la Trinité sont extrêmement rares : le dogme évite les explications de la théologie. La Fides Damasi, pour expliquer la génération du Fils, enseigne que le Père engendre le Fils, non voluntate, nec necessitate, sed natura. Denz.-Bannw. , n. 15. Un second document est l’expression peu heureuse relevée par Benoît II dans un écrit de saint Julien et dont l’orthodoxie fut défendue par les XVe et XVIe conciles de Tolède : voluntas gentil voluntatem. Ibid., n. 294, 296. Voir, t. xv, col. 1188, 1206 ; et Trinité, col. 1705.

Une troisième série de documents est relative à la controverse monothélite. Ces documents, à l’exception des deux lettres d’Honorius I er, Denz.-Bannw., n. 251, 252, affirment deux volontés dans le Christ, la volonté divine et la volonté humaine. Voir lettre de Jean IV pour disculper Honorius, n. 253 ; concile du Latran de 649, can. 10, 13, 14. 16, 18, ibid., n. 263, 266, 267, 269, 271 ; lettre dogmatique de saint Agathon, ibid., n. 288 ; IIIe concile de Constantinople, n. 291, 292 ; Symbole de saint Léon IX, n. 344 ;