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VOLONTAIRE. DIRECT ET INDIRECT


fication générique, l’usage donne à cette seconde distinction une signification plus spéciale. On considère alors la situation d’une volonté placée en face de deux décisions, dont l’une s’impose à la volonté absolument et sans discussion possible (c’est le volontaire simpliciier) et dont l’autre, conséquence nécessaire de la première, ne s’impose que malgré le désir contraire de la volonté, qui s’y résout à regret, uniquement pour permettre l’autre décision (volontaire secundum quid). La navigateur, en pleine tempête, veut sauver sa vie et, pour y parvenir, il sacrifie à regret sa cargaison. Sauver sa vie, c’est là le volontaire absolu ; sacrifier la cargaison, c’est le volontaire relatif.

Volontaire explicite et volontaire interprétatif.


Le volontaire explicite existe quand le consentement de la volonté intervient expressément sur l’objet proposé par l’intelligence. Le volontaire interprétatif ne présuppose aucun consentement élicite de la volonté ; mais le consentement est cependant comme inclus dans la tendance naturelle de la volonté, en raison de l’extrême convenance de l’objet à son égard, de sorte que, mise en présence de cet objet, la volonté donnerait certainement son consentement. En l’absence du père, un fils fait en son nom et à son profit un marché extrêmement avantageux ; s’il était présent, le père donnerait certainement son consentement à l’opération : volontaire interprétatif. Voir cependant une interprétation légèrement différente dans saint Thomas, De verilale, q. xv, a. 4, ad 10um et Suarez, De volunlario, disp. IV, sect. iii, n. 2 sq.

4° Volontaire exprès (positif) et volontaire tacite (négatif). — Le volontaire exprès est manifesté extérieurement et c’est ce qui le distingue du volontaire explicite qui peut se contenter d’être intérieur. Le volontaire tacite n’est pas exprimé extérieurement, mais il est formulé intérieurement ; il est donc explicite et par là se distingue du volontaire interprétatif. Toutefois volontaire interprétatif et volontaire tacite sont dits en droit volontaires présumés. De là, l’axiome reçu : « Qui se tait est présumé consentir. » En soi, le silence ne signifie ni consentement ni opposition ; aussi, en chaque cas particulier doit-on chercher à éclairer son jugement d’après les circonstances. Qui se tait en matière à lui favorable est censé y consentir ; en matière défavorable, le silence n’est pas considéré comme un acquiescement, sauf s’il y a obligation et possibilité de parler. Ainsi, prendre un objet à son propriétaire qui n’y contredit pas n’est pas voler, parce que le consentement du propriétaire est légitimement présumé en raison de son silence, à moins que ce silence ne soit le résultat de la crainte ou de la violence. Enfreindre l’ordre établi, au vu et au su du supérieur qui ne proteste pas alors qu’il le devrait et le pourrait, n’est plus enfreindre cet ordre, car le consentement du supérieur est légitimement présumé. Voir d’autres applications juridiques du même principe dans Ballerini-Palmieri, t. i, n. 32-3fi.

5° Volontaire actuel, virtuel, habituel. — Cette distinction est posée en raison de l’influence exercée sur l’effet par l’acte volontaire. Sous cet aspect, le volontaire s’identifie avec l’intention qu’on a de poser cet acte. Voir Intention, t. vii, col. 2268 et 2271 sq. et VlRTUEL, t. xv, col. 3097.

6° Enfin le volontaire peut être direct ou indirect, ce que certains auteurs dénomment également volontaire en soi ou volontaire dans sa cause, in se vrl in causa. Cette distinction, en raison de son importance et de ses applications, mérite une attention plus particulière.

III. Volontaire direct bt volontaire indirect. — 1° Terminologie, Troia formules sont ici à rapprocher : volontaire direct et indirect, volontaire en soi et dans sa cause, volontaire positif et

niCT. ni : tiikol. CATHOL,

négatif. Ballerini conçoit le volontaire in causa comme possédant une extension plus considérable que le volontaire indirect, ce dernier comportant simplement l’omission de ce qui pourrait empêcher l’effet indirectement produit, le volontaire in causa pouvant comporter un acte positif. Op. cit., n. 37. Tanquerey paraît avoir mis parfaitement au point cette terminologie d’apparence hésitante.

1. Est volontaire en soi ou directement ce que la volonté se propose immédiatement et expressément soit comme fin, soit comme moyen. Ainsi est volontaire en soi la mort d’un ennemi que l’homicide se propose comme but de sa vengeance, ou le meurtre du voyageur que le voleur se propose comme moyen de s’emparer de son argent.

2. Est volontaire dans la cause ou indirectement ce qu’on ne se propose de réaliser ni comme fin ni comme moyen, mais qu’on prévoit comme devant résulter d’une action directement voulue et qui, en conséquence, est en quelque manière imputable à cette action. Ainsi le lecteur curieusement imprudent lit un ouvrage dangereux, prévoyant à la suite de cette lecture l’éclosion en son esprit de doutes contre la foi : par le fait même, indirectement ou dans leur cause, il veut éprouver ces doutes. Mais l’effet peut être volontaire dans sa cause doublement : positivement, si l’on fait une action, dont on prévoit l’effet qui en doit résulter ; négativement, si l’on omet l’action, en prévoyant l’effet résultant de cette omission. Ainsi celui qui voit flamber une maison et ne fait rien pour éteindre l’incendie alors qu’il pourrait le faire veut indirectement et négativement cet incendie. Tanquerey, op. cit., n. 214 A.

Pratiquement donc, les trois formules peuvent être retenues comme synonymes.

2° Le problème de la moralité du volontaire indirect.

— Nous résumons ici Tanquerey, loc. cit. L’effet indirectement volontaire ne peut être imputable à celui qui en a posé la cause que dans la mesure où il a été prévu et voulu : tel est le principe général indiscutable dont il est impossible de se départir.

L’effet bon sera donc réputé volontaire si l’agent qui en aura posé la cause indirecte l’a prévu et voulu tout au moins confusément. S’il ne l’a pas prévu, cet effet ne peut être réputé volontaire, même indirectement et dans sa cause. Mais le problème du volontaire indirect se pose surtout à l’égard de l’effet mauvais, dont l’agent peut être rendu responsable dans la cause, s’il l’a prévu et en quelque sorte par là même voulu. On peut d’ailleurs envisager deux hypothèses : l’effet mauvais, volontaire dans sa cause, est le résultat d’un acte directement voulu et posé avec le concours d’autres agents volontaires, c’est alors le cas de la coopération, voir ce mot, t. iii, col. 17C21770 ; — ou bien il est le résultat d’un acte directement volontaire, posé sans le concours de personne, et c’est là, à proprement parler, qu’est le problème de la moralité du volontaire indirect ou In causa.

Il faut, de plus, observer qu’il existe toujours une obligation générale de justice, ou de charité, ou de religion, ou de quelque autre vertu, de s’abstenir de tout acte qui, quoique non mauvais en lui-même, est cependant prévu comme devant se produire en connexion avec un effet mauvais. Toutefois, cette obligation n’est pas stricte au point d’empêcher l’attitude simplement permissive à l’égard de l’effet mauvais, soit que le bien commun commande une telle attitude, soit qu’il soit parfois impossible d’agir autrement.

Le problème de la moralité du volontaire indirect revient donc à celui-ci : Quand un effet mauvais, prévu au moins canfusémenl, peut-il être permis sans que, pour aulant. celui qui l’a provoqué en puisse être rendu responsable ?

Solution du problème.

 La solution est double.

On doit d’abord indiquer quand l’effet mauvais esi imputable ; ensuite, quand il ne l’est pas.

T. — XV. — 104.