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VOCATION, LA CULTURE DES VOCATIONS


Semeur retienne dans sa main les « germes de vocation et d’apostolat ». Pie XI, qui emploie, après Léon XIII et Benoît XV, cette expression suggestive, nous dit « qu’il n’y a pas moins d’adolescents aujourd’hui qu’autrefois appelés par Dieu à la vie sacerdotale ou religieuse, mais qu’il y en a beaucoup moins qui obéissent à la motion du souffle divin ». Ci-dessus, col. 3172. Si donc le maître de la moisson envoie si peu d’ouvriers à son champ, c’est que l’insuffisance de nos prières ne lui permet pas, vu la nécessité de notre collaboration, de donner à ces enfants la surabondance de grâces qui les ferait triompher de leur pusillanimité et les « rendrait dociles au souffle divin ».

Dans certains diocèses, l’usage s’est établi de dire devant le saint sacrement exposé cette invocation : « Seigneur, donnez-nous des prêtres ! Seigneur, donnez-nous de saints prêtres ! » Sous une forme ou sous une autre, voilà la supplication qu’il faut rendre populaire parmi les fidèles. Car il ne s’agit de rien moins que d’ouvrir plus larges sur le monde les sources de la grâce.

Ce devoir de la prière pour les vocations concerne évidemment tous les catholiques, puisque tous doivent en bénéficier. Il concerne surtout les prêtres et les mères chrétiennes comme collaborateurs plus immédiats de Dieu dans l’œuvre de la vocation elle-même. Le prêtre, lui, en a bien conscience, aujourd’hui surtout après quarante ans de campagne pour le recrutement sacerdotal. Les jeunes mères peuvent en être moins averties, il faut le leur rappeler souvent. Il serait à désirer qu’on leur racontât, d’après le livre des Rois dans la Bible, l’histoire si touchante du jeune Samuel. Ce récit, par son réalisme familial, sa poésie antique et l’esprit de foi qui l’anime, est particulièrement de nature à toucher de jeunes mères et à leur inspirer le désir d’avoir un fils prêtre. N’est-ce pas la meilleure condition pour obtenir qu’elles en demandent la grâce à Dieu par leurs prières ?

Provoquer l’éveil des vocations.

En même

temps, il faut provoquer l’éveil des vocations. Il ne s’agit pas, bien entendu, de suggestionner un enfant : de lui persuader qu’étant donné ses qualités morales Dieu l’appelle au sacerdoce ou à la vie religieuse, alors qu’il n’en est peut-être rien. Il s’agit, si par bonheur ce petit a reçu de Dieu le germe sacré, de créer autour de lui une telle atmosphère morale que ce germe s’éveille et s’épanouisse, que l’enfant en vienne peu à peu à dire : Je veux être prêtre, je veux être religieux.

Ce soin complexe et délicat incombe d’abord au prêtre : catéchiste, confesseur, père spirituel, maître de classe ou surveillant de division ; directeur de patronage, de colonie de vacances, de Croisade eucharistique ; aumônier de scoutisme, de jécisme, de jocisme, etc. Mais il incombe aussi aux auxiliaires du prêtre dans ces diverses œuvres. Ceux-ci peuvent et doivent multiplier son action, l’adapter, l’infiltrer là où lui-même ne pourrait peut-être pas l’introduire.

Mais par quels moyens provoquer ainsi l’éveil des vocations ? Avant tout par l’exemple de la sainteté sacerdotale. Rien n’est plus efficace pour éveiller dans rame du jeune garçon le désir d’être prêtre que la vue d’un bon prêtre.

A l’exemple personnel il convient d’ajouter les exemples historiques ; c’est-à-dire, quand l’occasion s’en présente, la biographie d’un prêtre modèle : curé, missionnaire, religieux. Une telle lecture distille pour ainsi dire l’exemple dans l’âme : les notions confuses s’éclairent, les difficultés se révèlent solubles, les obstacles surmontables. Et l’exemple est une idée-force.

La liturgie, aujourd’hui si heureusement remise en faveur, peut également contribuer beaucoup à

éveiller les vocations sacerdotales. Mais c’est à condition de bien montrer le rôle essentiel du Prêtre divin et le rôle ministériel du prêtre humain : le Prêtre divin investissant le prêtre humain, lui communiquant ses pouvoirs célestes et les exerçant en lui ; à condition de bien faire remarquer à l’enfant que, le jour où le prêtre disparaîtrait de la terre, le Christ en disparaîtrait aussi, et que, de ce jour-là, il n’y aurait plus personne pour ouvrir aux âmes le chemin du ciel ; à condition de souligner, par suite, combien il est nécessaire que beaucoup de jeunes garçons veuillent devenir prêtres. Tout cela, exposé d’une manière générale en public, gagnera à être mis au point et adapté à chacun dans des entretiens familiers. Et avec les petits personne, naturellement, ne le fera mieux que la mère. Il sera utile aussi, par exemple à l’occasion d’une retraite de fin d’études ou d’un pèlerinage, de conduire les jeunes gens dans un sanctuaire célèbre, dans un monastère ou dans une maison religieuse. Une telle visite fait immanquablement poser des questions, qui amènent des explications.

En tout cela, on le voit, il n’y a ni pression morale, ni sollicitation indiscrète, mais rencontre pieusement ménagée entre la vocation éventuelle et son objet. De la vocation sacerdotale et religieuse, comme de la vocation à la foi, il faut bien dire avec saint Paul : Quomodo audient sine prxdicante, comment la connaîtront-ils si on ne leur en parle pas. Rom., x, 14 ? Qu’on n’hésite donc pas, par crainte d’influencer les consciences, à user d’une telle méthode : elle éclaire les âmes sans effleurer leur indépendance.

Les signes de vocation.

On est tenu à moins de

réserve avec un enfant ou un jeune homme qui sent en lui des velléités de vie sacerdotale ou religieuse et qui vous demande conseil. Celui-là, il faut l’éclairer positivement. Mais à quels signes peut-on reconnaître si l’on est en présence d’une vraie vocation ou d’une impression illusoire ? II y a, de la vocation, des signes négatifs ou éliminatoires et des signes positifs ou favorables.

1. Signes négatifs.

Ils constituent de vrais empêchements, dont les plus graves, d’ordre juridique, sont prévus par le droit canon sous le nom d’irrégularités. Voir ce mot, t. vii, col. 2537-25(îf>, spécialement col. 2563 sq. Pour nous en tenir à ceux qui se rencontrent ordinairement, le premier serait une naissance illégitime. Une dispense n’est pas impossible ; mais il y faudrait des mérites exceptionnels chez le sujet. Signes négatifs aussi, certaines difformités contraires à la dignité ecclésiastique et capables d’inspirer de la répulsion aux fidèles (can. 984, § 2) ; certaines maladies ou infirmités incompatibles avec les fonctions sacerdotales comme seraient des crises d’épilepsie, des accidents mentaux, la cécité, la surdité, le bégaiement (can. 984, § 2). Dans les cas douteux, il conviendra de consulter un médecin ou un canoniste. Signe négatif à plus forte raison, le manque d’honorabilité, tel le fait d’avoir encouru une condamnation infamante pour actes contre la pudeur, contre la probité ou contre la vie du prochain. Canon 984, § 5. La seule propension à de tels actes, comme seraient des mœurs douteuses, un caractère violent, l’habitude de l’intrigue, du dénigrement, de la dissimulation et du mensonge, constituerait aussi un signe éliminatoire. Can. 1371.

A un degré, sinon infamant, du moins fort redoutable, il y a encore à écarter : l’esprit faux, cette tendance innée à renverser en toutes choses l’ordre des valeurs, érigeant l’accessoire en principal et méprisant celui-ci, préférant le brillant au solide, pensant presque toujours en paradoxes et se croyant hors de la vérité si l’on ne frise quelque erreur. —