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    1. TRINITÉ##


TRINITÉ. LE DE TRINITATE D’AUGUSTIN

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imago et forma et X6yoç. Adv. Arium, i, 31, col. 1064. D’où il suit, d’une part, que le Verbe est distinct du Père, comme l’image est distincte du sujet connaissant, mais, d’autre part, qu’il lui est identique, parce qu’il le représente à lui-même.

Les origines de cette théorie ne sont pas douteuses. Victorin s’inspire de la philosophie de Plotin et il se représente les rapports du Père et du Fils exactement d’après le modèle des relations entre l’Un et le voûç. Le Père est l’absolu, l’inconditionné, l’être transcendant qui semble n’avoir ni attribut, ni détermination quelconque, inconnaissable, invisible. Le Fils est ce par quoi le Père se conditionne, se précise, se détermine, se limite en quelque sorte, se met en relations avec le fini, devient connaissable et tombe sous notre étreinte. Le Père est la substance, le Fils est la vie, le Père est le surêtre, le Fils est l’être tout simplement.

Il est facile de trouver, dans l’œuvre de Victorin, des formules qui traduisent cette doctrine : Deus quod est esse, id est vivere, incognitos et indiscretus est ; et ejus forma, id est vitee intelligentia, incognito et indiscreta est… Cum autem foris esse cœperit, tune forma apparens imago Dei est, Deum per semet ostendens ; et est X6yoç, non jam inde rcpôç tov Geôv X6yoç, in qua vila et intelligentia, jam Ôv ; quia certe cognitio et existentia, quæ intellectu et cognitione capitur. Adv. Arium, iv, 20, col. 1128.

Et ailleurs : Hic est Deus supra voûv, supra veritatem, omnipotens potentia, et ideirco non forma ; voù ; autem et veritas et forma, sed non ut inhserens alteri inseparabilis forma, sed ut inseparabiliter annexa ad declarationem potentise Dei Patris eadem substantia vel imago vel forma… Si silentium Deus est, Verbum dicitur ; si cessatio, motus ; si essentia, vita… Ergo isla essentia, silentium, cessatio Pater, hoc est Deus Pater. At vero vita, Verbum, motus aut actio Filius et unicus Filins. Adv. Arium, iii, 7, col. 1103-1104.

Ailleurs encore : Verum esse primum, ita imparticipatum est, ut nec unum dici possit, nec solum, sed per prœlationem ante unum, et ante solum, ultra simplicitatem, prœexistentiam potius quam existentiam, universalium omnium universale, infinitum, interminatum, sed aliis omnibus, non sibi : et ideirco sine forma intellectu quodam auditur… Hoc illud est quod diximus vivere vel vivit, illud infinitum, illud quod supra universalium omnium vivere est ipsum esse, ipsum vivere, non aut aliquid esse aut aliquid vivere unde nec ôv. Certum est enim eliam quiddam est Ôv, intelligibile, cognoscibile. Ergo si non Ôv, nec X6yoç, X6yoç enim deflnitus est et definitor. Adv. Arium, iv, 19, col. 1127.

Les nécessités de la controverse arienne obligent Victorin à insister sur les rapports du Père et du Fils et sur la divinité du Fils. Cependant, le Saint-Esprit n’est pas absent dans son système. Bien qu’il semble parfois confondu avec le Fils, par suite de l’imprécision du mot spiritus, il s’en distingue comme l’intelligence est distincte de la vie, comme la voix est distincte de la bouche qui l’émet. Le Père est le silence parlant ; le Christ, la voix ; le Paraclet, la voix de la voix : Est enim Pater loquens silentium, Christus vox, Paracletus vox vocis. Adv. Arium, iv, 16, col. 1111. Vivere quidem Christus, intelligere Spiritus. Adv. Arium, i, 13, col. 1048. Par suite, il y a dans la Trinité une seule substance : Una substantia tribus a substantia Patris bj.ooùaia. : ergo trias, hoc est simul oôata… ergo 6[ioo)aio> sunt, unam et eamdem substantiam habentes. Ado. Arium, i, 16, col. 1050.

Le Fils et l’Esprit-Saint sont produits par le Père par un mouvement unique : Unus motus utrumque in existentiam protulit ; mais, par ce mouvement, le Père ayant donné au Fils tout ce qu’il a, même de pouvoir se communiquer, le Fils l’a donné à son tour à l’Esprit-Saint : et quia quæ habet Pater Filio dédit omnia, ideo et Filius, qui motus est, dédit omnia Spiritui sancto. Adv. Arium, iii, 8, col. 1105. Le Père reste ainsi la source première de toute la Trinité ; il est l’unique principe de la vie divine. Cependant ses dons se communiquent à l’Esprit par le Fils qui est par la suite un principe secondaire et subordonné : Sicuti enim a gremio Patris et in gremio Filius, sic a ventre Filii Spiritus. Adv. Arium, i, 8, col. 1044.

Le Saint-Esprit est le lien des deux autres personnes ; avec lui la Trinité est complète : elle comporte une seule substance et trois personnes ; Victorin emploie même parfois le mot subsistence : Dictum de una substantia très subsistentias esse, ut ipsum quod est esse subsistât tripliciter, ipse Deus et Christus, id est Xôyoç et Spiritus Sanctus. Adv. Arium, ii, 4, col. 1092. Il faut d’ailleurs ajouter que ce mot, très rare chez notre auteur, ne parvient pas à s’imposer de son temps et qu’il n’entrera que plus tard dans le vocabulaire courant du dogme trinitaire. Consubstantielles, ces trois personnes ont entre elles le même rapport que l’être, la vie et l’intelligence ; la vie qui est le Fils n’étant qu’une forme de l’être qui est le Père, comme l’intelligence qui est l’Esprit-Saint n’est qu’une forme de la vie qui est le Fils. Adv. Arium, i, 13, col. 1048.

On ne saurait méconnaître la grandeur de l’effort accompli par Victorin pour présenter sous une forme philosophique le dogme de la Trinité. Est-ce à dire que cet effort nous satisfasse pleinement ? Nous ne pouvons l’affirmer. Il est bien difficile de reconnaître, dans les expressions abstraites du dialecticien les réalités vivantes que la Tradition nous a appris à connaître et à aimer en Dieu. Cependant, Victorin s’engage résolument dans une voie où il comptera de nombreux imitateurs. Il est, à certains égards, le premier des scolastiques. C’est à ce titre surtout qu’il convenait de rappeler ici son souvenir.



II. LE DE TRINITATE DE SAINT AUGUSTIN.

C’est aux environs de 400 que saint Augustin commença à écrire son traité sur la Trinité. Cet ouvrage l’occupa longtemps. Il en rédigea d’abord les douze premiers livres qui se répandirent à son insu dans le public, avant qu’il ait eu le loisir d’y mettre la dernière main. Mécontent de cette aventure, il était décidé à ne pas pousser plus avant son travail ; mais les instances de ses frères le contraignirent en quelque sorte à achever l’œuvre commencée et à y ajouter les trois derniers livres. L’ouvrage complet fut terminé en 416.

Esprit de l’ouvrage. —

Le De Trinitate comprend deux parties : la première (livres I-VII) établit le dogme de la Trinité d’après l’Écriture et résoud les principales difficultés que les hérétiques ont coutume de soulever contre lui ; la seconde (livres VIII-XV), de beaucoup la plus importante et la plus originale, recherche dans l’homme des analogies destinées à donner une certaine intelligence du mystère. « Saint Augustin cherche à y montrer la Trinité à l’aide d’images diverses qui la représentent en quelque manière. Aucune d’elles n’est développée avec la rigueur et la méthode qu’y apporteront les scolastiques. L’auteur se préoccupe moins, semble-t-il, de satisfaire l’esprit par une démonstration rigoureuse, dont il se reconnaît incapable du reste, que d’élever peu à peu les âmes vers le Dieu en trois personnes, en leur présentant l’activité divine ad intra en une série d’images de plus en plus simples et ressemblantes. De même qu’il conduit l’homme par degrés à la connaissance de la divinité, il le mène par degrés à la contemplation de la Trinité. » F. Cayré.

Il ne s’agit pas, faut-il le dire, de donner une démonstration du mystère divin. Nul, plus que l’évêque d’Hippone, n’a eu le respect de la grandeur ineffable de Dieu ; nul n’a plus insisté que lui sur la nécessité des