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VIENNE (CONCILE DE) VIEUX-CATHOLIQUES


se trouvaient engagées à la fois des questions de doctrine et des rivalités personnelles. La décrétale Exivi de paradiso régla les points en litige dans un sens plus sévère que celui qu’avait proposé la communauté. Les principales solutions portent sur deux points

1. Les frères mineurs ne sont pas tenus à la pratique de tous les conseils évangéliques contenus dans les Livres saints, mais seulement aux trois qui sont prescrits par la règle : pauvreté, chasteté, obéissance, non pas considérés en eux-mêmes et isolément, mais avec les observances de règle inspirées par le souci de ces trois voeux. — 2. Tous les points de la règle n’obligent pas de la même façon. Ceux qui obligent sub mortali peccato sont les points directement prescriptifs et ceux qui, ne l’étant pas, sont néanmoins exprimés en termes analogues. — Le décret précise comment il importe de concevoir et de réaliser la pauvreté dans l’ordre : ni un frère quelconque, ni l’ordre ne peuvent posséder ; ce qui est donné à l’ordre appartient à l’Église ; les frères en ont l’usage. La controverse sur la question de savoir si les mineurs sont autorisés seulement ad usum tenuem et pauperem ou ad usum moderalum des biens mis à leur usage est tranchée en faveur de l’usus pauper seu arclus. Le texte entre dans certains détails concernant la pratique de la pauvreté et divers points de l’observance et de l’organisation de l’ordre. La décrétale laissait indécis un point important dont les spirituels désiraient avant tout la solution : leur séparation définitive d’avec la communauté. Le problème n’allait pas cesser de poser celui de la pauvreté et de l’organisation de l’ordre longtemps après le concile de Vienne. Cf. P. Gratien, Histoire de la fondation et de l’évolution de l’ordre de saint François, Paris-Gembloux, 1928, en particulier p. 458-475, et Fr. de Sessevalle, Histoire générale de l’ordre de saint François, Paris, 1935, t. i, p. 127-132.

2° L’œuvre réformatrice du concile. — L’un des buts que Clément V avait assignés au concile dans son discours d’ouverture (16 octobre 1311) était la réforme des mœurs et celle de l’état ecclésiastique. L’effort du concile pour y parvenir tendit surtout à assurer la liberté de l’Église à l’égard de la mainmise des princes temporels sur les personnes et sur les biens de l’Église. Mùller, p. 422 sq. À la suite de divers projets de réforme qui lui furent présentés, en particulier par Guillaume Le Maire, évêque d’Angers, Raymond Lulle et Guillaume Durand, évêque de Mende, le concile porta trente décrets relatifs à la discipline canonique. Ils furent incorporés aux Constitutions Clémentines, promulguées par Jean XXII en 1317. Le décret qui institue la fête du Corpus Christi n’a pas été porté par le concile, contrairement au titre qui l’introduit dans les Clémentines, cf. Mùller, p. 642 sq.

Sources.

Fragments des actes du concile dans

Fr. Ehrle, Ein Bruchstùck der Acten des Concils von Vienne dans Archiv fur Literatur-und Kirchengeschichtc des Miltelallers, t. iv, 1888, p. 361-470 et Mùller, op. cit., p. 663-708. — Texte de plusieurs des décrets du concile dans Hefele-Leclercq, Histoire des conciles, t. vi b, 1915, p. 672-715 ; Mansi, Concil., t. xxv, col. 367 ; Regesta démentis V, 9 vol., Rome, 1885 sq.

Études.

Et. Baluze, Vitæ paparum Avenionensium,

éd. G. Mollat, 4 vol., Paris, 1914-1922 ; Fr. Ehrle, Zur Vorgeschichte des Concils von Vienne, dans Archiv…, t. ii, 1886, p. 353-416, 672 ; t. iii, 1887, p. 1-195 ; M. Heber, Gutæhten und Reformvorschlâge fur das Vienner Generalconcil, 1311-1312, Leipzig, 1896 ; H. Finke, Papsttum und Untergang des Templerordens, Munster, 1907, t. i, p. 345 sq., t. ii, p. 230-306 ; G. Lizerand, Clément V et Philippe le Bel, Paris, 1910, p. 250-340.

On se reportera aux art. Forme du corps humain, t. vi, col. 546-551, et la bibliographie, col. 586 ; Olieu, t. xi, col. 982 sq. ; Spirituels, t. xiv, col. 2522 sq., surtout col. 2533 sq. j. Leclercq.


VIEUX-CATHOLIQUES. — Nom donné aux schismatiques séparés de l’Église catholique, parce qu’ils n’ont pas admis la définition de l’infaillibilité du pape, au concile du Vatican, le 18 juillet 1870.
I. Origines.
II. Doctrines (col. 2991).
III. Évolution (col. 2994).

I. Origines.

Le schisme des vieux-catholiques eut des origines lointaines et des causes prochaines.

Origines lointaines.

Historiquement ce schisme se rattache au mouvement conciliaire issu du Grand-Schisme du xive siècle finissant. Il se rattache aussi aux tendances hostiles à la papauté qui avaient suivi les conflits entre Philippe le Bel et Boniface VIII.

Dans ce mouvement et ces tendances, on distingue un parti radical et un parti modéré. Marsile de Padoue, Jean de Jandun, Guillaume d’Occam, dans la première moitié du xive siècle, Jean Wyclif et Jean Hus, dans la seconde moitié et au début du siècle suivant, sont les principaux représentants du radicalisme qui ne tend à rien de moins qu’à la suppression de la papauté. Mais, auprès de ces théoriciens outranciers, il y avait eu, à la suite du Grand-Schisme, de très nombreux théologiens, animés d’une grande foi et d’une piété sincère, qui n’avaient vu d’autre moyen de salut pour l’Église que le recours à la doctrine de la supériorité du concile sur le pape. Cette doctrine avait triomphé au Concile de Constance (1414-1418). Elle s’y était du reste hautement opposée au radicalisme indiqué plus haut et Jean Hus avait payé de sa vie son obstination à soutenir ses erreurs. Le concile de Bâle (1431-1449), en cherchant à appliquer et à développer la doctrine conciliaire de Constance, n’avait su que provoquer un nouveau schisme. La papauté était sortie plus forte et plus respectée de ces longues luttes. La théorie conciliaire se maintenait toutefois dans la doctrine dite du « gallicanisme théologique ». Du xve au xixe siècle, les théologiens gallicans n’avaient cessé de soutenir que les décrets du concile de Constance, en sa quatrième session, établissant la supériorité du concile sur le pape, étaient bien une véritable définition dogmatique, absolue et irréformable, et que les décisions du pape ne pouvaient revêtir un caractère infaillible qu’avec le consentement de l’Église. Le gallicanisme avait formulé ses principes dans la célèbre « Déclaration de 1682°. Les historiens sont assez d’accord pour voir dans la « Constitution civile du clergé » de 1791 et dans le schisme dont elle fut la cause les fruits amers du gallicanisme politique.

Après le Concordat de 1801, le schisme de la Petite-Église avait été lui aussi une application de la même doctrine. Dans les pays de langue allemande, le fébronianisme avait été une transposition des idées gallicanes. Trois traits principaux caractérisent la théologie gallicane et fébronienne : 1° Le pape possède bien la primauté dans l’Église, mais cette primauté n’est qu’une primauté d’honneur, non de juridiction ; — 2° Le concile général, fait de la réunion de tous les évêques, doit bien être convoqué et présidé par le pape, mais il est supérieur au pape, et nulle décision du pape n’est irréformable sans le consentement explicite de l’Église ; — 3° Le pouvoir civil relève directement de Dieu seul et le pape ne peut exercer à son égard aucune autorité ni directe ni indirecte. Il appartient au contraire à ce pouvoir de régler les rapports entre son clergé et le pape.

Causes prochaines du schisme vieux-catholique.

— Les courants d’idées qui viennent d’être résumés très brièvement faisaient encore sentir leur influence sur de très nombreux catholiques, évêques, prêtres ou fidèles instruits, au milieu du xixe siècle, lorsque commença à se poser la question de l’infaillibilité