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    1. TRINITÉ##


TRINITÉ. LES CAPPADOCIENS

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Trinit., IV, 42, col. 128. À quoi bon, dès lors, arguer de tels ou tels passages scripturaires en les séparant de leur contexte, pour leur faire dire autre chose que ce qu’enseigne ! a foi traditionnelle ? Aux subtilités des ariens il n’y a qu’à opposer les victorieuses doctrines de l’Église.

Hilaire et Phébade d’Agen. —

Pour mesurer l’importance de l’enseignement de saint Hilaire, on peut se contenter de le rapprocher de celui de son contemporain Phébade d’Agen. Comme Hilaire, Phébade est le défenseur de la foi catholique. Il prétend montrer aux ariens leurs erreurs et rassurer les orthodoxes. Mais il n’est pas seulement un esprit moins puissant que l’évêquc de Poitiers ; il connaît beaucoup moins bien que lui les questions dont il s’agit. Il n’a pas été en Orient ; il n’a pas vécu en contact avec les hérétiques de toute nuance qui se disputent la confiance des fidèles d’Asie Mineure et sa théologie reste singulièrement courte. Elle se rattache à Tertullien, comme si, pendant près de deux siècles, rien ne s’était passé dans l’Église et si la pensée chrétienne n’avait pas fait de progrès. Cela même est d’ailleurs intéressant, car les arguments de Tertullien, ses formules plutôt suffisent presque à réfuter l’arianisme. De Tertullien à saint Phébade, la doctrine chrétienne n’a pas varié. Les novateurs sont les ariens ; cette remarque suffit à les condamner. « Il faut, déclare saint Phébade, garder la règle qui confesse que le Fils est dans le Père, que le Père est dans le Fils. Cette règle, qui conserve l’unité de substance en deux personnes, reconnaît l’économie de la divinité. Tenenda est igitur, ut diximus, régula quæ Filium in Paire et Patrem in Filio confitetur ; quæ unam in dunbus personis subslantiam servons, dispositionem divinitatis agnoscit. » Contra arian., 22, P. L., t. xx, col. 29. Phébade ajoute aussitôt : « Pour ne scandaliser personne, j’ajoute que l’Esprit procède de Dieu, d’autant que Dieu qui a une seconde personne dans le Fils en a une troisième dans le Saint-Esprit. Le Seigneur n’a-t-il pas dit : « Je prierai le Père et il vous i enverra un autre Paraclet. » Ainsi l’Esprit est autre que le Fils, de même que le Fils est autre que le Père. Ainsi, il y a une troisième personne dans l’Esprit comme il y en a une seconde dans le Fils. Tout cela ne forme qu’un Dieu : les trois ne sont qu’un. Voilà ce que nous croyons ; voilà ce que nous tenons parce que nous l’avons appris des prophètes. Voilà ce que les Évangiles nous ont enseigné, ce que les apôtres nous ont transmis, ce que les martyrs ont confessé dflCns les tourments ; voilà la foi qui est gravée dans nos cœurs et, si un ange descendu des cicux nous annonçait le contraire, nous lui dirions anathème » Ibid. Ces affirmations énergiques sont précieuses ; elles témoignent de la vigueur de la foi qui animait, presque à la veille du concile de Rimini, nos évêques des Cailles ; elles ne sont que des affirmations.

Nous pourrions faire les mêmes constatations en Italie à propos de Zenon de Vérone. Lui aussi s’inspire surtout de Tertullien et il ne semble guère soupçonner que la théologie a pu progresser depuis les premières années du iie siècle ; il va jusqu’à reproduire la vieille théorie du double état du Verbe, d’abord caché dans le si in du Père, puis proféré au moment de la création et acquérant alors sa pleine personnalité. Sans doute ne faut-il pas attacher autrement d’importance formules. Il vaut mit ux rappelé ! que, pour Zenon, le l’ère et le Fils sont comme deux mers que remplit la même eau ; « pie le Père s’est reproduit, dans le Fil », tout en restant ce qu’il était. qu" h l’ère et h lïls sont puisqu’en Dieu il ne peut y avoir !  ; i moindre’ité. Nous retrouvons ici les affirmations de la simple foi. Peut-être les tiri-i. s i qui s’adressait Zenon n’av. lient ils pas besoin d’en savoir davantage.

VI. LES CAPPADOCIENS.

Caractéristiques générales.

Saint Athanase avait donné de la doctrine traditionnelle une magnifique affirmation. Mais il avait laissé sans solution les problèmes que soulevait cette doctrine et qu’une légitime curiosité obligeait les théologiens à envisager de près : qu’est-ce au juste que la personne ? comment peut-il y avoir trois personnes en un seul Dieu ? quelles sont les différences entre les personnes divines, et d’où vient que le Père n’est pas le Fils ; que le Père et le Fils ne sont pas le Saint-Esprit ? Pendant des siècles, on avait pu se contenter de déclarer qu’il n’y a qu’un seul Dieu, et que pourtant le Fils et le Saint-Esprit méritent aussi le titre de Dieu exactement comme le Père. Le développement des controverses ariennes vint montrer que ces simples affirmations demandaient à être précisées. Et lorsque, aux environs de 360, la formule (jûoe ouais., Tpetç ÙTtocTâceiç s’imposa à l’attention, on dut se préoccuper de définir exactement ce qu’était l’oùota et ce qu’étaient en Dieu les ÛTroaTtxcreiç. Le rôle des Cappadociens fut de fournir ces définitions.

Rôle ingrat, il faut l’avouer, mais auquel saint Basile de Césarée, saint Grégoire de Nazianze, saint Grégoire de Nysse se trouvaient admirablement préparés. Tous trois avaient reçu dans les écoles une solide formation classique ; plus tard ils avaient étudié la théologie et ils s’étaient arrêtés longuement sur les écrits d’Origène dont ils avaient nourri leur pensée. Ils se trouvaient ainsi plus capables que d’autres de bien comprendre la pensée des ariens de toute nuance dont Origène avait été l’un des maîtres préférés. D’autre part, ils étaient appelés à vivre au milieu même de ces ariens dont la réfutation et la conquête devaient les occuper sans cesse. A Alexandrie, pas plus que durant ses nombreux exils, Athanase n’avait eu l’occasion de vivre aussi près de ses adversaires ; et en tout cas il n’avait guère vu en eux que des ennemis à combattre. Pour les Cappadociens, une partie au moins des ariens apparaissaient beaucoup plutôt comme des frères à gagner ; bien plus, parmi leurs amis, un certain nombre, qui avaient d’abord été compromis dans les rangs des ariens, s’étaient ralliés à l’orthodoxie et leur exemple permettait d’escompter de nouvelles conversions. Laissons de côté Eustathe de Sébaste, qui, après avoir été lié avec saint Basile, se sépara de lui et termina sa vie dans l’erreur. Mais des hommes comme saint Mélèce d’Antioche, comme saint Cyrille de Jérusalem, qui avaient eu à souffrir persécution de la part des ariens eux-mêmes, ne pouvaient pas, ne devaient pas être suspects ; il était naturel de tenir compte de leurs formules et de chercher, pour exprimer la foi traditionnelle des expressions plus précises que celles dont on s’était contenté jusqu’alors.

Ajoutons que les trois grands Cappadociens se complètent d’une manière étonnante. Unis entre eux par des liens solides de parenté ou d’affection, ils apportent à la besogne commune des tempéraments divers. Saint Basile de Césarée est un homme de gouvernement. Il n’est lias seulement placé à la tête d’un Important diocèse. Les circonstances font de lui le chef de l’orthodoxie orientale entre 370 et 379, et ce sont i.i <> s années déclt Ivea. Il s’agit de négocier avec les lioméousiens d’une part et l’Occident d’autre part ; de défendre la divinité du Saint-Esprit attaquée par les pneumatomaques et de ne pas laisser la moindre prise à l’accusation de sabellianisme. Au milieu des pires épreuves et desservi par une santé souvent fléchis santé, saint Basile fait f.iee à toutes 1 s difficultés. Il conduit ses amis au bon COtnbal et. lorsqu’il nu url, la victoire’t près d’être assuréje. Saint Grégoire de Nazianze, lui, est timide par nature ; il n’aime pas les responsabilités, tout en sachant les accepter en cas de