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VICTORINUS AFER. ŒUVRES


mule de Sirmium (357) : il est donc probablement de 359.

d) Les trois Hymnes à la Trinité, col. 1139-1146, seraient, à notre avis, des productions de propagande, d’un genre spécial, non pas pour l’usage liturgique, mais pour servir de catéchisme anti-arien : on songe à la Thalie d’Arius et au Psaume d’Augustin Contra parlera Donati. Il s’agissait bien de poésie ! Quant à la « source d’émotion » que P. Monceaux prétend que l’auteur aurait trouvée en ces théories trinitaires, elle se comprend chez ce philosophe à qui on arrachait son Dieu en supprimant le Verbe consubstantiel. Voir des citations abondantes, loc. cit., p. 409-410. L’originalité de ces hymnes est d’être en prose, sans traces de mètre, ni de rythme, ni de rimes, mais avec le parallélisme et la beauté grave des psaumes. La seconde hymne est une sorte de complainte avec refrain : « Aie pitié, Seigneur ! aie pitié, ô Christ ! » Col. 1142. « Oh ! oui, laisser le monde ; mais faible est mon aile pour le vouloir sans ton aide ; donne-moi les ailes de la foi, pour voler tout là-haut à Dieu. » Col. 1143. Il y a là certes une réminiscence de Plotin ; mais plus aucun emprunt systématique.

e) Les trois derniers livres Adversus Arium sont généralement placés chronologiquement avec le premier, tous les quatre donc avant les Hymnes et le De homoousio. Cependant, comme ce dernier opuscule ne renvoie nettement qu’au premier livre « Contre les lettres des ariens », col. 1140 C, le problème de date reste ouvert pour les trois autres, voire même pour les appendices du livre I. Terminé primitivement avec le c. xxvii, celui-ci a reçu très vite deux suppléments, c. xlviii-lx, et c. lxi-lxiv, se terminant chacun par une doxologie. Le second livre, à bien des indices, paraît un développement du De homoousio recipiendo. Pour le contenu et la date des deux derniers livres, on trouve des précisions intéressantes chez dom B. Citterio, dans Scuola catlolica, octobre 1937 : le traité qui forme actuellement le t. IV, col. 1113-1138, serait antérieur au De homoousio, tandis que notre t. III, col. 1098-1113, serait le dernier de tous et daterait de 362, à l’époque de la retraite forcée du rhéteur chrétien. Nous croyons pourtant devoir maintenir les quatre livres dans leur ordre actuel : I-II-III-IV.

2. Œuvres exégétiques. — Elles nous sont parvenues fort incomplètes. Outre les trois Commentaires que nous possédons, Victorinus en avait composé d’autres, peut-être sur toutes les épîtres de saint Paul ; il y renvoie lui-même : Ad Ephes., iv, 10, col. 1274 ; i, 4, col. 1238. L’Ambrosiater a cité son Commentaire aux Romains, In Episl. ad Rom., v, 14, P. L., t. xvii, col. 96.

Les trois commentaires qui nous restent, sur les épîtres aux Calâtes, aux Philippiens et aux Ephésiens ont été éditées par le cardinal Mai, Nova collecl. script, vêler., t. m b, p. 1 sq., d’après le Codex Ollobonianus 1288, et imprimés à la suite des œuvres polémiques dans la P. L., t. viii, col. 1 145-1294. Les Commentaires aux Calâtes et aux Éphésicns font allusion aux livres contre Arius, Ad Galal., i, 1, col. 1148 ; iv, 19, col. 1184 ; Ad Ephes., i, 4, col. 1242 ; i, 21, col. 1250. Celui des Philippiens cite le commentaire aux Éphésii us : c’est donc le dernier des trois, Ad Phil., ii, il. 1207, et même la toute dernière œuvre, puisqu’elle renvoie également au I > livre contre Arius. On verra plus loin sa méthode exégétique.

Cependant le Commentaire sur les Éphésiens annonce un traité sur la mission du Christ, Ad Ephes., I. ii, præf., col. 1273 C. Ce travail, probablement considérable, puisqu’il aurait contenu plusieurs tractalus, n’aurait pas clé un commentaire suivi du texte de lainl Paul, mais un grand ouvrage du genre du livre I, Adversus Arium. On ne peut l’Identifier à

celui-ci qui était déjà publié, loc. cit., col. 1274 C ; mais les notions chrétiennes d’ « avènement et de retour » du Christ permettent cependant de supposer que cet ultime résumé de la pensée de Victorinus aurait été encore un essai de justification par saint Paul des idées de notre philosophe sur la progressio et la descensio du Verbe de Dieu.

Avec un auteur si soucieux de tenir à jour sa propre bibliographie, il n’y a pas de chance a priori qu’il ait omis de nous signaler aucune de ses œuvres d’ensemble. Mais on ne peut en dire autant pour des tractutus sur des questions particulières comme ceux qui suivent.

Œuvres supposées. — Certaines œuvres, d’importance et d’intérêt secondaires, parce qu’elles présentaient certaines analogies avec les ouvrages précédents, ont été mises sous le patronage de Victorinus Afer, ou copiées à la suite de ses Commentaires : œuvres polémiques, scripturaires ou poétiques.

1. De physicis. — Joint en plusieurs mss. aux Commentaires sur saint Paul, mais sans nom d’auteur. On y traite, dans un ordre parfait, P. L., t. viii, col. 1295-1310, de l’existence de Dieu contre les athées et les païens, c. i et iv, de la création de la matière, c. ii-m, et de l’ordre du monde physique, c. v, col. 1297, de la justice et de la miséricorde de Dieu, tout cela physicis ralionibus : d’où le titre. Mais « l’histoire (sainte) doit être consultée pour la chute originelle », la naissance virginale, etc., c. xvi-xviii, col. 1304-1308. Sauf quelques réminiscences de Victorin, Deus in hominc natus, col. 1307 B, la justification sans les œuvres, col. 1310 B, le ton, le style traînant, certaines doctrines comme celle de l’ab’us de pouvoir, col. 1307 D, disent que « le De physicis a été composé au ive siècle par un Africain, peut-être par un disciple de Victorin ». P. Monceaux, op. cit., p. 399.

2. De verbis Scripturie. — Transcrit à la suite des Commentaires de Victorin sur saint Paul, en compagnie du Liber ad Justinum, c’est aussi un travail d’exégèse sur Gen., i, 5. « Rien dans cette élucubration ne rappelle la doctrine ni le style de Victorin. » Op. cit., p. 400.

3. Liber ad Justinum Manichæum. — Cet opuscule, P. L., t. viii, col. 1009-1014, contient une réfutation sommaire du manichéisme sur l’origine du mal, la liberté de l’âme, la nature humaine du Christ. Ces idées, trop appuyées pour être de Victorin, sont cependant d’inspiration néoplatonicienne : la clause finale ajoutée par Mai à l’édition de Sirmond, P. L., t. viii, col. 1295 C, est une réminiscence de Plotin, Enn., II, ix, 16. L’ouvrage est d’assez bon style, il a été attribué à Pacien de Barcelone par dom Morin, Rev. bénéd.. 1913, p. 286.

4. Les poésies qu’on attribue à Victorin sont en vers, donc diffèrent au premier aspect des trois hymnes authentiques. Leur sujet également : De fratribus septem Maccabœis, De crucc intitulé encore De Pascha, De ligno vitæ, Carmen adversus Marcionitas. On ne s’accorde pas sur leur origine, mais on n’y reconnaît nulle part la main de Victorin. Cf. Bardenhewer, Althirchliche Literatur, t. iii, p. 399.


III. Jugement d’ensemble.

Pour beaucoup de théologiens, il tient en ces deux griefs de saint Jerome : i II a écrit contre Arius en dialecticien des livres très obscurs, compris seulement des érudits. i De l’iris IL, c. ci. Voilà pour le slyle ; et voici pour le fond : « Il a publié des Commentaires de l’Apôtre ; mais, absorbé qu’il était par l’étude des lettres profanes, il a complètement Ignoré les lettres sacré’Comm. m Epist. ml Galat. preefat. Volontiers on ferait dire au censeur qu’il ne voit partout qu’amphigouri et hypothèses dangereuses ; en réalité, Jérôme n’ai