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    1. TRINITE##


TRINITE. LE CONCILE DE NICEE

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col. 705 ; et il ajoute que le Verbe n’est qu’une des multiples puissances créées dont Dieu se sert, une cause seconde, comme le criquet et la sauterelle, agents des volontés divines. Contra Arian., i, 5.

Créature parfaite, agent de la création, le Verbe a révélé Dieu aux hommes ; il a aussi racheté l’humanité pécheresse. Pour ce faire il s’est incarné. En Jésus, il a même tenu la place de l’âme humaine et, sur ce point spécial, on voit qu’Arius enseigne par avance la doctrine d’Apollinaire de Laodicée.

Arius n’insiste pas sur le Saint-Esprit. Non seulement les fragments qui nous restent de lui se montrent peu explicites à ce sujet, mais il est probable que le prêtre d’Alexandrie ne s’est jamais beaucoup intéressé à ce problème ; les discussions soulevées par son enseignement ne s’y arrêteront pas davantage. Nous savons seulement que l’hérésiarque admettait l’existence du Saint-Esprit, comme troisième terme de la Trinité. Il y était en quelque sorte forcé par la précision des affirmations traditionnelles.

On a beaucoup discuté sur les origines de la doctrine d’Arius et aujourd’hui encore on continue à en discuter. Il est vraisemblable que cette doctrine n’était pas entièrement nouvelle. Elle se rattache, par des liens plus ou moins étroits, aux enseignements d’Origène et de saint Denys d’Alexandrie, qui, nous l’avons vu, affirment aussi la supériorité du Père sur le Fils et mettent en relief la pleine et absolue divinité du premier Mais Origène et Denys étaient trop fermement attachés à la tradition, ils avaient l’esprit trop profondément chrétien, pour ne pas corriger leurs formules et pour refuser au Verbe une nature divine. Tous deux, en dépit de leurs principes, adorent le Fils et le prient. Tous deux croient que le Fils est véritablement Dieu, coéternel à son Père, né de lui avant tous les siècles. Arius, en s’inspirant de leurs formules, va jusqu’au bout des exigences de la logique. Sozomène, H. E., i, xv, lui reproche d’avoir été un dialecticien sans mesure et d’avoir été entraîné à des erreurs « comme il est naturel qu’en commette quiconque s’aventure dans la dialectique et dans l’examen détaillé des choses de la foi. » Saint Athanase de son côté reproche à Arius de s’inspirer à la fois des Juifs et des païens : des Juifs en niant la divinité du Verbe, des païens en affirmant l’existence, au-dessous du Dieu suprême, de divinités subordonnées. Ce qui paraît indéniable, c’est le rationalisme d’Arius et de ses partisans. Avides de tout comprendre et de tout expliquer, les ariens refusent le mystère. Ils s’acharnent à fabriquer de beaux raisonnements, et les syllogismes d’Aèce ou d’Eunome donneront bien la vraie mesure de leur esprit.

Réaction de l’évêque d’Alexandrie.

On comprend sans peine que l’enseignement d’Arius fit scandale à Alexandrie. Sans tarder, l’évêque d’Alexandrie s’attacha à le réfuter et, dans deux lettres adressées l’une à Alexandre de Constantinople, Théodoret, II. E., i, iii, P. G., t. lxxxii, col. 888 sq., l’autre destinée à tous les évêques, Socratc, H. E., i, vi, P. G., t. lxvii, col. 44, il exposa la vérité catholique. Le Fils, déclare l’évêque d’Alexandrie, n’est pas de la nature des choses faites ou créées et il n’y a pas eu de moment où il n’était pas : le Père a toujours été l’ère ; M serait le détruire que de supposer qu’il n’a pas toujours eu avec lui son Fils qui est sa splendeur et son image. Le Fils et lui sont deux choses inséparables l’une de l’autre, ἀλλήλων ἀχώριστα πράγματα δύο, et l’on ne peut, même parla pensée, Imaginer entre eux un Intervalle quelconque. Le Fils est immuable, parfait dès le principe. On ne saurait concevoir qu’il change, qu’il se transforme, qu’il progresse, à plus forte raison qu’il défaille. Image parfaite et Inséparable du Père, celui qui l’honore honore aussi le l’ère.

Il est vrai que le Père et le Fils sont distincts. Au Père seul convient le terme d’ἀγένητος (ou ἀγέννητος), car seul le Père est sans principe, sans cause, sans génération. Le Fils est engendré et il a le Père comme principe, ce qui ne veut pas dire, comme le prétendent les ariens, qu’il est une créature. Entre le Père engendré et les créatures, il y a la nature du Fils unique, engendrée de l’être même du Père, par laquelle il a fait sortir l’univers du néant : ὡς μεσιτεύουσα φύσις μονογενὴς δι’ἦς τὰ ὅλα ἐξ οὐκ ὄντων ἐποίησεν ὁ πατὴρ τοῦ θεοῦ λόγου ἢ ἐξ αὐτοῦ τοῦ ὄντος Πατρὸς γεγέννηται. Epist. ad Alex., xi, P. G., t. lxxxii, col. 904 B. Que l’on sauvegarde donc la dignité du Père, rien de mieux. Mais cela ne veut pas dire que le Fils ne mérite aucun honneur. Au contraire, il convient de lui rendre l’honneur qui lui est propre.

Cet enseignement est très clair et il résume exactement l’essentiel de la foi catholique sur le Père et le Fils. Divinité absolue du Fils, éternité, non-création, sur tous ces points qui sont fondamentaux dans le débat soulevé par Arius, Alexandre prend une position décidée. S’il ne parle guère du Saint-Esprit et se contente de dire qu’il a inspiré les prophètes et les apôtres, c’est qu’on ne se posait à son sujet aucun problème nouveau. Dans les circonstances où il s’exprime, l’évêque d’Alexandrie dit tout ce qu’il faut et comme il le faut. On sait pourtant que son intervention ne suffit pas à arrêter les controverses. Répandu à travers tout l’Orient, l’enseignement d’Arius souleva les passions les plus diverses. Il devint bientôt nécessaire, pour apporter à l’hérésiarque une réponse décisive, de convoquer un concile général, chargé de définir la foi authentique de l’Église.

II. le concile de Nicée.

Difficulté de sa tâche.

L’œuvre du concile était difficile, plus qu’il ne le paraissait au premier abord, plus que se l’était imaginé Constantin en convoquant à Nicée les représentants de toute la catholicité. S’il ne s’était agi que de condamner Arius, on aurait pu se mettre assez facilement d’accord, car sa doctrine était manifestement hérétique. Sans doute, Arius avait pu, au début de son aventure, soulever en sa faveur un bon nombre des évêques d’Orient : Eusèbe de Nicomédie, Eusèbe de Césarée, Paulin de Tyr, Athanase d’Anazarbe, Théodote de Laodicée, Théognis de Nicée, quelques autres encore, anciens disciples comme lui de Lucien d’Antioche ; mais il ne faut pas croire que toutes ses opinions aient été partagées par ces évêques. Si tous étaient d’accord avec lui pour reconnaître la parfaite distinction du Père et du Verbe et même la subordination du Verbe à son Père, ils étaient loin d’admettre que le Verbe n’était qu’une créature absolument dissemblable du Père et exclue de la sphère de la divinité. Arius allait trop loin ; il était trop résolument fidèle à la logique de ses raisonnements pour qu’il fût possible de le suivre jusqu’au bout.

Seulement la condamnation d’Arius était la partie négative de l’œuvre proposée aux Pères de Nicée. L’empereur désirait une profession de foi capable en même temps de rallier tous les évêques et d’empêcher tous les retours offensifs de l’hérésie, et ce désir était aussi celui de tous les hommes sages. Seulement serait-il possible de trouver des termes à la fois assez précis pour écarter l’erreur et assez généralement acceptés pour rallier tous les suffrages ? On ne tarda pas à se rendre compte qu’on n’arriverait pas sans peine à ce résultat.

Saint Athanase, qui prit, part au concile de Nicée comme diacre d’Alexandrie, nous a gardé le souvenir schématisé des discussions qui se livrèrent alors :

Le concile voulait proscrire les paroles impies des ariens et adopter celles que l’on s’accordait a trouver dans l’Ecriture : qu’il n’est pas du nombre des choses tirées du néant

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