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VERSIONS FRANÇAISES
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d’après la Vulgate. En 1537, Jean Eck faisait paraître à ïngolstadl une Bible complète, qui empruntait pour le N. T. l’édition d’Eiîiser et reproduisait pour l’A. T. la vieille édition d’Augsbourg ; de l’une et de l’autre la langue était assez misérable. On dira la même chose de l’édition, procurée en 1534 à Mayence par le dominicain J. Dietenberger, d’une langue rude et parfois difficile à saisir. Puis il faut attendre un siècle pour voir paraître en 1662 la Bible préparée par les théologiens de Mayence, qui témoigne d’un réel effort pour être une Bible catholique, en dépit de ce qu’elle doit aux traductions précédentes ; partant à peu près exclusivement de la Vulgate sixto-clémentine, elle faisait effort vers la littéralité, sans tomber dans le servilisme. C’est le même caractère qu’il faut reconnaître aux Bibles catholiques allemandes du xviiie s. et du commencement du xixe s., dont la plus connue est celle de Jos.-Fr. Allioli, Landshut, 1838.

Il faut ajouter à ces « Bibles » les nombreuses traductions allemandes jointes, depuis le xixe s., aux commentaires bibliques des divers livres. Ce n’est pas ici le lieu de rappeler ces grandes entreprises soit des protestants, soit des catholiques. Mentionnons tout au moins, dans les milieux protestants, la très belle et si utile publication parue sous la direction de E. Kautzsch, et, chez les catholiques, la Bible dite de Bonn, à peu près terminée aujourd’hui.

Versions en langues romanes.

Dans les pays de l’empire carolingien où dominait la langue romane, la Bible latine était à peu près aussi inintelligible pour l’ensemble des fidèles que dans les régions de langue germanique. Les capitulaires et les ordonnances synodales, dès le viiie siècle, prescrivent au clergé de faire, après la lecture liturgique des péricopes scripturaires, une courte explication de celles-ci dans la langue du peuple. Mais de là à conclure qu’il y eut, dès le ixe s., en la possession des clercs, des traductions partielles ou totales de l’Écriture, il y a loin. Encore qu’assez superficielle, la connaissance du latin dans le clergé était suffisante pour lui permettre de donner des textes liturgiques une glose en langue romane.

1. Traductions françaises.

Il semble que, pour les traductions françaises, il faille attendre jusqu’au début du xiie s. On connaît à cette date une double traduction du Psautier, interlinéaire, faite l’une sur le Psautier hébraïque de saint Jérôme, l’autre sur le Psautier gallican. La première semble en provenance d’un couvent anglais et d’un disciple de Lanfranc ; la seconde est aussi en français-normand. Elle eut une vogue extraordinaire dont témoigne le nombre considérable des mss. qui se sont conservés. Un demisiècle plus tard, encore en terre normande, apparaît une traduction de l’Apocalypse, puis des quatre livres des Rois. Bientôt, d’ailleurs, c’est dans toute la France que surgissent des versions de l’Écriture ; leur ensemble forme toute une littérature. Quand en 1170 Pierre Waldo, voir ci-dessus l’art. Vaudois, entreprend de rendre la Bible accessible à tous, il a devant lui de nombreux modèles ; les prohibitions faites par l’Église n’arrêtent pas l’engouement pour la Bible en langue vulgaire. Sous saint Louis, la France avait une traduction à peu près complète de l’Écriture. On pouvait se la procurer chez les libraires officiels de l’université de Paris. C’est d’ailleurs par un détour assez curieux que cette traduction se réalisa. La Bible française dérive en droite ligne de VHistoria scolastica de Pierre Comestor, voir ici t.xii, col. 1919 sq. Rédigée en latin au dernier tiers du xii c s., et ne donnant d’aileurs que les passages proprement historiques de l’un et l’autre Testament, cette « histoire sainte » était traduite un siècle plus tard par Guyart des Moulins, qui ne se contenta pas de traduire des livres historiques de l’A. et du N. T. ordonnés par Comestor. niais leur adjoignit la traduction de plusieurs autres livres sacrés, en sorte qu’il donna vraiment la première Bible française. Elle fut complétée aux xiiie et xive siècles, par la traduction des autres parties des écritures canoniques. Ainsi cette « Bible historiale » de Guyart prit peu à peu son allure définitive ; elle sera répandue largement par l’imprimerie, l rc édit. à Paris, 2 in-fol., 1487. C’est ce qu’on appela un peu plus tard la « grande Bible », pour la distinguer de la Bible pour les simples gens ».

Quand éclata le mouvement de la Réforme, la Bible se trouvait donc déjà répandue en France. Dans les milieux humanistes, plus ou moins touchés par l’esprit nouveau, on se préoccupa néanmoins de fournir une traduction moins vieillotte et serrant de plus près le texte original. En 1523 est éditée une version du N. T., à quoi s’ajoute, la même année, le Psautier, et, en 1528, l’ensemble de l’A. T. En 1530 paraît à Anvers La saincie Bible en françoys translatée selon la pure et entière traduction de saincl Hiérosme. Nul doute qu’elle ne soit l’œuvre du célèbre humaniste français Lefèvre d’Étaples, voir son art., t. ix, surtout col. 145 sq. Elle paraissait d’ailleurs avec les approbations requises. L’attitude suspecte de Lefèvre empêcha finalement cette Bible de s’imposer dans les milieux catholiques. Mais, en dépit des sévérités du concile de Trente contre la lecture de la Bible en langue vulgaire, il fallait aux catholiques une version française. Elle leur fut fournie par deux Lovanistes, Nicolas de Leuze et François van Larben, qui donnèrent, en 1550, leur « Bible de Louvain », avec privilège impérial. Cette Bible circula sans encombre parmi les catholiques de langue française, bien qu’elle ne fût, atout prendre, qu’une édition soigneusement corrigée de la Bible de Lefèvre. Elle jouit d’une sorte de faveur ecclésiastique et eut de très nombreuses impressions ou rééditions. Elle disparut peu à peu sans avoir été remplacée par une autre qui ait joui d’une sorte de patronage officiel.

Les protestants français ne réalisèrent que plus tard une traduction qui s’imposât, c’est celle d’un cousin de Calvin, Pierre Robert, dit Olivétan, imprimée en Suisse dans le pays de Neuchâtel. En dépendance étroite, pour le N. T., de la version de Lefèvre, pour les « apocryphes », de la Bible d’Anvers de 1530, cette Bible d’Olivétan était une œuvre extrêmement imparfaite. Il est curieux qu’elle n’ait pu être supplantée par aucune autre. Bien des tentatives furent faites pour l’amender et les plus hautes autorités du parti calviniste y mirent la main, Calvin lui-même, Bèze, Louis Budé et d’autres Genevois. La plus célèbre refonte est celle de 1588 entreprise sous la haute direction des pasteurs de Genève ( « la vénérable compagnie » ). C’est la même compagnie qui assura les retouches successives des xviie et xviir 3 siècles, retouches d’ailleurs timides qui laissaient à peu près la langue dans son état primitif.

Les catholiques, cependant, continuaient à faire paraître des traductions au moins partielles (souvent c’était le seul N. T.). Dès 1556, un théologien de Paris, René Benoist, voir ici t. ii, col. 646, donnait une Bible française qui, pour serrer de trop près la Bible de Genève, lui attira de sérieux désagréments. Néanmoins l’œuvre, tout au moins le N. T., fut souvent réimprimée, en dépit des censures qui n’avaient pas été épargnées à l’auteur. Le siècle de Louis XIV vit paraître aussi des traductions de valeur assez diverse ; on cite celle de Jacques Corbin. en 1643, d’après la Vulgate, mais surtout la version du N. T. par l’oratorien Denis Amelote, qui