Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/584

Cette page n’a pas encore été corrigée

269’VEHMIGLI (PIERRE MARTYR)

2698

c’est-à-dire mourant sur la croix, donc le pain et le vin ne peuvent être ni le corps et le sang de Jésus-Christ, tel qu’il était à la Cène, ni davantage tel qu’il est dans a gloire du ciel. S’il était réellement dans l’eucharistie, il ne pourrait y être que comme attaché à la croix, ce qui n’a jamais été réalisé puisque l’eucharistie ne fut pas célébrée pendant que Jésus était en croix.

8° Tous les passages de l’Écriture, où il est dit que Jésus-Christ « est au ciel et qu’il y demeurera jusqu’à la consommation du monde », attestent qu’il n’est plus sur la terre, par son corps.

9° S’il est dit, dans saint Jean, qu’il est nécessaire de manger la chair et de boire le sang du Christ pour avoir la vie, cela ne peut pas être entendu de la manducation de Jésus-Christ dans le sacrement, puisque quantité de pécheurs reçoivent la communion sans avoir la vie éternelle dans leurs cœurs. Cela ne peut donc être entendu que de ceux qui communient avec une foi vive. Et c’est ce que Jésus-Christ lui-même a proclamé en disant : « Mes paroles sont esprit et vie… La chair ne sert de rien : c’est l’esprit qui vivifie. » Ainsi avaient fait les prophètes, en se servant d’images et notamment de celle du boire et du manger pour traduire l’acquiescement par la foi. Jésus-Christ venait justement de nourrir les foules par la multiplication des pains. Tout naturellement, l’image de la manducation pour exprimer la foi devait venir à son esprit. Enfin ; il ne pouvait avoir en vue l’eucharistie, en parlant de cette manducation, puisqu’elle n’existait pas encore.

10° Jésus-Christ a sans cesse fait appel au témoignage des sens, pour faire admettre ses miracles et surtout sa résurrection, Le témoignage des sens est donc irréfutable. Or, ils disent ici qu’il n’y a que du pain et du vin.

11° Un corps ne peut être en divers lieux à la fois. Un corps ne peut exister à la manière d’un esprit. I.a substance entière d’un corps parfait ne saurait être contenue dans une miette de pain ni dans une goutte de vin.

12° Ce qui prouve qu’il n’y a bien que du pain et du vin dans l’eucharistie, c’est que ces éléments se comportent comme du pain et du vin ordinaires : ils nourrissent le corps, ils peuvent se corrompre, on lient les empoisonner, etc.

13° Ces anciens docteurs de l’Église parlant du sacrement l’ont maintes fois appelé le sacrement du pain et du vin. Justin Martyr dit que le sacrement nourrit le corps. Origène a soutenu que l’eucharistie se digère dans l’estomac et qu’elle est rejetée au dehors a la manière des aliments. Tcrtullien et saint Augustin l’appellent la figure du corps de Notre-Seigneur. D’autres Pères ont attribué aux espèces la qualité de types » et de i signes ». Toutes les anciennes liturgies, Ions les Pères grecs en sont la preuve, l.e Symbole des apôtres ne parle de Jésus-Christ cpie comme assis à la droite de son père. Si l’on dit cpie les sens nous trompent, on repeindra cpie

les anciens Pères invoquaient le témoignage des sens contre les marcionites et les autres hérétiques qui niaient la réalité du corps de Jésus-Christ (docètes

en général).

14° Saint Augustin a donné coin nie règle que « quand le sens littéral est impossible, il faut avoir recours à la figure. Et ce doc leur a appliqué cela a la manducation du corps et du sanu de Jésus Christ.

15e Dans la querelle monophysite, les hérétiques eutychiens disaient que comme dans l’eucharistie.

cpii est appelée le corps et le sang de Jésus Christ, la présence du Sauveur change la substance du pain et du vin en la substance de-sa chair et de son sang, ainsi la divinité a absorbé l’humanité en la changeant

DIC1. Dl l m ni., c i moi..

en elle-même ». À quoi, le pape Gélase, Théodoret et les plus illustres Pères du temps répondirent nettement que « la substance du pain et du vin de la communion demeure la même qu’auparavant, soit dans sa nature, soit dans sa forme extérieure ». Puis, rétorquant la comparaison des eutychiens, ils soutenaient que « les deux natures peuvent subsister, en la personne du Fils de Dieu, sans aucun changement de l’une en l’autre, tout comme le corps de Jésus-Christ subsiste, avec les espèces de l’eucharistie, sans en changer la nature ».

16° Pierre Martyr tirait aussi argument de la copie d’une lettre de Jean Chrysostome, qu’il disait avoir trouvée manuscrite à Florence et qui établissait la même chose et par les mêmes raisonnements. Il en concluait que tous les passages où ce Père semble affirmer la réelle présence de Jésus-Christ au sacrement de l’autel, dans ses sermons et ses commentaires de l’Écriture, doivent être considérés comme des « embellissements de rhétorique » pour rendre l’eucharistie plus auguste. Il faut en dire tout autant des autres Pères. Il est sûr en tout cas que les Pères qui ont parlé avec le plus de révérence de l’eucharistie n’ont jamais songé ni à la transsubstantiation ni à rien de tel. Plus tard, quand les ténèbres eurent offusqué l’Église et que les peuples ignorants et crédules se trouvèrent disposés à croire les choses les moins vraisemblables, quand d’autre part le clergé, oublieux des études scripturaires, s’entêta dans l’idée de la présence réelle, le dogme de cette présence fut admis universellement. Cela se produisit environ aux xie et xiie siècles. Le pape Innocent III fit reconnaître cette "présence réelle au IVe concile du Latran, en 1215. Au début l’opinion la plus commune était qu’un pain entier se changeait au corps entier de Notre-Seigneur, de sorte que, dans la distribution, l’un des communiants avait un cril, le nez ou bien une oreille, l’autre une dent et un doigt du pied ou de la main. L’Église romaine demeura environ trois cents ans dans cette erreur. Mais les scolastiques polirent et raffinèrent extrêmement les sentiments de leur Église. Comprenant combien il était contraire à la révérence due à Jésus-Christ, de déchirer son corps de la sorte et de le manger par lambeaux, ils enseignèrent alors que le corps de Jésus-Christ est dans l’hostie de telle manière qu’il soit tout entier dans chacune de ses parties. Dans le même temps, on cessa de se servir de pain ordinaire et de viii, de peur cpie le peuple ne crût qu’il y avait là du pain et du vin d’usage courant. On se servit d’oubliés comme s’il eût fallu une ombre de pain pour représenter des accidents sans sujet.

Tels furent, résumés par l’historien anglican Gilbert Burnet, dont la partialité en faveur du protestantisme est évidente, les arguments en vertu desquels Pierre Martyr introduisit dans le Prayer-Bnok la doctrine eucharistique cpie l’on y trouve encore. (Voir sur cette doctrine, l’article Reforme.) Ilislory of the Reformation nf ihr Church of England, Londres. 1678-1714, IF liait., 1. I.

Sources. — La plupart des enivres de Vermtgli furent publiera à Londres, en 1575, sons le-litre général de Locl communes. Une partie a été reproduite dans Hiblioleen

délia Riforma ilaliana, Florence, 1 s.s : î et sep Les Actes de la Dispute d’Oxford, comprenant une Tractalio de sacramento eucharisties et la Dlsputallo’< eodem snemmento furent publiés à Londres, en 1549, traduction anglaise, en 1562. Pierre Martyr avait public’- aussi divers commentaires bibliques. Nous comptons également parmi les sources s : i première biographie par Simler, son succès

seur a Zurich, OratiO de l’Un ri obtlli I). Pétri Murluris,

Zurich, i : > ;  : >.

2° Littérature. Schmidt, Peter » Marii/r Vermtgli Leben und euugewtUilte Sehriften, Elberfeld, 1858 ; Cesare Conta,

T.

. S5.