Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/535

Cette page n’a pas encore été corrigée

2599

VAUDOIS — VAUVILLiKRS (JK AN-FRANÇOIS ;

2600

tisme complet. Il se cacha dans son pays natal. On l’y trouve dès avril 1523. Mais en décembre de la même année, il avait dû se réfugier à Bâle. Ses idées avaient toutefois agité la région de Gap et atteint les vallées vaudoises. Au cours de 1526, comme il se trouvait à L’Aigle (Suisse), canton de Wallis, il reçut la visite d’un barbe, nommé Martin Gonin d’Angrogna. Ce chef vaudois venait lui demander des livres et des conseils. Retourné chez lui, il créa un parti qui s’orientait vers les doctrines dites « évangéliques », c’est-à-dire protestantes. En 1530, deux autres barbes, Georges Morel du Val Fressinière et Pierre Masson, revinrent auprès de Farel, dont ils avaient, par Martin Gonin, adopté les enseignements. Morel avait plus d’instruction qu’il n’était d’usage chez les vaudois. Il avait lu Érasme et Luther. Il savait parler et écrire en latin (ces détails dans Bèze, Histoire ecclésiastique, Corpus Reformatorum, t. i, p. 53). Il conféra avec Farel et ses collègues des villes voisines, Haller, Œcolampade, Bucer et Capito. Après ce voyage, Morel rentra à Mérindol, village de la vallée de la Durance, où il travailla en collaboration avec Gonin, à rattacher la vauderie au mouvement protestant. Deux ans plus tard, en 1532, Farel était invité à venir présider un commune vaudois à Angrogna. Il y vint avec Antoine Saunier et Robert Olivétan, cousin de Calvin. L’assemblée s’ouvrit le 12 septembre, et dura six jours. Il y fut décidé de supprimer : 1° l’interdiction du serment ; — 2° l’interdiction des tribunaux criminels, comportant la peine de mort, mais sur ce point les vaudois refusèrent obstinément d’accepter la légitimité du service militaire ; — 3° les jeûnes, les prières et la confession obligatoires ; — 4° le rite de la consécration des barbes au moyen de l’imposition des mains ; — 5° le célibat des barbes, la pauvreté obligatoire et la prédication ambulante ; — 6° le vœu de virginité des sœurs. En outre, les vaudois adoptaient la doctrine de la prédestination et de l’élection éternelles, ainsi que l’interprétation zwinglienne des deux sacrements de baptême et d’eucharistie. Bref, les vaudois cessaient d’être vaudois, par l’abandon de toutes leurs doctrines spécifiques.

L’on n’est pas surpris dès lors d’apprendre que des oppositions surgirent contre cette capitulation complète. Deux barbes, Daniel de Valence et Jean de Molines, se rendirent d’eux-mêmes en Moravie, pour demander aux frères moraves leur aide contre le mouvement protestant dans la vauderie. Ils furent bien reçus et obtinrent un écrit favorable au maintien de l’ancienne doctrine. Un nouveau commune eut lieu, au Val San Martino, le 15 août 1533. Mais en dépit de la recommandation morave, le parti « évangélique » l’emporta et les décisions d’Angrogna furent confirmées.

On pense bien que cette adhésion des vaudois, que l’on avait fini par laisser à peu près tranquilles, à l’hérésie protestante, n’apporta pas à la communauté la paix parfaite de la part des autorités civiles et religieuses locales. Les prières de l’évêque de Carpentras, Sadolet, obtinrent toutefois, durant plusieurs années un sursis aux mesures de violence. Mais en 1545, le président de la Cour d’Aix, d’Oppède fit procéder à des exécutions presque sauvages en vingt-deux localités de la vallée de la Durance, dont les plus connues étaient Mérindol et Cabrières. Le nombre des victimes fut estimé entre 800 et 4000. Il y eut, naturellement, de nombreux fugitifs. Des milliers se réfugièrent à Genève, puis en Allemagne. Peu à peu, toutefois, le calme revint dans les vallées vaudoises. Les communautés restées fidèles à la vauderie et celles qui avaient passé au protestantisme traversèrent des alternatives d’épreuves et de tranquillité relative, jusqu’à l’époque contemporaine, où les idées de tolérance, consécutives à la Révolution française, en vinrent à prédominer peu à peu dans toute l’Europe. À plusieurs reprises du reste, sous la Révolution, puis sous l’Empire, les régions des vallées vaudoises appartinrent à la France et y obtinrent la protection des lois nouvelles.

De 1848 à nos jours. —

Par l’Acte d’émancipation du 17 février 1848, le roi de Sardaigne Charles-Albert accorda aux vaudois non seulement la tolérance religieuse dont ils jouissaient déjà depuis l’occupation française, mais encore la complète égalité politique avec les catholiques. Ils exercèrent dès lors une grande activité de propagande dans toute l’Italie et fondèrent une école de théologie à Florence. Actuellement, on estime leur nombre à environ 12 000, dans les seules vallées alpines, sur une population globale de 25 000 habitants. Ils sont répartis en 16 paroisses piémontaises. La direction de la secte est assurée par une sorte de consistoire appelé Table vaudoise. En dehors des vallées, les vaudois ont des paroisses à Turin, en Lombardie, en Toscane dans les Romagnes, en Sicile et jusque dans l’Uruguay, à Rosario. L’ancien commune ou conférence générale de la société vaudoise se réunit, en principe, tous les trois ans. Il peut y avoir, dans le monde entier, de 30 à 40 000 vaudois.

Nous n’avons fait aucune allusion, dans ce qui précède, à la légende originaire du xve siècle et selon laquelle la vauderie aurait pris naissance dès le ive siècle, à la suite de la donation de Constantin au pape saint Sylvestre. Outrés de cet abandon par la papauté de la pauvreté apostolique, des chrétiens protestataires se seraient dès lors retirés dans les vallées alpines, pour y vivre selon le pur Évangile. Il doit rester bien peu de vaudois à croire à de telles inventions, qui furent admises, dans les milieux protestants jusque vers la seconde moitié du xixe siècle. En tout cas, les faits historiques reconnus s’opposent de tout point à des imaginations de cette sorte.

I. Sources. —

Walteri Map, Liber de nugis curialium, éd. Camden Societꝟ. 1850 ; Chronicon universale anonymi Laudunensis, dans Monum. Germ. hist., Seriptores, t. xxvi ; Etienne de Bourbon, Tractatus de septem donis Spiritus sancti, éd. Lecoy de la Marche, Paris, 1877 ; Passauer Anonymus, dans Flacius Illyricus, Catalogus testium veritatis, Francfort, 1566 ; Gretscher, Seriptores contra sectam Waldensem, dans Bibliotheca maxima veterum Patrum, Lyon, 1677, t. xxv ; Baluze, Lettres d’Innocent III de 1208 à 1212 ; Moneta Cremonensis, Adversus catharos et valdenses, éd. Ricchini, 1753 ; Martène-Durand, Thésaurus anecdotorum, t. v, Tractatus de inguisitione hærelicorum ; Bernard Guy, Practica inguisitionis, éd. Douais, Paris, 1886 ; Rescriplum hæresiarcharum Lombardiee ad Leonistas in Alamannia, éd. Preger, dans Publications de l’Académie de Munich, IIIe classe, xiii ; Dôllinger, Beitràge zur Sektengeschichte des Mittelalters, ii, etc.

II. Littérature. —

Nous ne citons que la plus récente : A. Monastier, L’histoire de l’Église vaudoise, 2 vol., Genève, 1847 ; Alex. Muston, L’Israël des Alpes, 4 vol., Paris, 1851 ; Chr. Hahn, Geschichte der Waldenser, 2 vol., Stuttgart, 1847 ; F. Bender, Geschichte der Waldenser, Ulm, 1850 ; J. A. Wylie, History of the Waldenses, Edimbourg, 1880 ; W. Jones, History oj the Waldenses, 2 vol. Londres, 1882 ; A. Bérard, Les vaudois, Lyon, 1892. Tous ces auteurs admettent la légende vaudoise, dont il est parlé à la fin de notre article et sont à rectifier sur ce point capital. Comme ouvrages critiques : F. Comba, Valdoe i Valdesi avanti la Riforma, Florence, 1880 ; du même. Histoire des vaudois, 2 vol., Florence, 1898-1901 ; article très documenté de Bôhmer, dans Protest. Realenzyklopddie, t. xx, p. 799840, avec excellente critique des Sources.

L. Cristiani.


VAUVILLIERS Jean-François, helléniste et homme politique français (1737-1801). —

Né le 24 septembre 1737, Jean François Vauvilliers ne