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accompagné d’imputations calomnieuses contre divers prélats tels que Mgr Guibert, alors archevêque de Paris, Mgr Dupanloup, Mgr Darboy, semblait ne mériter que le châtiment du silence. L’abbé Bernard, aumônier de l’École normale supérieure, crut cependant devoir apporter une réponse à l’écrit de l’abbé Michaud pour réfuter les fausses idées que les ennemis de la religion s’obstinaient à propager au sujet de l’infaillibilité du pape et que l’auteur qui avait revêtu le manteau de Guignol reproduisait à son tour. La réfutation publiée sous forme de lettre chez Douniol, éditeur, révélait une doctrine sûre d’où l’éloquence n’était pas absente. On peut donc l’affirmer, la promulgation de l’infaillibilité ne produisit en France aucun des désordres redoutés par ses adversaires.

II. L’A OITATWN CONSÉCUTI VE A V CONCILE. — 1° Les

origines du schisme des « vieux-catholiques ». — La décision conciliaire troubla plus vivement la vie religieuse en Allemagne et surtout en Suisse. Ce fut le schisme des vieux-catholiques dont nous ne rappelons ici que les traits essentiels (voir l’art. Vieux-catholiques). Ce schisme se réduisit à une faible minorité de professeurs de théologie et de bourgeois, mais n’atteignit que superficiellement la masse des fidèles. Les chefs allemands du mouvement anti-infaillibiliste : Dœllinger, Friedrich, Schulte à Munich, Wolmann et Michelis à Braunsberg, Beusch, Langen, Knoodt à Bonn, à Brestau Baltzer et Beinkens, se bornèrent d’abord à une simple protestation jusqu’au jour où, nommément excommuniés pour refus formel de souscrire au décret du concile, leur expulsion de l’Église les décida à tenir un congrès à Munich au mois de septembre 1871 pour déterminer la conduite qu’eux et leurs partisans auraient à suivre. Une adresse revêtue, dit-on, de 12000 signatures apportées par les dissidents avait été envoyée en même temps à Sa Majesté Impériale pour la supplier de « se mettre à la tête du mouvement contre l’impudence et l’ignorance romaine ». Dœllinger avait dressé le programme de la réunion de Munich. Il s’agissait d’affranchir et de réformer l’Église, de reconstituer l’unité religieuse en excommuniant le pape et tous les évêques catholiques romains qui seraient remplacés par les membres des autres confessions chrétiennes séparées de Borne. Il était dit qu’une décision du pape et des évêques (ceux-ci fussent-ils unanimes) n’est obligatoire pour aucun membre de l’Église, si ce dernier ne la juge pas d’accord avec l’Écriture et la Tradition. C’était introduire dans l’Église le libre examen, caractère fondamental du protestantisme. Ce programme dont nous indiquons simplement l’esprit réformiste fut adopté au congrès de Munich où siéga l’ex-Père Hyacinthe et (lui réunit cinq cents dissidents. On y décida l’établissement d’une Église séparée qui, liant son sort à celui du chauvinisme allemand dans son antipathie raciale contre les races latines, ne fut plus > qu’une simple carte dans le jeu de M. de Bismark », suivant la lumineuse prévision de M. de Pressensé.

C’est en Suisse que l’opposition de l’élément laïque au concile fut le plus intense et le plus étendu. Là aussi, les adversaires de l’infaillibilité se constituèrent en une organisation ecclésiastique Indépendante de Mome et qui prit le nom d’Église chrétienne-catholique. Celle-ci ne fut en réalité que la représentation de toutes les sectes dissidentes si nombreuses en Suisse.

2° Représailles gouvernementales. Les gouvernements avaient eu la sagesse de ne point Intervenir dans les délibérations du concile, Ils estimaient que le moment était passé pour les laïques de s’introduire dans des matières de foi. Quelques-uns devaient cependant marquer leur désapprobation à l’endroit des doctrines formulées par Pie IX en se mettant

contre l’Église sur un pied d’inimitié ou de neutralité armée. Ce ne fut le cas ni en Belgique, ni en Espagne, ni en Portugal. L’Italie elle-même ne manifesta aucune hostilité à l’endroit des décisions conciliaires. En France, la chute du régime ne modifia en rien la ligne de conduite qu’É. Ollivier avait tracée ; aucune objection ne fut faite à la publication des décrets conciliaires. Le gouvernement autrichien, au contraire, tout en rejetant l’idée d’appliquer aux documents du concile le placet royal, profita de la promulgation de l’infaillibilité pour se débarrasser du concordat de 1855, qu’il avait déjà violé par la constitution de 1867. Il déclara que la doctrine proclamée par le concile établissait les rapports de l’Église et de l’État sur une base toute nouvelle en élargissant la compétence du pape et en concentrant tous les pouvoirs en sa personne ; un des deux contractants ayant changé sa situation, le contrat devenait nul ! Dès le 30 juillet 1870, la légation de Borne informait le gouvernement pontifical de l’abolition du concordat. La Hongrie essaya de faire revivre l’ancien droit qui soumettait au placet royal la publication des documents émanés de Borne ; signification en fut faite aux évêques, et les contrevenants furent blâmés.

Les divers États de l’Allemagne prirent de même une attitude hostile. Ce fut la Bavière qui, la première, entra dans la lutte, en essayant de faire revivre le placet royal. Les évêques bavarois protestèrent et un seul d’entre eux, l’archevêque de Bamberg, demanda ce placet qui, d’ailleurs, lui fut refusé. L’agitation vieille-catholique offrit au gouvernement une occasion de manifester son hostilité : il se déclara prêt à défendre par des actes les droits de l’État et de la conscience, en accordant aux vieux-catholiques les droits qui appartenaient à l’Église. La Saxe, le grandduché de Bade, le Wurtemberg adoptèrent une attitude analogue à celle de la Bavière. En Prusse, la publication des décrets conciliaires ne rencontra au début aucune opposition. Mais l’hostilité du gouvernement se dessina quand plusieurs évêques furent obligés par l’attitude des protestataires à retirer la mission canonique à des professeurs de facultés de théologie, à Brestau, à Bonn, à Braunsberg. Vue adresse collective au roi des évêques prussiens, réunis à Fulda en septembre 1871, reçut du souverain une réponse tout à fait défavorable. C’était le début du Kulturkampf, ou lutte pour la civilisation, dont le premier acte fut la suppression, au ministère des cultes, de la section catholique, expressément motivée par le fait de la promulgation du dogme de l’infaillibilité pontificale.

En Suisse, plusieurs cantons prirent une attitude particulièrement hostile, ceux surtout de Bâle et de Genève. Mgr Mermillod, devenu évêque de cette ville qui avait été détachée de l’ancien diocèse de Lausanne, vit des églises de son ressort arrachées aux orthodoxes et données aux vieux-cal holiques, l’ex-Père Hyacinthe élu curé de la paroisse vieille-catholique de Genève. A Bâle, Mgr I. achat eut son séminaire fermé ; une proclamation gouvernementale protestant contre le concile fut imposée à la lecture publique à l’occasion du Jeûne fédéral, des prêtres. des curés, des professeurs de religion furent tracassés ; finalement Mgr Lâchât fut exilé (avril 1873) ; il avait été précédé dans l’exil, deux mois auparavant, par son collègue de Genève. A Peine, sans aller aussi loin, le gouvernement favorisa de tout son pouvoir le schisme ; en novembre 1874 S’ouvrait dans la ville une faculté de théologie i cbrétienne-catbolique oir Histoire <lr lu persécution religieuse à Genève.

Estai d’un schisme pur l’État, 1882. Ainsi dans nombre de pays de langue allemande, le dogme de l’infailli-