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VATICAN (CONC. DU). LES ADHÉSIONS


vellera directement au saint père, dès que la paix lui aura rendu la liberté de ses communications. Dans sa lettre à Pie IX, écrite de Bordeaux le 10 février 1871, il crut pouvoir déclarer ce qui suit : « Je n’ai écrit et parlé que contre l’opportunité de la définition. Quant à la doctrine, je l’ai toujours professée, non seulement dans mon cœur, mais dans mes écrits publics. »

L’exemple de l’évêque d’Orléans eut tout de suite des imitateurs. Un archevêque que la guerre n’empêchait point de communiquer avec son troupeau et qui appartenait lui-même à la minorité, Mgr Lyonnet (Albi), fut l’un des premiers à publier une lettre pastorale sur le concile. Il citait à son clergé le grand exemple donné par Mgr Dupanloup en plaçant sous ses yeux « les belles paroles que l’évêque d’Orléans adressa à son retour de la Ville éternelle aux prêtres et aux frdèles de son diocèse ». Instruction pastorale de Mgr Lyonnet, archevêque d’Albi, sur le concile (28 octobre 1870). Mgr Darboy, archevêque de Paris, avait donné à ses diocésains le même exemple de soumission simple et empressée dès le 25 septembre 1870. Il déclarait lui-même qu’il n’avait jamais été opposé au dogme de l’infaillibilité comme théologien. Il dut remettre au début de février 1871 d’écrire à Pie IX sa soumission. Mgr Maret avait envoyé son adhésion explicite au dogme dès le 15 octobre ; l’année suivante, il fit une déclaration publique plus détaillée. Voir ici son article. En définitive des vingt-cinq évêques français de la minorité, ayant voté non placet à la 85e séance, six seulement, ceux de Metz, Soissons, Châlons, Orléans, Paris et La Rochelle, remirent à 1871 l’expression de leur soumission, et les cinq premiers avaient été empêchés par les faits de guerre. Tous les autres avaient, dès le premier mois, exprimé leur adhésion.

Rome secondait d’ailleurs le mouvement de soumission en prenant certaines mesures pour qu’il ne traînât point. Tant que les évêques opposants n’eurent point fait parvenir leur adhésion, on leur refusa les induits ordinaires, par exemple, celui pour les dispenses du maigre le samedi ; les dispenses d’empêchements de mariage ne leur étaient pas envoyées. Les papiers inédits de Mgr Dupanloup contiennent des plaintes de plusieurs évêques à ce sujet. Cf. Lecanuet, L’Église de France, 1870-1878, p. 54. L’adhésion de Mgr Maret, doyen de la Sorbonne, entraîna celle de ses collègues de la faculté et en particulier celle de l’abbé Jules Loyson, frère du fameux P. Hyacinthe. Après avoir combattu de toutes ses forces l’hypothèse même de la définition de l’infaillibilité dans le journal La Concorde qu’il avait fondé avec le comte de Kératry et l’abbé Bazin, secrétaire du doyen de la Faculté de théologie, J. Loyson crut devoir faire acte de soumission publique. Il se crut même obligé, lorsqu’il vit le P. Hyacinthe continuer son opposition, de désavouer solennellement son frère dont il déplorait l’égarement « non seulement comme un malheur public, mais encore comme un deuil de famille (Leçon d’ouverture de Cours publiée dans la Revue politique et littéraire, 10 janvier 1872). Enfin le P. Gratry qui avait appuyé avec tant de véhémence Mgr Dupanloup dans sa polémique avec l’archevêque de Malines se fit également un devoir d’adhérer à la définition. Dans une lettre à un de ses confrères de l’Académie où il exprimait avec une admirable netteté les motifs de son adhésion, il concluait : « Tout cela ne veut point dire que je n’aie pas commis d’erreurs dans ma polémique. J’en ai commis sans doute sur ce sujet et sur d’autres, mais, dès que je connais une erreur, je l’efface, et ne m’en sens pas humilié. » Ad. Penaud, Le P. Gratry, ses derniers jours, son testament spirituel, dans le Correspondant, t. l, p. 726.

2. En Allemagne.

Sans rencontrer une unanimité aussi rapide qu’en France, la soumission aux décrets conciliaires n’en fut pas moins très exemplaire en Allemagne. On sait avec quelle ardeur les évêques allemands, comme d’ailleurs les évêques autrichiens, firent valoir au concile leurs arguments contre la définition. Tel fut le cas de leurs orateurs : le prince Schwarzenberg, le cardinal Rauscher et NX. SS. Ketteler, Furslenberg, Hefele, Melcher, Strossmayer. Or, tous les évêques de l’Allemagne non autrichienne devaient adhérer publiquement au nouveau dogme. Ils le firent dans un langage plein d’élévation, en déterminant, comme les évêques suisses, avec une extrême clarté le sens vrai de la constitution Poster xternus. Dès le 24 juillet, l’archevêque de Cologne, du haut de la chaire de sa cathédrale, expliquait à ses fidèles la portée du nouveau dogme défini, et le 1 er août la constitution Pastor œternus était promulguée dans la feuille officielle de l’archevêché. Peu après, sur son invitation, les évêques allemands se rassemblaient à Fulda pour délibérer sur les moyens de lutter contre l’opposition au concile qui commençait et devait aboutir au schisme des vieux-catholiques. De cette délibération sortit une lettre pastorale commune signée de dix-sept évêques ou vicaires capitulaires. Les quelques évêques moins prompts à se soumettre, en particulier Mgr Hefele, qui tarda jusqu’en mars 1871, rejoignirent finalement leurs collègues allemands.

En Autriche-Hongrie, il en alla à peu près de même, bien que les retards eussent été un peu plus nombreux et un peu plus longs. Le nonce apostolique à Vienne s’agita beaucoup pour faire passer immédiatement par les exigences de Rome des évêques comme Mgr Schwarzenberg (Prague), Mgr Haynald (Kolocza), Mgr Strossmayer (Diakovo). Le seul évêque suisse qui eut fait partie de la minorité, Mgr Gresth (Saint-Gall ) ne laissa pas de donner en fin de compte une adhésion suffisante. À l’été de 1871, il rédigea même la lettre pastorale des évêques suisses expliquant à leurs fidèles la portée des actes conciliaires. En définitive, dans tous les pays où éclata le schisme vieuxcatholique, il ne se trouva, pour l’encourager, aucun des évêques qui avaient fait partie de la minorité. Quant aux prélats italiens, anglais, américains du Nord, ils étaient trop isolés pour que leur soumission ne se produisît pas immédiatement. Il n’y eut guère que Mgr Errington (archev. i. p. d’Iconium) qu’il fallut solliciter énergiquement pour obtenir une adhésion explicite.

L’adhésion des fidèles.

L’adhésion des fidèles

aux décrets du Vatican suivit-elle partout la soumission des évêques de la minorité ? Ceux-ci publièrent tous le nouveau dogme. En général, il fut accepté avec enthousiasme par l’opinion catholique ; ce fut le cas en France dans la plupart des diocèses. Toutefois, même en France, un certain nombre de catholiques libéraux et plusieurs prêtres de même mentalité repoussèrent la doctrine proposée par le concile ou feignirent de ne l’accepter que pour se soustraire aux peines canoniques d’une opposition publique. C’est qu’ils s’irritèrent d’avoir à opter entre des croyances qu’ils avaient toujours cherché à unir et que, bien à tort, pour avoir donné à l’infaillibilité pontificale une extension qu’elle n’avait pas, ils jugeaient désormais inconciliables. La seule dissidence notoire d’ordre individuel, celle de l’ex-père Hyacinthe mise à part, vint de l’abbé Michaud, vicaire démissionnaire de la Madeleine. Oublieux du renom que lui avait acquis dans le monde intellectuel sa belle étude sur Guillaume de Champeaux, il publia, sous le titre de Guignol et la révolution dans l’Église romaine, un pamphlet scandaleux contre le nouveau dogme. Ce pamphlet,