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VATICAN (CONC. DU). FORMULES SUCCESSIVES


négociations sans espoir, en adresses présentées par les dissidents contre une décision considérée déjà comme inévitable.

Le mois suivant, un incident inattendu devait accélérer la marche des événements. Le 13 mars, un télégramme apportait à Rome la nouvelle de la mort de M. de Montalembert. Grand soldat de l’Église, il était de ces catholiques français qui avaient ouvertement manifesté leur opposition au nouveau dogme dans la période de discussions, bien que parfaitement décidé à s’incliner quand l’heure de la soumission aurait sonné. Mais, trois jours avant sa mort, les journaux de France avaient apporté à Rome une lettre du grand orateur catholique à un jeune avocat de Paris, M. Lallemand, que les Pères du concile se passaient de main en main et où on lisait le passage suivant : « Je salue avec la plus reconnaissante admiration d’abord le grand et généreux évêque d’Orléans, puis le prêtre éloquent et intrépide, le P. Gratry, qui ont eu le courage de se mettre en travers du torrent d’adulation, d’imposture et de servilité où nous risquons d’être engloutis. Grâce à eux la France catholique ne sera pas restée au-dessous de l’Allemagne, de la Hongrie et de l’Amérique. Je m’honore publiquement et plus que je ne puis le dire de les avoir pour amis, pour confrères. » Elle faisait le procès de « ces théologiens laïcs de l’absolutisme (il s’agissait évidemment de Veuillot et de son groupe), qui ont commencé par faire litière de toutes nos libertés… devant Napoléon III, pour venir ensuite immoler la justice et la vérité, la raison et l’histoire en holocauste à l’idole qu’ils se sont érigée au Vatican ». C. L., col. 1385 ; cf. Lecanuet, Montalembert, t. iii, p. 466 sq. Ces derniers mots produisirent l’impression la plus fâcheuse ; elle se manifesta par l’acrimonie montrée par l’assemblée et même les présidents à l’endroit de Mgr Strossmayer, lors de son discours du 22 mars (31e séance), qui n’avait cependant rien à faire avec la question de l’infaillibilité. Texte dans M. -P., t. li, col. 72 sq. ; cf. ci-dessus, col. 2556. La première réaction de Pie IX fut également regrettable ; il fit décommander le service solennel que Mgr de Mérode, beau-frère du défunt, avait organisé à Rome pour le repos de l’âme de Montalembert. Il devait d’ailleurs se raviser quelques jours plus tard.

Toute cette agitation extérieure contribua à précipiter les événements. Saisie des postulata des 28 et 29 janvier, la commission compétente en avait discuté le 9 février et répondu qu’il fallait mettre à l’étude la question de l’infaillibilité. M.-P., t. li, col. 687-696. Mis au courant, le pape avait formellement approuvé cette décision qui avait été transmise le 1 er mars au secrétaire général du concile. Ibid., col. 696. La commission des postulata ne cessait plus de recevoir des projets de formules qu’elle transmettait à la députali’in de la foi. Le 6 mars, le secrétaire du concile annonçait aux Pères la distribution d’un additif au projet primitif De Ecclesia. Au c. iii, qui traitait de la primauté pontificale, était annexé un développement assez court, une trentaine de lignes, qui énonçait le dogme de l’infaillibilité. M.-P., ibid., col. 7(11-702. Sans même attendre cette distribution, « les gens pressée, dès le 28 février, demandaient que, tontes affaires Cessantes, y compris la discussion du projet De fuie, la question de l’infaillibilité fût mise en délibéré. Voir une série de postulata, ibid., col. 703-711. La minorité, non sans raison, protestait contre » cette précipitation passionnée ». Ibid., col. 712 Ali. On remarquera surtout la protestation émise, le S mai. par un groupe important, en tête duquel figurent les deux cardinaux Schwarzenbcrg (l’raguc) et Mathieu

inçon), qui insiste sur les graves Inconvénients qu’il y a à parler de prérogatives du pape, avant

d’avoir mis au clair la doctrine de l’Église. Ibid., col. 727-731. Plusieurs incidents ultérieurs devaient montrer le bien-fondé de ces observations.

Quoi qu’il en soit, le 9 mai était envoyé aux Pères le nouveau projet qui portait le titre : Constitutio dogmalica prima de Ecclesia Christl. M.-P., t. lii, col. 3-7. La seconde phase de la discussion allait commencer.

2° La réalisation. Le projet De Ecclesia et sa discussion. — 1. Travaux préparatoires de la députation de la foi. — Le nouveau projet, soumis à l’examen des Pères et sur lequel allait s’ouvrir la discussion était fort différent de celui qui avait été distribué le 21 janvier. Ci-dessus, col. 2558. Il n’en comprenait que la partie relative aux droits et prérogatives du pape (c. xi). Mais ce chapitre, où il n’était primitivement question que de la primauté pontificale, se dilatait en quatre chapitres, groupés sous un préambule qui conservait les premiers mots de l’ancien c. xi. Ils traitaient respectivement de l’institution divine de la primauté (c. i), de sa transmission de Pierre aux pontifes romains (c. u), de la primauté du pontife romain (c. ni) et enfin de son infaillibilité (c. iv). Cette nouvelle forme, dite Première constitution dogmatique sur l’Église, avait été élaborée par les théologiens consulteurs en collaboration avec la députation de la foi, dont ceux-ci recevaient les amendements et les textes qui lui étaient proposés. Procès-verbaux de la députation dans M.-P., t. lui, col. 238 sq.

De cette œuvre collective, dont les adresses et protestations de la minorité conciliaire n’avaient point arrêté la confection, on trouvera ici une énumération sommaire : Le 27 avril, le théologien Schrader présentait à la 34e réunion de la commission un rapport concernant les observations déjà faites sur le chapitre et les canons De Romani pontificis primatu, rapport à la suite duquel un autre théologien, le chanoine Maïer, proposait d’ajouter un nouveau chapitre au projet primitif. Le lendemain, ce même chanoine présentait à la 35e réunion de la commission ses observations sur la chapitre De injallibilitale. comme suite à sa proposition de la veille. Le 1 er mai était donnée connaissance aux membres de la commission du texte de la première constitution De Ecclesia. M.-P., t. lui, col. 240-244. Il y a des différences assez importantes avec le texte qui devait être distribué le 9 mai à tous les Pères du concile. Le c. m sur la primauté avait été réduit et le c. rv relatif à l’infaillibilité était très différent de sa première rédaction. La définition de cette prérogative était beaucoup plus simple que dans la rédaction actuelle et dès lors beaucoup plus extensible.

Definimus per divinam assistentiam fleri ut Romanus pontifex…, cum supremi omnium christianorum doctoris munere fungens, pro auctoritate définit, quld in rébus Hdei

et morum al) universa F.rclesia tenendutn vel rejicienduni sit.errare non possit ; et hanc Romani ponttflcla infallibilitatis pra-rogativam ad idem obJectUID porrigi, ad quod infnllihilitas Ecclesiæ exlenditur. M.-P., t. LUI, col. 243.

Enfin trois canons se présentaient en plusieurs rédactions ad libitum. Le 2 mai, à la 37’réunion, le chanoine Maïer continuait son rapport. I.e 3 mai, avait lieu, à la 38’réunion, l’examen des chapitres u et m du projet. Importante réunion le 5 mai. la 39e de la commission : le matin a lieu l’examen du projet du c. iv relatif à la définition de l’infaillibilité. Sur cette séance, il y a des renseignements importants dans le Journal de l’évéque de Hatisbonne. (J. ibid., col. 281 I). El l’on voit le cardinal lîilio prendre sou dain parti contre la rédaction du chapitre en question. Il pensait que la définition proposée étendait trop le domaine de l’infaillibilité ; d’autant que le domaine de l’infaillibilité générale de l’Église n’avait pas été