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VALENCIA. DOCTRINES, LA FOI
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vocation et l’impulsion excitatrice, est requis pour la conversion et l’opère, alors elle ne diffère, selon notre théorie, que par une différence de raison de la grâce justificatrice : elle la précède, dans notre manière de concevoir. Nam Ma infusio habitas gratiæ, diversa ralione, est re ipsa et gratia eflicax, et justificatio. Ibid., col. 1212-1213.
j) « Bien qu’il ne puisse arriver que, de deux sujets ayant chacun la grâce efficace déjà définie, l’un se convertisse, l’autre pas ; cependant, il peut advenir et peut-être advient-il parfois que, de deux ayant chacun, en tout pareille, une autre grâce antérieure à la grâce efficace (grâce d’appel ou grâce excitatrice) et qui se donne habituellement, l’un, par grâce en ce cas efficace ou efficacement adjuvante, se convertisse, l’autre pas. » Ibid., col. 1213-1214. Même en sa seconde partie, seule nouvelle et insuffisamment explicite, ce texte a été reproduit tel quel dans l’édition Cardon de 1619. Mais, dans cette édition faite d’après celle que revit Valencia peu de temps avant sa mort en 1603, dix lignes suivent la preuve, l’éclairant à souhait. Égale en tout, de par sa réalité intrinsèque, à celle de celui qui ne se convertit pas, la grâce de celui qui se convertit l’emporte sur elle comme don divin. Car Dieu sait ub œterno le résultat. Ainsi se commentait lui-même, onze ans après publication du t. ii des Commentaires, un Valencia mûri par son labeur aux congrégations De auxiliis. Il ne faisait d’ailleurs que s’expliciter, n’ayant voulu signifier dans son texte que l’être intrinsèque des deux grâces envisagées. Édition Cardon de 1619, t. ii, col. 934.
g) « Prise au sens adéquat, comme formée de la grâce de vocation et de la grâce excitatrice ainsi que du secours qui assure la conversion, de par les habitus de grâce et des vertus, la grâce efficace est ou celle des prédestinés ou, parfois, celle des réprouvés qui ne possèdent pas ce rapport à l’obtention certaine de la béatitude mais est cependant donnée aux réprouvés, lors de leur justification : la première résulte de la prédestination, la seconde non. » Commentaires de 1591, ibid., col. 1219.
2. Coopération humaine. — Aidé de la grâce prévenante, l’homme peut se déterminer, sans détermination surajoutée, ù se convertir. Sa détermination n’est ni la conversion, ni un intermédiaire, ni une simple non-résistance, mais la perfection même du libre arbitre choisissant d’acquiescer. Par elle il Imite la spontanéité divine et oriente à l’acte de conversion la grâce reçue. La conversion s’ensuit, simultanément causée par la grâce et la détermination active. Sur le plan naturel, le concours divin universel joue un rôle pareil à celui de la grâce prévenante dans l’ordre surnaturel. C’est l’homme libre qui, en se déterminant, spécifie le concours.
Bien entendu, surnaturelle ou naturelle notre détermination active dépend de la causalité divine : elle est contingente, seconde, point initiative absolue. (/est pour exclure toute détermination surajoutée que Valencia, comme Molina, tient pour simultané à noire agir l’agir de Dieu. Cf. Cregorianum, 1942, Libre arbitre ri concours selon Molina. Ce n’est certes pas pour soustraire à l’influx divin notre détermination libre : imiter Dieu n’est pas l’égaler. Commentaires, dlst. VIII, q. v, punct 4, ibid., col. 1332-1333.
.’!. Adhésion de raison et adhésion de foi. — Très ctéristique encore de la manière de Valencia est la position qu’il adopte relativement au problème controversé dans l’École et que saint Thomas formule ainsi : ’Inan ea qutr sunt fulci possint este scita ? IMI », q. i, a..V
Dûment précisé, le problème porte sur des vérités
conclues, celles par exemple qui servent d’appui
rationnel à la foi, ou des érites primordiales dont
l’évidence de soi immédiate laisse subsister dans l’esprit convaincu de graves questions ultérieures : la réalité de notre libre arbitre, du devoir moral absolu, du bonum faciendum, malum vilandum. La formule adoptée par S. Harent, pour dégager « le point capital de la discussion », nous paraît bien répondre au commentaire de Valencia. « Un philosophe, écrit-il, qui vient de se démontrer une vérité de théodicée, par ailleurs révélée, ou qui en a du moins la science habituelle, peut-il faire un acte de foi divine sur cette vérité ? » Ici, art. Foi, t. vi, col. 454.
Parmi les tenants de l’opinion négative, Valencia citait déjà, avec saint Thomas d’Aquin, Capréolus, Cajétan et d’autres thomistes, Duns Scot et Richard. Commentaires, t. iii, disp. I, q. i, punct. 4, col. 75. Ils allèguent volontiers l’Est… fîdes… argumentum non apparentium, et ce témoignage de saint Augustin écrivant, à son sujet : nescio ulrum credere dicendus est quisque quod videt, tract, lxxix, in Joan., i, P. L., t. xxxv, col. 1837. D’ailleurs, croire est méritoire ; or, quel mérite à croire ce que l’on sait ? Croire, c’est librement adhérer ; or, comment adhérer ainsi à ce dont on a l’évidence intellectuelle ? Croire, c’est adhérer sans l’évidence du savoir ; mais comment adhérer de la sorte, si l’on sait ce qui est à croire ?
Conscient d’avoir plutôt étoffé les arguments adverses, Valencia en vient à ceux qui affirment, idem secundum idem posse credi et simul cognosci evidenter. Ce sont des théologiens de premier ordre : Alex, de Halès, Albert le Grand, Guillaume d’Auxerre, saint Bonaventure, Durand, Gabriel. « Et, conclut-il, cette opinion me paraît plus probable parce que plus conforme aux saintes Lettres, aux Pères et à la raison. » Aux saintes Lettres, notamment à l’Apôtre affirmant du vrai Dieu accessible à la raison naturelle : « celui qui s’approche de Dieu doit croire qu’il existe et qu’il est le rémunérateur de ceux qui le cherchent », Heb., x, 6 ; « c’est par la foi que nous attribuons à la parole de Dieu d’avoir ordonné les siècles », ibid., xi, 3 ; « puisant sa force dans la foi, Abraham rendit gloire à Dieu, pleinement convaincu qu’il saurait accomplir les promesses faites », Rom., iv, 20-21. Abraham est loué de croire ce qu’il sait ou peut savoir. Dira-t-on, pour le reste, que doivent croire en Dieu rémunérateur ceux-là seuls qui n’ont pas encore réfléchi ? Passant de l’Écriture aux Symboles des Apôtres et de Nicée, Valencia constate que chacun doit croire à chaque article du Credo catholique. Or, ce qui concerne l’existence du vrai Dieu, unique, tout-puissant, créateur, provident, à qui est dû un véritable culte d’adoration, relève en soi de la raison philosophique. En fait plusieurs philosophes connurent ou connaissent ces vérités : faut-il donc dire que cette connaissance les dispensa ou même les priva d’y croire en chrétiens ? Les Pères ignorent pareille dispense, pareille privation, notamment saint Cyrille de Jérusalem, saint Jean Chrysostome, saint Augustin, Rufin. Sans excepter qui que ce soit, ils soulignent l’universel devoir de croire au Symbole des Apôtres.
I.a raison, d’ailleurs, est là pour nous persuader que. bien loin de s’opposer en rien au besoin justifié de croire à telle ou telle vérité naturelle, nos évidences Intrinsèques si pauvres et si peu pénétrantes à son endroit vont plutôt à aiguiser ce besoin, à le rendre plus Impérieux. Entre l’adhésion d’évidence et l’adhésion de foi, il y a harmonie et entr’aide. À cette raison foncière, Valencia en joint une autre. Si l’adhésion rationnelle à une vérité de raison, par exemple à l’existence d’un seul Dieu personnel, excluait la possibilité d’une adhésion de foi en ce Dieu, ce n’est pas profit spirituel mais grave dommage qu’il y
ainaii a s’appliquer au problème philosophique de Dieu. En éliminant l’acte d’adhésion croyante, plus