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2403 UTRECHT ( l’iOLISE D'). ACTION SCHISMATKH.'E DE VARLET 2404

Siège. M. Levage, agent du clergé de Hollande à Rome, écrivait, le 20 mars 1723, que Rome ne relâcherait rien de ses prétentions, surtout depuis que le pape avait appris que le chapitre était appelant de la bulle / 'nigenitus.

Puisque l’on n’avait rien à attendre de la cour de Home, on s’assura que les États de Hollande ne feraient pas d’opposition. Alors les membres du chapitre, au nombre de huit, sous la présidence de Erckel, élurent, le 27 avril 1723, Corneille Steenoven, qui avait fait ses études au collège de la Propagande à Rome et avait -été cinq fois désigné comme délégué du clergé de Hollande auprès des nonces de Cologne et de Bruxelles. Il était l’ami des jansénistes et c’est lui qui, en 1719, fit le panégyrique du P. Quesnel. Le schisme, qui avait menacé, lorsque le clergé refusa de reconnaître le décret qui condamnait Codde, fut consommé en 1723, lorsque le chapitre élut Steenoven. Le jour même de l'élection, le chapitre écrivit au pape pour lui faire part de celle-ci et lui en demander la confirmation avec la dispense des deux évêques, qui, selon les canons, doivent assister l'évêque consécrateur. De son côté, le 18 mai, Steenoven envoya au pape l’acte de son élection et sa profession de foi. Ces lettres restèrent sans réponse, comme celles qui furent écrites les 1 er août et le 29 décembre pour demander la faculté de faire sacrer l'élu par un évêque assisté de deux prêtres. Innocent XIII se préparait à fulminer des censures, lorsqu’il mourut le 7 mars 1724.

Dans plusieurs lettres circulaires, écrites au cours de 1724 à tous les dignitaires du monde catholique, le chapitre se plaignit des procédés du pape à l'égard de l'Église de Hollande ; il disait le devoir que lui imposait le droit naturel, divin et ecclésiastique de pourvoir à sa conservation par l'élection d’un évêque, afin de faire cesser l’anarchie dans laquelle on vivait depuis plus de vingt ans. Le 6 avril, le chapitre avait ordonné des prières et des jeûnes pour l'élection d’un nouveau pape, afin que les suffrages des cardinaux donnassent à l'Église « un sujet capable de remplir une charge aussi importante… et surtout de calmer la tempête qui s'était élevée dans l'Église de Hollande ».

A ce moment parut à Amsterdam un libelle anonyme, qui exposait les principes les plus subversifs de la discipline ecclésiastique. On y rééditait les thèses du canoniste Van Espen et de ses amis : si le pape refusait d’approuver l'élection de Steenoven, on pouvait et on devait consacrer l’archevêque élu ; un évêque voisin, ou, à son défaut, tout évêque pouvait faire ce sacre. Justement alarmés de semblables thèses, les cardinaux, réunis en conclave pour l'élection du successeur d’Innocent XIII, écrivirent, le 8 avril 1724, une lettre à l’internonce de Bruxelles, lui demandant d’instruire les catholiques de Hollande et d’empêcher les évêques invités par les réfractaires de céder à leurs demandes.

L’internonce de Bruxelles publia cette lettre et, le 4 mai, y ajouta une lettre personnelle adressée aux fidèles pour les exhorter à se séparer de ceux qui s'étaient égarés dans les voies du schisme et de la révolte. Le chapitre répondit par des lettres violentes qu’il adressa, le 1 er juin, aux chapitres d’Allemagne.

L'évêque de Babylone était clairement désigné dans la lettre des cardinaux du conclave ; il répondit par un écrit intitulé : Plainte à l'Église catholique contre un libelle calomnieux, répandu sous le nom de Leurs Éminences les cardinaux assemblés en conclave, en date du 8 avril 1724, et la suite de l’appel qu’il a interjeté au concile général, le 15 février 1723, Amsterdam, le 6 juin. L'évêque de Babylone regardait cette lettre « comme un libelle diffamatoire, comme un tissu d’imputations fausses et téméraires, de jugements précipités, d’injures atroces, de faussetés et de

calomnies » et il se plaçait sous la protection du concile général auquel il faisait un nouvel appel.

Le cardinal -Marie Orsini, évêque de Rénovent, fut élu pape sous le nom de Benoît XIII ; il était dominicain et très zélé pour la doctrine de saint Thomas. Le chapitre d’Utrecht lui écrivit, le 2 août 1724, pour le féliciter et lui demander la confirmation de l'élection faite par lui ; de son côté, Varlet écrivit au pape le 4 août. Il n’y eut pas de réponse ; le chapitre regarda ce silence comme un consentement tacite et, le 6 octobre, il invita les évêques d’Arras, Saint-Omer, Namur, Anvers, Ruremonde ; aucun ne répondant, il s’adressa, le 13 octobre, à l'évêque de Babylone. D’après Thierry de Viaixiies, religieux de la Congrégation de Saint-Vanne, treize évêques de France, des théologiens et des docteurs nombreux approuvèrent le sacre, qui fut fait par Varlet, le 15 octobre, avec l’assistance de deux prêtres, chez Arnold Brigode où logeait l'évêque de Babylone ; Thierry de Viaixiies faisait fonction de diacre, de maître des cérémonies et de notaire.

L'évêque de Babylone envoya plusieurs lettres au pape pour justifier sa conduite ; le 15 janvier 1725, il demandait de rejoindre Babylone et il ajoutait qu’il n’avait pas cru devoir refuser son ministère, afin de sauver une Église si célèbre et si respectable, dans le cas d’une nécessité extraordinaire. Quelque temps après, dans un Mémoire, daté du 15 mars, l'évêque de Babylone récapitulait les faits : l’archevêché était vacant depuis vingt-deux ans et le chapitre avait élu Corneille Steenoven, qui avait gouverné l'Église comme vicaire général du chapitre ; on écrivit cinq fois au pape et on décida de surseoir au sacre, lorsqu’on apprit la mort du pape. Le chapitre écrivit aux cardinaux réunis en conclave pour leur exposer le triste état du diocèse ; pas de réponse. Il écrivit au nouveau pape, pas de réponse encore ; il écrivit aux évêques voisins pour les inviter au sacre, pas de réponse ; alors le chapitre s’adressa à lui et il crut de son devoir de répondre à cette invitation ; le sacre eut lieu le 15 octobre. Rien de plus régulier. La nécessité était extrême, le précepte divin et ecclésiastique était urgent. L'élection était tout à fait canonique, d’après le droit incontestable du chapitre qui, depuis plus de vingt ans, demandait le consentement du pape. Il y avait trois ans qu’on présentait à Innocent XIII un évêque canoniquement élu. C’est seulement parce que les évêques voisins avaient refusé sans motif, — ce refus pouvant passer pour un consentement tacite — qu’il avait dû condescendre aux justes désirs du clergé. C’est par nécessité qu’il s'était trouvé seul.pour le sacre, et, dans une nécessité aussi pressante, la loi de l'Église doit céder au précepte divin ; c’est pourquoi il protestait solennellement et faisait appel au futur concile général de toute sentence qui pourrait être portée contre lui, à l’occasion et pour cause de la consécration de l’archevêque d’Utrecht. L'évêque terminait en disant que le pape était trompé par ceux en qui il mettait sa confiance. Puis il renouvelait et confirmait, en tant que de besoin, l’appel qu’il avait interjeté, le 15 février 1723, et sa plainte à l'Église catholique du 6 juin 1724.

Le 23 mai, l'évêque de Babylone écrivit au concile de Rome assemblé par Benoît XIII ; il demandait qu’on prît en considération l’honneur du caractère épiscopal qu’il avait reçu, qu’on maintînt la régularité des jugements ecclésiastiques surtout dans la cause des évêques, et il exposait son cas personnel : « Il y a quatre ans que, dépouillé de toutes choses, exclu de mon diocèse, attaqué par une infinité de calomnies, j’attends ici que le Saint-Siège m’accorde sa protection. » Il avait écrit plusieurs fois à Sa Sainteté et à son prédécesseur et une fois à la Congrégation ; Il