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2399 UTRECHT (EGLISE 1)'). PREMIERS DÉMÊLÉS AVEC ROME 2400

les pouvoirs qu’il exerce dans le sien. Sa puissance est limitée. Sans le consentement du chapitre, tout ce qu’un autre évêque, soit celui de Home, soit celui d’un autre diocèse entreprendrait, pendant la vacance du siège, serait illégitime et contraire à toute discipline ancienne et moderne. Interrogé. Quesnel répondit que le chapitre d’Utrecht pouvait faire appel aux magistrats protestants pour éluder les décrets de Rome et que l’archevêque de Sébaste pouvait nommer lui-même un provicaire pour le remplacer (Causa Quesnelliana, p. 139-143). Mais le canoniste Van Espen fut moins catégorique.

Les provicaires, nommés par Codde, commencèrent néanmoins à exercer leurs fonctions ; mais l’internonce de Bruxelles, sur les ordres du pape, déclara nuls tous leurs actes de juridiction et défendit, sous peine d’excommunication, tant à ces ecclésiastiques qu’aux membres des prétendus chapitres de s’ingérer dans le gouvernement de la mission. Les membres du clergé de Haarlem s’inclinèrent et, un peu plus tard, en 1705, ils protestèrent de leur soumission aux décrets du Saint-Siège, mais ceux d’Utrecht résistèrent et, le 6 mars 1703, firent appel du pape mal informé au pape mieux instruit. Van Catz, Heussen et Erckel se distinguèrent par leurs violences et déclarèrent inopérantes toutes les censures portées par Rome.

Cependant Codde obtint la permission de retourner en Hollande, mais, plusieurs fois, il différa son départ sous divers prétextes ; enfin il quitta Rome en avril 1703 et il arriva à Utrecht le 26 juin. Le bref du 7 avril 1703, qui annonçait le retour de Codde, recommandait d'éviter les erreurs et la malignité des jansénistes ; il préconisait la soumission et la reconnaissance de la primauté qui appartient à l'Église romaine. Ce fut aussitôt un déchaînement contre ce bref et le clergé chercha à obtenir des Etats un décret de proscription. Revenu en Hollande, Codde vit se grouper autour de lui des amis qui lui conseillaient de résister aux ordres de Rome ; les lettres de la Propagande du 25 août 1703 et celles du cardinal Paulucci restèrent sans effet. Rome alors décida de se montrer plus ferme. Par la lettre du 12 octobre 1703, le cardinal Paulucci avertit Codde que le chapitre d’Utrecht ne saurait lui accorder la moindre juridiction et les moindres pouvoirs. Mais les mesures de clémence étaient inutiles. Le 17 janvier 1704, Paulucci envoya une lettre sévère dans laquelle il déclarait que les mesures dictées par les motifs les plus graves étaient définitivement arrêtées. C'était la suspense de toute fonction épiscopale. Beaucoup des amis de Codde lui conseillaient de reprendre toutes ses fonctions, mais la plupart étaient convaincus que la masse des fidèles l’abandonnerait, intimidée par l’autorité du pape, la crainte des excommunications et le crédit des jésuites. Codde n’osa pas se révolter ouvertement ; il écrivit, le 5 mars 1704, une lettre à tous les catholiques des Provinces-Unies pour justifier sa conduite. Les jansénistes prétendent que c’est pour se venger de cette lettre que le Saint-Office condamna, par un décret du 3 aVril 1704, la Déclaration et les Réponses de l’archevêque de Sébaste, « comme renfermant des doctrines et-des assertions pour le moins suspectes, singulières, contraires aux lois et à la discipline de l’Eglise, capables de tromper les simples fidèles et de leur inculquer des erreurs déjà condamnées ». Ce fut alors une véritable explosion de libelles, sous des titres divers : les censures portées contre les écrits de l’archevêque de Sébaste, y lisait-on, étaiciit nulles et de nulle valeur comme l'œuvre de l’ignorance et de l’injustice, uniquement appuyées sur la calomnie et énoncées d’ailleurs en termes vagues et obscurs. Parmi ces libelles, il faut citer l'écrit de Quesnel,

intitulé Avis sincères aux catholiques des ProvincesUnies sur le décret de /' Inquisition de Rome contre l’archevêque de Sébaste, vicaire apostolique, avec [jIusieurs pièces qui ont rapport à cette affaire, in-12, 1704, particulièrement violent contre les jésuites.

Codde publia le 20 août 1704 une Seconde lettre pastorale pour défendre la pureté de sa foi et celle de son clergé ; il y déclarait condamner et avoir toujours condamné les cinq propositions attribuées à Jansénius, dans quelque livre qu’elles se trouvent. Il écrivit aussi trois lettres à Clément XI, les 29 décembre 1704, 15 mai et 5 août 1705, une lettre au cardinal Paulucci, le 2 août 1705, et une à l’internonce de Bruxelles le 8 août 1705, pour demander qu’on lui indiquât les erreurs et les pratiques condamnables qu’on lui imputait. Mais il ne reçut aucune réponse, ce qui, dit-il dans une déclaration, « passera pour une preuve convaincante de l’innocence de sa conduite et de la pureté de sa foi ». Déclaration apologétique de Messire Pierre Codde, archevêque de Sébaste, où il fait une déduction simple et fidèle des principaux faits de son affaire, avec des preuves authentiques et des pièces justificatives, Utrecht, in-12, 1707.

Codde s’abstint des fonctions de son ministère et les quatre provicaires, nommés par lui et qui exerçaient la juridiction en vertu des pouvoirs reçus de lui, se bornèrent aux seuls cas de nécessité. Le chapitre ne cessa de demander la révocation de l’interdit lancé contre Codde, tandis que les États de Hollande, par un décret du 10 mai 1704, bannirent du pays Théodore de Cock. C’est pourquoi l’internonce de Bruxelles désigna Gérard Potkamp pour remplacer ce dernier comme provicaire. Potkamp fut agréé par Codde et publia, le 14 décembre 1705, une lettre pastorale qui ne respirait que « l’union et la paix », mais il mourut le 16 décembre. Pour le remplacer, le chapitre proposa plusieurs candidats, qui ne furent pas agréés par le nonce Bussi ; après des discussions avec le chapitre d’Utrecht et les vicaires généraux nommés par le chapitre, le nonce finit par désigner, le 8 janvier 1707, Adam Dæmen, qui fut sacré, sous le titre d’archevêque d’Andrinople, le 25 décembre 1707. Cependant les libelles se multipliaient pour défendre la cause de Codde. Le 4 octobre 1707, un décret de Clément XI condamnait trente et un de ces écrits comme contenant respectivement « plusieurs choses fausses, calomnieuses pour le Siège apostolique, injurieuses à ses ministres, offensives des oreilles pies, scandaleuses, téméraires, erronées et tendant à un schisme manifeste ». Le décret condamnait aussi divers ouvrages qui, directement ou indirectement, attaquaient le décret de suspense porté contre l’archevêque de Sébaste.

Lors du jubilé universel accordé à l'Église, le nonce de Cologne excepta formellement de cette faveur les réfractaires de Hollande, qui accusèrent les jésuites d’exciter Rome contre eux. Les États, par un décret du 8 février 1708, menacèrent d’expulser ces derniers et, par un décret du 19 juillet, portèrent défense d’introduire dans les Provinces « aucune bulle, bref ou décret quelconque de la cour de Rome ». En présence de ces mesures, Bussi écrivit, le 20 décembre, aux catholiques pour leur interdire toute communication avec les réfractaires dans les choses saintes et, le 22 janvier 1709, il excommunia quelques uns des chefs du parti. Cependant, les provicaires, van Heussen et Erckel, continuaient à exercer leurs fonctions et soulevaient les fidèles contre Rome ; Codde inspirait les révoltés ; Bussi lui écrivit le 28 novembre 1710 pour lui rappeler ses promesses. L’archevêque de Sébaste renouvela ses protestations contre la sentence de déposition prononcée contre lui et contre la condamnation de ses écrits ; il rejetait