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USURE. L’ÉPOQUE CLASSIQUE, LES SOURCES


Lombards, en 1289, révéla des intérêts de 34 à 266%. Davidsohn, Forschungen zur Geschichte von Florenz, Berlin, 1901, t. iii, p. 36-39, n. 139. Dans bien des cas, l’énormité des intérêts s’expliquait par l’énormité des risques. L. Chiappelli, Una lettera mercantile del 1330… dans Archivio storico italiano, 1924, p. 229-256.

L’Église était elle-même engagée dans ce tourbillon. Ses établissements et ses clercs ont des capitaux disponibles pour les affaires locales : depuis longtemps, les monastères font des avances ; les clercs, des placements avantageux. R. Génestal, Le rôle des monastères comme établissements de crédit étudié en Normandie du XIe siècle à la fin du XIIIe siècle, Paris, 1901 ; G. Arias, La Chiesae la storia economica del Medioevo, dans Archivio délia Socielà romana di storia patria, t. xxix, 1906, p. 145-181 ; F. Schneider, Bistum und Geldwirtschajl. Zut Geschichte Yolterras im Mittelalter. Quellen und Forschungen aus italien. Archivai und Biblioleken, t. vin et ix.

Enfin, le Saint-Siège est, de tous les États, celui qui, par son caractère international et l’étendue de ses tâches, a le plus grand besoin des banquiers. L’étude de ses emprunts, commencée par A. Gottlob, Pàpstliche Dartehenschulden des Mil. Jahrhunderts, dans Histor. Jahrbuch, t. xx, 1899, p. 665-717, poursuivie par F. Schneider, Zur âlleren pàpstlichen Finanzgeschichle, dans Quellen und Forschungen…, t. ix, p. 1-37, a été éclairée par Y. Renouard, Les relations des papes d’Avignon et des compagnies commerciales et bancaires de 1316 ci 1378, Paris, 1941. Voyez le résumé de notre communication à la Société d’histoire du droit : L’usure au service de l’Église, dans la Revue historique de droit 1945.

2. Rénovation intellectuelle.

Le bouleversement des conditions de vie s’accompagnait d’une renaissance de l’Antiquité, qui introduisait dans le débat les textes contradictoires de Rome et de la Grèce.

Au début du xiie siècle, la compilation justinienne, dont chaque partie contenait un titre de usuris, entrait dans toutes les grandes bibliothèques de l’Occident, accréditant l’idée d’un statut légal de l’usure. E. Genzmer, Die juslinianische Kodiflcation und die Glossatoren, dans Atti del Congresso internationale di diritto romano, 1934, t. i, p. 347-430. L’effet « le cette renaissance ne sera pas sensible avant les grands commentaires du xiiie siècle, qui poseront, au moins implicitement, le problème des « différences ». .1. Porlemer, La littérature des Differentiæ, thèse de la faculté de droit, Paris, 1943 (Sirey 1946).

Ce n’est que vers 1240 qu’Aristote lit sa grande entrée en Occident, quand Robert Grosseteste publia sa version de l’Éthique à N.icomaque. Luc vingtaine d’années plus tard, Guillaume de Mœrboeke donnait une nouvelle édition, révisée, qui eut grand succès, et traduisit la Politique. L’hellénisme venait au secours des principes canoniques. Cf. Aristoteles latinus et les travaux de Grabmann. En même temps la casuistique arabe et l’exégèse rabbinique purent avoir quelque arecs dans des milieux restreints. Les tes musulmans montraient au commerce de l’argent une hostilité plus résolue encore que les cano nistes chrétiens, accoutumés au droil romain. L. Mas signon, L’influence de l’Islam au Moyen.ge sur la fondation et l’essor ilrs banques juives, dans Bulletin d’études orientales, 1931. Sur l’usure dans la doctrine de l’Islam, cf. Benali Fekar, L’usure en droit. musulman, thèse de droit. Lyon, 1908 ; F. Arin, Rechercha liisto riques sur les opérations usuraires et aléatoires en droil musulman, thèse de droit. Paris, 1909.

, ’i" Tableau des sources. Une telle effervescence, économique et intellectuelle, eut pour conséquence

naturelle de stimuler législateurs et docteurs : leur

activité a été étudiée dans quelques ouvrages dont le

titre général ne doit point faire illusion. Le plus justement réputé est celui de W. Endemann, Studien in der romanisch-kanonislischen Wirtschafts-und-Rechtslehre, Berlin, t. i, 1874 ; t. ii, 1883, qui exploite surtout les œuvres juridiques du xv° siècle. Les origines de la doctrine classique sont étudiées par K. Lessel, Die Fnlwicklungsgeschichle der kan.-schol. Wucherlehre im XIII. Jahrhundcrl. Luxembourg, 1905. Indications sur l’apogée puis le déclin de l’interdit dans A. Orel, Œconomia perennis, t. ii, Dos Kanonische Zinsverbot, Mayence, 1930. Aperçus historiques chez F. Zehentbauer, Das Zinsproblem nach Moral und Rechl. Vienne, 1920. Les ouvrages de Funk, déjà signalés, tracent les lignes maîtresses du sujet, dans les domaines de l’histoire juridique et de la théologie morale. Outre ces études générales sur l’usure, il conviendra de jeter un coup d’œil sur les exposés des conceptions économiques de l’Église (Sommerlad, Schreiber, etc.) et des théories monétaires au Moyen Age. Cf. W. Tauber, Geld und Kredit im Mittelalter, Berlin, 1933.

1. Rôle du droit canon.

Ce fut le droit canon qui donna le branle.

a) Législation. — La grande époque de la législation canonique de l’usure commence à l’avènement d’Alexandre III (1159) pour se clore sous Grégoire IX.

Au concile général de Tours (1163), au IIIe concile du Latran (1179), dans plusieurs décrétales, Alexandre III étendit le domaine de l’usure et frappa durement les usuriers. Urbain III élargit la conception même du délit. Innocent III posa surtout des règles de restitution, dans ses lettres et au IVe concile du Latran (1215). Grégoire IX se prononça, dans un texte célèbre, sur des problèmes de risque. Trois des Compilationes antiquee ont un titre de usuris et ce même titre, aux Décrétales de Grégoire IX comprend dix-neuf chapitres (Décrétâtes, l.Y.tit. xix). Le IIe concile de Lyon (1274) et le concile de Vienne (1311) redoublèrent de sévérité envers les usuriers et dictèrent aux pouvoirs séculiers leur conduite. Sexte, 1. Y, tit. v et Clémentines, v, 5.

Celte législation générale fut préparée ou appuyée par de nombreux conciles particuliers, Avignon, 1209, can. 3 et 1 ; Reims, 1231, can. 2 ; Château-Gontier, vers 1230. eau. 30, etc. Elle lut monnayée a l’usage du clergé, dans les statuts synodaux de chaque diocèse. Voir, à titre d’exemple, les statuts publiés par Martene, Thésaurus…, t. iv (table, au mot Usura). Pour la Belgique, cf. Pigwood, op. cit., p. 580. Les règles et les coutuniiers monastiques ont proscrit l’usure avec une grande et naturelle sévérité. Schaub, op. cit.. p. 139-142. Voir, par exemple, les décisions des chapitres de Cîleaux. en 1190, n. 11, et 1191, n. 55, dans J.-M. Canivez, Slalula capitulorwn generalium ordinis Cislcrciensis. t. i. Couvain, 1933. p. 120 et 113.

b) Doctrine. Les textes du Décret, puis ceux des Compilationes antiques, en lin les divers recueils de Décrétales fournirent aux canonistes la matière de cours et d’ouvrages, dont nous indiquerons les plus utiles pour l’élude de l’usure.

Les gloses du Décret concernant noire sujet ne prennent d’ampleur qu’avec Huguccio (vers 1188), se condensent sous la plume « le Jean le Teutonique

(j^losc ordinaire) el s’enrichissent un peu dans le liosarium de Oui de Baysio, Archidiaconus (1300). Celles des Quinque compilationes sont modestes : cependant Bernard de Pavic et Alanus. glossalcurs de la P. eurent quelque influence. Sur ces ouvrages, cf. st.

Luthier, lirperloriiim der Kanonislik (1140.’Rome, 1937. La glose ordinaire des Décrétales de Grégoire LY, sur le litre de usuris. composée par Bernard de Parme, a été sensiblement augmentée par les

remarques d’Innocent iv (Apparatus, vers 1251),

d’I losl iensis iSumina, vers 1253 <’t l.rclura, vers