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URBAIN V
« bataillon de chapeaux rouges » opérait une forte

pression sur la personne du pape et l’inclinait à quitter l’Italie. Éd. F. Novati, I. II, viii, lettre du 1 janvier 1369. Le souvenir de l’émeute de Viterl>e était habilement exploité, à tel point que Pétrarque cherchait à en diminuer l’importance en la nommant dédaigneusement une « motiuncula ». Opéra, p. 853. Les cardinaux, prétendait encore Coluccio Salutati, « s’aiguisaient » à la lutte et, selon Pétrarque, des « chuchoteurs » obsédaient le souverain pontife. Est-il donc vrai, comme le grand humaniste l’affirme, qu’UrbainV céda au découragement et se montra versatile, faible, docile à suivre les conseils pusillanimes et intéressés de son entourage, victime de son attachement à la France ? Opcru, p. 926-928 (lettre à Francisco Bruni, du 29 juin 1371).

Certes il n’est point facile de déterminer avec précision les divers motifs qui inspirèrent la conduite du pape. Tout au plus le Saint -Père nous a-t-il renseigné en termes vagues : « Nous nous proposons, écrivait-il le 26 juin 1370, de retourner outre monts avec l’aide du Seigneur non seulement pour l’utilité de l’Église universelle, mais encore pour des causes urgentes. » Rinaldi, Annales ecclesiastici, an. 1370, § 19. Au fond Urbain V, sans le dire, estimait qu’il lui serait plus facile, en terre provençale, de rétablir la paix entre France et Angleterre. S’il affirmait que, durant son séjour de trois ans parmi les Romains, il avait vécu en bonne harmonie avec eux, il terminait sa lettre consolatoire par une exhortation à persévérer dans la soumission « afin que si nous et nos successeurs nous voulions pour des causes utiles revenir à Rome, nous ne soyons en rien détourné de ce dessein par un mauvais état de choses ». À bien le lire, le pape prodiguait de bonnes paroles au début et finissait par exprimer des reproches voilés à cause du passé. En effet, au printemps de 1370, les Romains avaient lié partie avec les Pérugins révoltés et le pape avait dû se réfugier à Viterbe, comme l’indique son itinéraire (Baluze, Vitse, t. iv, p. 136), « avec de nombreuses troupes » pour combattre le préfet de Rome, François di Yico. La rébellion de Pérouse dominée, tout danger ne disparut pas ; car le Patrimoine se trouva menacé d’une invasion par suite de l’arrivée sur ses confins de routiers gagés par Barnabe Visconti. Que l’Italie fût redevenue peu hospitalière pour la papauté, Pétrarque se vit contraint de le constater quand il fait tenir à la péninsule personniliée ce discours éploré : « Oui, je dois avouer que j’avais engendré plusieurs fils méchants… J’étais blessée d’ulcères mortels. Tu es descendu vers moi pour panser mes blessures ; …tu as commencé à verser l’huile et le vin. Et puis, alors que mes plaies ne sont pas encore bandées ni pénétrées par le baume, tu te retires de moi. Tu avais commencé à couper les chairs putrides avec le fer, et puis, comme tu le plongeais plus loin, tu as trouvé peut-être des parties qui t’ont semblé incurables. » II. Cochin, La grande controverse de Rome et d’Avignon, p. 12-13. Un chroniqueur précise davantage : « Il [Urbain V] laissa le duché en guerre, et [le pays] de Rome à Urbino, de Bologne à Parme [également] livré à la guerre, à la faim et à des soucis financiers. » Cronaca Riminese, dans L. Muratori, Rerum ilalicarum Scriptorcs, t. xv, col. 912. Ainsi tombe la vaine tentative de récents écrivains qui s’efforcent de minimiser l’insécurité que présentait, en 1370, un séjour à Rome ; cf. Ada Alessandrini, // ritorno dei papi da Avignonee Santa Catarina da Siena, dans Archivio delta società Romana di storia patria, t. i.vi (19331934), p. 15. Que les contemporains aient vitupéré contre Urbain V, cela se conçoit, mais les faits ne peuvent se supprimer et prouvent contre les Italiens ; voir la lettre acrimonieuse et injurieuse des Floren tins adressée le 4 janvier 1376 aux Romains, imprimée dans la 4e édition française de L. Pastor, Histoire des papes, t. i, p. x, Paris, 1911, et une lettre de Pétrarque du 2 !) juin 1371, dans Opéra, p. 920-928.

Le 5 septembre 1370 le Saint-Père s’embarqua à Oorneto, il aborda à Marseille le 10 et s’en fut. onze jours après, en Avignon. Le l’.t décembre, il mourait dans la maison de son frère Anglic où il avait voulu, par humilité, être transporté. Enterré à Notre-Dame-des-Doms le 21 décembre, son corps fut transféré à l’abbaye de Saint-Victor de Marseille le 5 juin 1372. L’épitaphe a été donnée, d’après Ciacconio, par L. Duchesne, Le Liber pontificalis, t. ii, p. 494. Le dessin du tombeau du pape a été reproduit par E. Miintz, dans Revue archéologique, 1889, t. ii, planche xxiv et par les bollandistes, Propglœum maii, p. 93**. L’Église béatifia Urbain V le 10 mars 1870.

I. Chroniques.

La nouvelle édition que j’ai donnée des Vitse paparum Avenionensium de Baluze (Paris, 19161928) contient six extraits de chroniques du xive et du xve siècles. La deuxième vie et la sixième sont seules originales et dues à des contemporains ; cf. mon Étude critique sur les Vitie paparum Avenionensium d’Élienne Baluze, Paris, 1917 et M. Prou, Journal des savants, 1918, p. 225 et 295. Le Petit Thalamus constitue une source de premier ordre. Albanès et Chevalier l’ont édité à nouveau dans Actes anciens et documents concernant le bienheureux Urbain V, Paris, 1897, t. i, p. 88-98. Le t. iv, p. 131-137 des Vitse paparum Avenionensium renferme le texte d’une chronique latine de 1367-1370 reportée dans celle de Bertrand Boysset et qui affecte la forme d’un itinéraire ; Cronache dei secoli XIIIe XIV, dans Documenti di storia ilaliana, t. vi, 1876, p. 207-481 (édition du Diario anonimo Fiorenlino par A. Gherardi, qui concerne la guerre soutenue par l’Église contre Barnabe Visconti).

II. Sources littéraires.

F. Novati, Epistolario di Coluccio Salutati, Rome, 1891-1911, 4 vol. ; Pétrarque, Opéra, éd. de Baie, 1581 ; Magistri Johannis de Hysdinio invectiva contra Franciscum Petrarcham et Francisci Petrarchse contra cujusdam Galli ealumnias apologia, éd. Enrico Cocchia, Naples, 1920 ; H. Cochin, La grande controverse de Rome et d’Avignon au XI Ie siècle. Un document inédit, dans Études italiennes, t. iii, 1921, p. 1-14, 83-94 (réplique inédite à l’Apologie de Pétrarque).

III. Lettres pontificales.

P. Lecacheux, Urbain V ( 1362-1370 j. Lettres secrètes et curiales se rapportant à la France, Paris, 1902-1906, 2 fasc. parus ; Bulles du pape Urbain V concernant le diocèse d’Avranches, dans Revue de l’Avranchin, t. xi, 1902, p. 81-95 ; A. Cabassut, Notices sur dix-huit manuscrits d’origine montpelliéraine conservés à Cambridge, dans Mémoires de la société archéologique de Montpellier, 2e série, t. viii, 1922, p. 215-224 ; A. Fierens, Suppliques d’Urbain V, Paris, 1914 ; M. Dubrulle, Registre d’Urbain V, Paris, 1926, 1 fasc. paru (Lettres communes) ; F. Cerasoli, Urbano Ve Giovanna 1 di Napoli, dans Archivio storico per le provincie Napoletane, t. xx, 1895, p. 72-94, 171-205, 357-394, 598-645 (textes très fautifs) ; R.-R. Post, Supplieken gericht aan de pausen Clemens VI, Innocenlius VI en Ùrbanus V (1342-1366), dans les Sludien van hét Nederlandsch historisch Institut te Rome, t. ii, La Haye, 1937 ; A. Fierens et C. Tihon, Lettres d’Urbain V, Rome, 1928-1932, 2 vol. ; Monumenla Poloniee Vaticana, t. iii, Analecta Vaticana 1202-1366, éd. J. Ptasnik, Cracovie, 1914 ; C. Eubel, Bullarium franciscanum, Rome, 1902, t. vi (très important pour l’histoire des missions sous Urbain V) ; M". Prou, Étude sur les relations politiques du pape Urbain V avec les rois de France Jean II et Charles V, Paris, 1888 (90 pièces de grand intérêt sont imprimées en appendice).

IV. Documents sur la question de l’union des Églises grecque et romaine. — M. O. Halecki a donné une bibliographie très complète du sujet dans un livre excellent : Un empereur de Byzance à Rome.’ingt ans de travail pour l’union des Églises et pour la défense de l’Empire d’Orient, 1355-1375, Varsovie, 1930.

V. Documents financiers.

J.-P Kirsch, Die Rûckkehr der Pàpsle Urban V. und Gregor XI. von Avignon nach Rom, Paderborn, 1898 ; K.-H. Schafer, Die Ausgaben der apostolisehen Kammer unler tien Pàpsten Urban V. und Gregor XL, Paderborn, 1937 ; E. Gôller, Invenlarium ins-