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paru et la lettre de Gebhard de Salzbourg à Hermann de Metz (dans Libelli de lite, t. i, p. 263-279), et le Liber canonum contra Heinricum quarliim (ibid., p. 471-516) d’un anonyme qui pourrait être Altmann de Passau ou Bernard de Constance. Plus important encore était le Liber ad Gebehardum de iManegold de Lautenbach, voir ici t. ix, col. 1825. Bernold de Constance faisait paraître, pou après la mort de Grégoire VII, ses Apologeticæ rationes contra scismaticorum objectiones (dans Libelli de lite, t. ii, p. 94-101). suivies bientôt d’autres opuscules de même inspiration. Voir Bernold, t. ii, col. 792. Tous ces travaux demeuraient dans la sphère relativement sereine de la discussion des idées ; il n’en était plus tout à fait de même d’œuvres comme le Liber contra Guibertum d’Anselme de Lucques (ibid., t. i, p. 517-528) et surtout comme le Liber ad amicnm de Bonizon de Sutri (ibid., t. i, p. 568-620). Cette littérature dont l’importance est considérable pour l’histoire des idées grégoriennes se continue aux premières années d’Urbain II. Bonizon de Sutri, un peu dépité par l’apparent libéralisme d’Urbain, critique, dans son Liber de vita christiana (éd. Perels, Berlin, 1930), les tendances trop modérées du nouveau pape, soutient la nullité des ordinations conférées par les excommuniés, les schismatiques et les simoniaques, tout en proscrivant les réordinations. Note analogue dans le cardinal Deusdedit, Liber contra iiwasores et simoniacos et reliquos schismaticos (dans Libelli de lite, t. ii, p. 292-365) : il faut en finir, disait en somme le cardinal, avec les dispenses et revenir à l’application des règles qui privent de l’exercice du sacerdoce simoniaques et schismatiques et ceux qui ont reçu d’eux leurs pouvoirs ; en même temps le procès était fait de l’investiture laïque. La thèse de l’invalidité des ordinations conférées par les simoniaques ou les schismatiques qui prévalait dans cet ouvrage du savant canoniste était au contraire battue en brèche par le moine Bernold de Constance, qui, à la demande de son évêque Gebhard, écrit en 1094, son traité De reordinatione vitanda et de sainte parvulorum qui ab excommunicalis baptizati suni. Ibid., t. ii, p. 150-156. Sur les diverses doctrines en présence voir l’art. Réordinations, t. xiii, col. 2416 sq. D’inspiration moins restreinte étaient les traités canoniques d’Yves de Chartres, rédigés sans doute à l’instigation même d’Urbain II, avec qui l’évêque fut en rapports personnels. Voir son article ci-dessous. À la vérité ces œuvres diverses témoignent aussi de la diversité des conceptions que la fréquentation des textes du passé avait suggérées aux canonistes. Sur une des questions brûlantes du moment : la validité des ordinations irrégulières, la divergence était flagrante. Presque aussi contesté étail le caractère délictueux de l’investiture laïque. Alors que les grégoriens de stricte observance continuaient sur ce point l’intransigeance absolue de Grégoire VII, Yves de Chartres commençait à per ((voir quc des distinctions s’imposaient. La doctrine le la dispense, enfin, avait besoin d’être approfondie et assouplie.

Dans l’ensemble néanmoins cette littérature témoignait que l’idée de la réforme prenait corps et que, passée la période d’hésitation du début du pontificat, il fal lait se remettre a la grande (euvro entreprise par

(jrégoirc VII. Quelques faits qui se passent au lende main de la victoire d’Urbain II montrent bien le désir du pape de revenir aux méthodes mêmes (huit s’était Inspiré son grand prédécesseur. Le plus caractéristique est la rentrée en scène d’Hugues de Lyon, qui reprend en France ses fonctions de légal permanent du Saint Siège. Cf..lafîé, n. 5523, 10 mai 1094. In peu auparavant Amat d’Oléron avait recouvré lui aussi ses pouvoirs. Cf..lafîé. n. 5492, 17 octobre 1(193.

DICT. m i m OL CATBOL.

En Espagne, l’archevêque de Tolède, Bernard, ajoute à son titre celui de legatus Hornanæ Ecclesiæ. Nous avons vu par contre, que la tentative d’établir en Sicile une légation permanente échoua devant la résistance du comte Roger. Un des fruits de l’activité des légats en question se marque dans la tenue plus fréquente des conciles provinciaux. Parmi ceux qui furent ainsi rassemblés il faut signaler celui qui, à l’instigation d’Hugues de Lyon, se tint à Autun à la mioctobre 1094 et où étaient présents trente-deux évêques. On n’y pourchassa pas seulement les simoniaques et les nicolaïtes. À la demande du légat, l’excommunication fut portée contre l’antipape Guibert et Henri IV, également contre le roi de France, à cause de sa conduite adultère. Cette dernière sentence montrerait aux souverains temporels que le temps de l’indulgence pontificale était révolu. Le ton même des bulles adressées dès ce moment à divers personnages haut placés se fait plus ferme. Voir des exemples dans A. Fliche, op. cit., p. 262 sq.

Tout ceci préparait la tenue du grand concile qu’Urbain II convoque à Plaisance pour le début de mars 1095 et où sont invités tous les évêques d’Occident. C’est, avant tout, dans la pensée du pape, un concile réformateur et l’affluence y fut considérable ; il y aurait eu près de quatre mille clercs et près de quarante mille laïques. Toujours est-il que l’on fut obligé, à cause du grand nombre des participants, de tenir les séances en plein air. S’il s’agissait d’en finir avec le schisme impérial — il n’y fut pas porté cependant de nouvelles excommunications contre l’empereur et son antipape — bien plus encore voulait-on prendre des décisions définitives au sujet des problèmes qu’avait posés cette crise. Celui de la validité des ordinations conférées par les simoniaques et les excommuniés était le plus brûlant. Voir ci-dessus, col. 2281, et cf. art. Béorpinations, t. xiii, col. 24182420. On a dit à ce dernier article combien il est difficile de donner une interprétation correcte des décrets assez ambigus qui nous restent du concile. À les prendre proul son<ml les canons 2, 3 et 4 règlent ainsi la question des ordinations simoniaques. Les fonctions ecclésiastiques acquises à prix d’argent sont nulles (irrita) ; les ordinations faites gratuitement par un évêque simoniaque d’une personne qui ignore cette circonstance sont valides ; elles sont invalides si l’ordinand connaissait que son consécrateur était simoniaque. Pour ce qui est des ordinations faites par des évêques schismatiques, voici ce que règlent les canons 8, 9 et 10. Les ordinations faites par Guibert, depuis sa condamnation par le. pape Grégoire, et celles qui ont été conférées par des évêques consacrés par lui sont sans valeur ; le sont de même les ordinations faites par un évêque excommunié ou intrus, si la situation du consécrateur était connue du sujet ; quant à ceux qui ont été ordonnés par des évêques eux-mêmes ordonnés catholiquetnent, mais (plus tard) séparés de l’Église romaine et devenus schismatiques, ils seront, s’ils reviennent à l’unité, reçus avec miséricorde, on leur conservera leurs ordres, si toutefois leur vie les recommande. Nous ne reviendrons pas ici sur la discussion relative au sens du mot irrilus ou de l’expression titillas unquam pires obtinere censemus. faisons seulement remarquer que, en dehors de tonte discussion théologique, les personnes visées ne pourront jamais être admises, dans l’Église Catholique, à l’exercice des ordres soi-disant reçus. Kn d’autres ternies il n’était plus question de faire jouer a leur endroit cette théorie de la dispense dont l rliain s’elail avisé antérieurement. L’altitude intransigeante des canonistes italiens, tels que Boni/on et Deusdedit. l’emportait sur les conceptions, théologiquement plus exactes, de Bernold de Constance, Du moins met I. ii !

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