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UNIVERSITES


pays et toute l’Europe, les universités (surtout en France et dans les Pays-Bas) connurent les agitations des querelles jansénistes, auxquelles, trop souvent, la politique se trouva mêlée. Tandis que Louvain accueille favorablement la doctrine nouvelle, Paris, qui ne peut avoir d’autre pensée que celle de Louis XIV, fait un accueil assez froid à l’Augustinus. Il est vrai que plus tard, au début du xviii p siècle, l’université se prononça contre la bulle Unigenitus et en appela au futur concile. Mais, peu après, elle se désista de son appel (1739). À dater de ce jour, le parti janséniste la considéra comme mourante et ne lui épargna pas ses sarcasmes.

Néanmoins, l’université de Paris conserva son importance et son prestige. L’expulsion des jésuites (1762), qui avaient combattu l’université, très attachée aux idées gallicanes, lui rendit un regain d’autorité. Le collège Louis-le-Grand (jadis de Clermont) devient un des modèles du genre. Et pourtant l’université de Paris, plus soucieuse de sauvegarder ses privilèges anciens que de moderniser son enseignement à la faculté des arts, reste en retard en ce qui concerne la recherche scientifique : enseignement insuffisant, défaut d’outillage, spécialement de bibliothèques.

Dans la province, la situation des universités françaises n’est pas toujours brillante. Il y a des fondations nouvelles : Dijon (1722), Pau (1722), Nancy où est transférée l’université de Pont-à-Mousson (17(19). Mais les règlements sont variés à l’excès et pas toujours orientés vers les progrès de l’enseignement et de l’éducation. Ces institutions ne remplissent plus leur fonction sociale et n’ont plus, comme au Moyen Age, de contacts suffisants avec l’opinion. S’il eût fallu dresser des plans de réforme de ces institutions d’après les cahiers de doléances de 1789, on eût été bien embarrassé, car les vœux exprimés sont des plus contradictoires et des plus incohérents. Les Constituants furent impuissants à proposer aucun remède digne de ce nom ; ils se contentèrent de supprimer leurs moyens de subsistance en abolissant certains impôts aussi bien que les corporations séculières. Les universités étaient mourantes lorsque la Convention vota leur suppression le 15 septembre 1793. À la veille de la Révolution, on en comptait encore vingt-deux, dont dix-huit étaient réputées fameuses » ; quatre n’avaient pas droit à ce titre. Cf. Marion, Dictionnaire des institutions de la France, p. 547-548. L’Allemagne, au milieu du xviite siècle, en comptait trente-deux dix-huit protestantes et quatorze

catholiques.

Apres la réaction thermidorienne, on tenta de remplacer les universités et les collèges par des écoles centrales », et les facultés de médecine par des écoles de santé (Paris, Montpellier, Strasbourg) ; ce fut sans sucres. Quelques écoles spéciales inaugurées par la Convention réussirent mieux : par exemple le Musée d’histoire naturelle, l’École polytechnique, l’École du Génie militaire, les Ponts-et-chaussées..’.

En revanche. l’Ecole normale fut un échec complet. Le Directoire n’ajouta rien à l’œuvre assez maigre de

le Convention, il fallut ai tendre l’Empire.

6. La période contemporaine. Le contre-coup de la Révolution française fut à peu prés nul en Angleterre, mais plus sensible en Allemagne OÙ retentis soient les appels « le Kant à la liberté (surtout a la liberté philosophique). Il y eut quelques troubles ; i

Francfort-sur l’Oder. Halle, léna, < oit t iugue. mais ils

furent réprimés rigoureusement par le pouvoir.

En Italie, les anciennes universités, aussi bien que

qui avaient VU le jour dans les deux derniers siècles (Païenne, Cagliari, Sassaii), fermèrent leurs portes ; i l’arrivée des troupes françaises ; elles Furent

Dl’i. l>l i m iii, . CÀ i HOL.

remplacées par des académies. En Espagne, au contraire, le calme fut à peine troublé : les mouvements provoqués par les idées révolutionnaires furent vite étouffés.

Dans l’ensemble de l’Europe, après l’époque napoléonienne, il fallait construire ou reconstruire. En Allemagne, du fait de l’occupation des troupes françaises et de la sécularisation des États ecclésiastiques, vingt universités disparurent complètement, parmi lesquelles Cologne, Mayence, Trêves en 1798 ; Bamberg et Dillingen en 1803 ; Wittenberg qui fut réunie à Halle. Par suite du démembrement de la Prusse après léna, ce royaume se trouvait dépossédé de ses plus célèbres universités (Duisbourg et surtout Halle) ; il ne conservait que Kônigsberg et Francfort-surl’Oder, toutes deux dans une situation précaire. C’est au malheur des temps que l’université de Berlin dut sa naissance. La réalisation de l’idée d’une grande université allemande et prussienne est due au ministre Guillaume de Humboldt ; et cette fondation, qui date de 1810, contribua plus ou moins consciemment à forger la nation allemande sous l’égide de l’État prussien. Les noms de Savigny, Eichhorn, Schleiermacher, Schelling, Fichte, Hegel en illustrèrent les chaires. En outre, Francfort-sur-1’Oder fut transférée à Brestau ; Bonn fut créée en 1818 et Munich (1826) prit la place d’Ingolstadt.

La Bussie était une nation dépendante de l’Occident pour l’instruction publique de ses sujets ; les deirx influences allemande et française s’y rencontraient. Il n’y avait dans l’immense empire que deux universités à la fin du xviiie siècle : Mina (ancienne Pologne) et Moscou. La première fondation du xixe siècle fut Dorpat, dans les pays baltes (1802), sur le modèle allemand. Puis il y eut Kazan (1804), Kharkov (1815), Saint-Pétersbourg (1819), Varsovie (1816), et, après l’annexion de la Finlande, Helsingfors (1827).

Dans l’ensemble, ces foyers de culture de l’empire des tzars se laissèrent pénétrer par l’esprit turbulent venu des universités allemandes et aussi par les idées libérales venues de l’Occident. Cependant l’empereur et toute la haute société russe demeuraient imbus de conceptions aristocratiques et monarchiques, en même temps que religieux et dévots dans le sens piétiste. D’où la suspicion jetée sur l’activité des universités. Des mesures réactionnaires ou répressives finirent par creuser un fossé entre l’Etat et le monde intellectuel. Ce furent pourtant les universités qui préparèrent l’évolution politique et sociale, à laquelle les dirigeants russes cherchèrent longtemps à s’opposer même par la force, et qui aboutit aux bouleversements que l’on connaît et qui ne sont pas encore terminés.

En France, l’Empire une fois proclamé, on aboutit, après bien des tâtonnements, à la création d’une « Université impériale » (loi du 10 mai 1806). Cette expression nouvelle désignait le corps auquel était désormais réservé le monopole de l’enseignement et de l’éducation publique à tous les degrés. Le territoire de l’Empire français fut divisé en académies dont le nombre était variable suivant retendue des conquêtes napoléoniennes. En L814, il y en eut jusqu’à quarante ; après la chute de l’Empire il en restait dix-sept. Au fond, ces académies sont définies par les universités qu’elles englobent. Mais elles s’occupent des trois degrés d’enseignement. L’est ce système Impérial qui a prévalu en France jusqu’à nos jours.

L’esprit qui anima l’Université au temps de Napoléon et sons la Restauration était celui-là même que lui avait infusé le fondateur ; le conformisme le plus absolu aux idées gouvernementales. Sous In Restauration il y eut bien une réaction violente contre cette I niveriité, créée par un despote i et considérée

T.

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