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    1. UNITÉ DE L’EGLISE##


UNITÉ DE L’EGLISE. L’ŒC U M É N IS M E CHRÉTIEN

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Du côté de l’anglicanisme, il y eut, au xvir et XVIIIe siècle des pourparlers entamés avec des catholiques sans mandat, en vue de se rapprocher de l’Église romaine. Signalons les négociations officieuses entre dom Léandre de Saint-Martin et quelques personnages de la cour de Charles I er. Les négociations reprirent, sous une forme un peu plus précise, sous Georges I er, entre Wake, archevêque de Cantorbéry et Fllies du Pin. Wake avait été chapelain du vicomte Preston, envoyé extraordinaire à la cour de France et, à {’Exposition de la doctrine catholique de Bossuet, avait répondu par une Exposition de la doctrine de l’Église d’Angleterre. La controverse eut l’avantage d’amener les catholiques à établir avec plus de certitude l’invalidité des ordinations anglicanes. Voir le Mémoire de Renaudot (1695), sur la confirmation et l’ordination que l’on reçoit dans l’Église anglicane. La correspondance Wake-Du Pin fut sans résultat pratique. Les efforts que tenta, de son côté, un abbé Patrick Piers de Girardin, pour provoquer une décision de la Sorbonne sur la réunion des deux Fglises, aboutit à la rédaction, par un comité de théologiens, d’un C.ummonitorium où, des 39 articles, 23 sont acceptés, les autres soumis à des modifications. Du Pin mourut en 1719. Son œuvre de conciliation fut reprise par Pierre-François le Courayer (1729), qui échangea avec Wake une correspondance considérable, laquelle aboutit, en 1723, à la publication d’une Dissertation sur la validité des ordinations anglicanes. Un peu plus tard, Le Courayer publia une Défense de sa dissertation, mais ne parvint à contenter ni les anglicans, ni les catholiques. Condamné par les évêques français, Le Courayer refusa de se soumettre, passa la Manche, se fit protestant. Cf. G. Coolen, L’Anglicanisme d’aujourd’hui, Paris, 1932, p. 101-104.

2. Au XIXe siècle. —

L’initiative d’une union à Rome fut reprise au xixe siècle, en Angleterre, par le mouvement d’Oxford. Voir ici t. xi, col. 1675 sq. La via média qui avait d’abord tant souri à Newman, voir t. xi, col. 332 (maintien des vérités enseignées par la tradition ancienne et rejet des doctrines considérées comme des innovations) devait s’avérer inefficace pour réaliser l’unité. Elle se heurtait d’ailleurs aux intrusions de l’État. L’unité de doctrine conçue à la façon de la Branch Theory de Pusey (dans V Eirenikon, 1865) et des ritualistes (les trois branches catholiques d’un même christianisme : anglo-catholique, catholique-latin, grec-catholique) et propagée surtout par William Palmer ne devait pas avoir plus de succès. Voir Puséyisme, t. xiii, col. 1384 sq. JEirenikon n’obtint pas — cela va de soi — l’adhésion romaine, divisa les catholiques anglais et excita contre Pusey les attaques des protestants. Les tentatives de retour collectif à l’unité par l’Association for the Promotion of the Union of Christendom de Philippe de Lisle, avec le journal The Union, échouèrent, elles aussi, parce qu’elles n’apportaient pas le retour complet à l’unité de la foi. Art. cit., col. 1384. L’association fut d’ailleurs interdite par Pie IX (16 septembre 1864, 8 novembre 1805), Denz.-Bannw., n. 1685. Les démarches entreprises par W. Palmer, avant sa conversion au catholicisme, auprès des chefs de l’Église orthodoxe n’eurent pas plus de succès. Cf. Stan. Tyszkiewicz, La mission de W. Palmer, dans Études, 1913 (t. c.xxxvi, p. 4363, 190-210, 329-343) ; M. d’Herbigny, Anglicans et ortltodoxes, dans Études, octobre 1920, p. 13 sq. Catholiques et orthodoxes exigeaient des anglicans la profession intégrale de la foi et contestaient la validité de leurs ordinations. D’autres anglicans cherchèrent donc une nouvelle voie pour réaliser l’union chrétienne tant désirée. Les uns, comme Lee et Mossmann, baptisés (sous condition), ordonnés et sacrés évêques secrètement, ordonnèrent et consacrèrent d’autres ecclésiastiques (sous le sceau de la confession), afin de préparer ainsi l’union plus facilement ; ils fondèrent YOrder of corporale reunion. Cf. Thurcau-Dangin, La renaissance catholique en Angleterre au XIXe siècle, Paris, 1906, t. iii, p. 53 sq. ; G. Coolen, op. cit., p. 104. D’autres s’efforcèrent de préparer l’union par la fondation d’ordres religieux sur le plan des ordres catholiques (monastère de Caldey). Cf. Questions actuelles, t. cxv, p. 417-435, 450-467. Ces deux mouvements aboutirent à des conversions isolées, mais la réunion en bloc des anglo-catholiques restait encore sans solution. On trouve à Puséyismk, col. 1400 sq., le détail du mouvement lancé en 1 894 par lord Halifax et poursuivi aux conférences de Malines (1921-1925). Ce qui empêcha le mouvement d’aboutir, outre les diflicultés de doctrine et de discipline qu’il ne faut pas minimiser, c’est surtout, comme on l’a dit, col. 1414, « le défaut d’autorité » dans l’Église anglicane. Cf. Protestantisme, col. 897-900.

3. L’œcuménisme chrétien. —

Les tentatives de rapprochement avec l’Église catholique, dont les conversations de Malines avaient paru caresser l’espoir, se sont évanouies. Les protestants cherchent désormais l’union dans le sens de 1’ « œcuménisme ». Mais l’œcuménisme suppose un minimum d’unité réelle ; et c’est là précisément la difficulté presque insurmontable dont on retrouve l’aveu, à peine déguisé, dans toutes les études ou tous les rapports consacrés par nos frères séparés au problème de l’unité chrétienne. Les divisions doctrinales sont si considérables chez les protestants ! Déjà, en 1890, dans son Essai de théologie systématique, Neufchàtel, Grétillat faisait valoir que le Christ n’avait tracé de l’Église que les lignes maîtresses, et qu’en conséquence l’union devait être conçue sur des bases très larges. Quelles que soient les déviations doctrinales ou morales d’une confession, dès lors qu’elle considère le Christ comme le Sauveur de l’humanité déchue, c’est assez pour l’admettre dans la communion de l’Église universelle. P. 460-461. Quelle règle doctrinale d’ailleurs pourrait-on imposer à une société spirituelle « qui dispose des forces propres à l’esprit » (Harnack, Essence du christianisme, tr. fr., Paris, 1902, p. 287) ? Sur les divisions entre protestants, voir Bricout, Religions et Églises, dans la Revue du clergé français, t. xliii, 1905, p. 115 sq. ; Les Églises réformées de France, scissions récentes, ibid., t. lui, 1908, p. 156, 286 ; A. Dossat, La crise doctrinale du protestantisme français, dans la Revue augustinienne, 15 décembre 1908 ; cf. Questions actuelles, 19 décembre 1908.

La position du protestantisme libéral n’est pas susceptible d’amener plus de clarté dans le problème. L’unité n’est plus qu’une forme de pensée ou de constitution imposée par une autorité transcendante à l’homme : Il faut briser ce moule.

La « catholicité nouvelle » reconnaîtra l’autorité divine de l’Église, de la Bible et de la Raison en une synthèse plus haute et plus éclairée. Et l’on verra beaucoup mieux que le miracle de l’Évangile, c’est de n’en être pas un. Le trésor de la Réformation, quand on cesse de l’apprécier en termes de doctrine, est restauré : c’est la réforme des institutions religieuses au nom d’un humanisme tourné vers l’avenir ; ce sont les libertés de conscience et d’opinion, la reconnaissance des Églises nationales, la démocratisation du gouvernement ecclésiastique, la suppression des éléments superstitieux dans le culte privé et public ; c’est l’accent mis sur la responsabilité personnelle de la religion et de la vie morale. André Bouvier, L’unité du protestantisme, Lausanne, 1925, p. 6’2.

On voit de quelle unité vague il s’agit, s’accommodant du rationalisme et du modernisme le plus radical. Peu importent les divergences doctrinales et la multiplicité des sectes : divergences et multiplicité ne doivent pas être considérées comme « divisives »,