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UNIGENITUS (BULLE). l » ROP. 52-58

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Cette proposition est fausse, car la foi peut opérer sans la charité, par exemple, chez le pécheur qui croit et déteste ses péchés par la crainte des châtiments, quand il confesse ses péchés dans le sacrement de pénitence. La foi peut disposer à la justification, mais, seule, elle ne justifie pas, conc. de Trente, sess. vi, c. vi, car il faut la charité, mais cependant sans la charité, la foi peut produire des actes qui préparent la justification. L’auteur de La constitution avec des remarques, prétend que la foi, qui n’est pas animée par la charité, n’est pas une vraie vertu. On peut bien tenir avec saint Thomas que, sans la charité, la foi n’est pas au plein sens du mot une vertu, mais elle peut néanmoins exister et s’exercer.

52. Omnia alia salutis 52. Tous les autres moyens média continentur in fide, du salut sont renfermés tanquam in suo germine et dans la foi, comme dans semine ; sed lisec fides non leur germe et leur semence ; est absque amore et fiducia. mais ce n’est pas une foi

sans amour ni sans confiance. Act., x, 43, éd. 1693 et 1699.

Il y a des grâces actuelles qui précèdent la foi, par exemple, des actes d’humilité, de mortification, d’obéissance, et ces grâces sont des moyens de salut, distincts de la foi et qui la préparent. La grâce nécessaire pour croire précède la foi proprement dite. Or, on ne peut pas dire que ce qui précède la foi est contenu dans la foi comme dans son germe. La seconde proposition semble insinuer que la foi n’existe pas sans amour et sans espérance. Or, on peut perdre la charité sans perdre la foi et la foi qui survit est une vraie foi, bien qu’elle ne soit pas capable de produire des actes méritoires. On peut croire sans aimer, et avec cette foi sans amour, le pécheur conserve le germe et la semence du salut. Il est donc faux de dire que celui qui a la foi sans la charité n’est pas chrétien et que cette foi n’est qu’une foi de démon, que la crainte n’est qu’une crainte de bête, que le culte est tout païen, si cette crainte et ce culte ne sont pas rapportés à Dieu par la charité. La proposition de Quesnel ne fait que reprendre la proposition 12 condamnée par Alexandre VIII.

53. Sola caritas cliristiano 53. La seule charité fuit modo facit (actiones Chris-les actions chrétiennes chrétianas) per relationem ad tiennement par rapport à Deum et Jesum Christum. Dieu et à Jésus-Christ. Col.,

UI, 14, éd. 1693 et 1699.

Cette proposition identifie toutes les vertus chrétiennes à la charité. La charité n’est pas la seule vertu qui fasse chrétiennement les œuvres prescrites ou conseillées par Dieu ; d’autres vertus peuvent avoir le même effet, quoique à un moindre degré, parce que la charité fournit les motifs les plus excellents. Prier, Jeûner, se mortifier par crainte d'être réprouvé sont des œuvres Chrétiennes faites chrétiennement, bien que ces actions soient moins parfaites (pu-si elles étaient faites pour l’amour de Dieu. La crainte de l’enfer et l’espérance du ciel font agir chrétiennement.

54. Sola caritas est, que 54. C’est la charité seule Deo loquitur ; eam solam qui parle < Dieu ; c’est elle

Deus audit. seule que Dieu entend.

I Cor., mu, 1, éd. L693 et

1699.

C’est l’idée déjà exprimée dans la proposition 50.

Dieu écoute aussi les prières des pécheurs qui le sup

plient de leui accorder sa grâce. Il est donc [aux que,

eule, la charité parle a Dieu et que Dieu n’entend que la charité. I ' foi, qui a confiance en Dieu, est entendue de Dieu, qui l'écoute et l’exau

mm commit, nisi 55. Dieu ne couronne que earitatem ; qui mrrit ex lu charité ; qui court par

alio impulsu et ex alio mo-un autre mouvement et un tivo, in vanum currit. autre motif, court en vain.

I Cor., ix, 23, éd. 1693 et

1699.

Cette proposition reprend les propositions 16, 25, 27, 35 et 38 de Baius et les propositions 7-15 condamnées par Alexandre VIII. Sans doute, Dieu ne couronne dans le ciel que les bonnes actions qui ont été faites avec la charité pour principe et pour motif, mais il est faux qu’il ne couronne que la charité, car il y a d’autres vertus ; donc celui qui court pour un autre motif que la charité ne court pas nécessairement en vain ; il court avec fruit, quand il pratique les autres vertus chrétiennes. Les actions faites par un motif de crainte ou en vue d’une récompense ne sont pas inutiles au salut.

56. Deus non rémunérât 56. Dieu ne récompense nisi earitatem, quoniam ca-que la charité, parce que la ritas sola Deum honorât. charité seule honore Dieu.

Matth., xxv, 36, éd. 1693 et 1699.

Sans doute, la charité seule honore parfaitement Dieu et Dieu ne récompense au ciel que les actions qui ont été faites avec la charité habituelle. Mais la proposition condamnée est absolument générale, et il est faux que la charité seule honore Dieu : la foi, l’espérance, les sacrifices, l’obéissance, l’aumône honorent Dieu et Dieu récompense ces vertus. Ici-bas, Dieu récompense parfois par des biens temporels les œuvres moralement bonnes faites par des pécheurs ou des païens ; saint Augustin le dit des anciens Romains. De plus, bien que les œuvres faites par le pécheur par des motifs de foi, d’espérance, de religion, de crainte, ne méritent pas vraiment une récompense (de condigno, comme disent les théologiens), cependant elles peuvent de congruo attirer des grâces qui disposent à la justification.

57. Totum deest pecca- 57. Tout manque à un tori, quando ei deest spes ; pécheur, quand l’espérance et non est spes in Deo, uni lui manque, et il n’y a point non est amor Dei. d’espérance en Dieu, où il

n’y a point d’amour de Dieu. Matth., xxvii, 5, éd. 1693 et 1699.

Pour comprendre l’erreur de Quesnel. il faut se rappeler que l’amour de Dieu ou charité désigne parfois l’amour de Dieu actuel naissant ou dominant, la grâce actuelle ; mais d’ordinaire ce mot désigne la grâce habituelle, qui n’existe que chez le juste ; or, c’est de cette dernière qu’il s’agit ici, puisque Quesnel parle du pécheur. Ht cette proposition est fausse, car la foi et l’espérance peuvent subsister chez le pécheur, qui a perdu la grâce sanctifiante. D’autre part, tout ne manque pas nécessairement au pécheur qui a perdu l’espérance, il peut avoir conservé la foi, d’autres vertus aussi et des grâces actuelles, qui disposent a la charité. Au fond, Quesnel identifie la charité avec les autres vertus, qui en seraient inséparables, alors tpie le concile 1 de Trente définit que la |ierte de la charité n’entraîne pas nécessairement la perte de la foi et de l’espérance. Sess. vi, can. 2.S.

58. Nec Deus est, nec reli- 58. Il n’y a ni Dieu, ni gio, ubi non est caritas. religion, où il n’y a point de

charité. I Joa., iv, S, éd. 1093 et 1699.

Ne pas aimer Dieu, c’est ne pas le connaître comme il faut : donc, sans amour et sans charité, il ne peut y avoir de religion véritable. écrit l’auteur de L(/ constitution avec drs remarques, p. 122. et un

peu plus loin : » les jésuites ne connaissent que l'écorce de la religion, la faisant Consister dans les seules pratiques extérieures, dans les décorations des églises. la musique, les spectacles de la piété el dans la lie