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BULLE). PROP. L8-23
UNIGENITUS


venit, postquam audivit vo-lui, après avoir entendu la

cem exteriorem Filii, nulla-voix extérieure du Fils, n’est

tenus est doctus a Pâtre. poinl enseigné par le Père.

.loa., vi, 45, éd. 1693 ot 1699.

18. Semen verbi, quod 1K. La semence de la manus Uei irrigat, semper parole que la main de Dieu affert fructum suum. arrose porte toujours son

fruit. Act., xi, 21, éd. 1693

et 1699.

Ces deux propositions, sous une forme différente, énoncent la même erreur : la grâce intérieure (voix de Dieu, ou semence divine) est toujours efficace et on ne peut lui résister, car la voix du Père conduit au Fils, et la semence de la parole produit toujours son fruit. Or, il ne suffît pas d’entendre la voix de Dieu ; il faut aussi lui être docile. D’autre part, la semence ne produit pas toujours son fruit, car la nature du terrain et les circonstances peuvent l’empêcher de germer et de se développer. Dans la parabole de la semence, la stérilité de la semence est attribuée, non point au fait qu’elle n’a pas été arrosée, mais à l’intervention du diable, ou au mauvais terrain, aux pierres, aux ronces… Si la proposition de Quesnel était vraie, les pécheurs qui demeurent dans leur péché pourraient se plaindre à Dieu et lui reprocher de ne pas porter de fruit, parce que la main de Dieu ne les a pas arrosés, car autrement ils auraient infailliblement porté du fruit. Tout au contraire, c’est Dieu qui reprochera au pécheur de n’avoir pas coopéré aux grâces qu’il lui avait accordées.

19. Dei gratia nihil aliud 19. La grâce de Dieu est quam ejus omnipotens n’est autre chose que sa voluntas : h ; ec est idea quam volonté toute-puissante. Deus ipse tradit in omnibus C’est l’idée que Dieu luisuis Scripturis. même nous en donne dans

toutes ses Écritures. Rom.,

xiv, 4, éd. 1693 et 1699.

Cette proposition est erronée, car la grâce de Dieu n’est pas que cela, et elle ne saurait être identifiée avec la toute-puissance divine. La bonté, la sagesse, la Providence de Dieu concourent à ce don précieux de la grâce. D’autre part, la grâce doit être envisagée du côté de l’homme à qui elle est accordée et à qui elle demande une coopération.

L’auteur de l’Examen théologique prétend que dans les éditions postérieures, Quesnel aurait écrit : « La grâce n’est autre chose, de la part de Dieu, que sa volonté toute-puissante » ; ainsi, il semble indiquer qu’il ne parle que de la grâce incréée, telle qu’elle est en Dieu ; mais, malgré cette correction, la proposition reste fausse, car même en Dieu, la grâce ne s’identifie pas avec la toute-puissance. Quesnel lui-même dit ailleurs que la grâce est un charme, une lumière, la voix de Dieu… La grâce est toujours regardée comme un secours intérieur, accordé à l’homme pour le bien surnaturel, et elle se distingue de la volonté toutepuissante de Dieu.

20. Vera gratia ? idea est 20. La vraie idée de la quod Deus vult sibi a nobis grâce est que Dieu veut obediri, et obeditur ; im-que nous lui obéissions, et il perat et omnia fiunt ; loqui-est obéi ; il commande et tur tanquam Dominus, et tout se fait ; il parle en omnia sibi submissasunt. maître et tout est soumis.

Marc, iv, 39, éd. 1693 et

1699.

C’est la même erreur ; la grâce est identifiée avec la toute-puissance divine et, comme la proposition est générale, il faut conclure que toute grâce est efficace. En fait, il y a de vraies grâces intérieures, auxquelles on résiste. Dieu commande et n’est pas obéi ; il parle en maître et tout ne lui est pas soumis, car l’homme lui résiste.

Bref, les propositions 16-20, sous des formes diverses, affirment : 1. que toute grâce est efficace ;

2. que jamais on ne lui résiste et qu’on ne peut lui résister, car elle est la volonté toute-puissante de Dieu.

21. Gratia Jesu Cbristi 21. La grâce de Jésusest gratia fortis, potens, su-Christ est une grâce forte, prema, invincibilis, utpote puissante, souveraine, invinquæ est operatio voluntatis cible, comme étant l’opéraoinnipotentis, sequela et uni-tion de la volonté toutetatio operationis Dei incar-puissante, une suite et une nantis et ressuscitants Fi-imitation de Dieu incarnant lium suum. et ressuscitant son Fils. II

Cor., v, 21, éd. 1693 et 1699.

Cette proposition, ainsi que les trois suivantes, identifie la grâce avec la toute-puissance divine, se manifestant principalement dans l’incarnation et la résurrection de Jésus-Christ. La proposition 21 compare, sans aucune réserve, la grâce de Jésus-Christ à l’opération de Dieu incarnant et ressuscitant son Fils. Elle fait entendre, par conséquent, que la volonté de l’homme ne coopère pas plus à l’opération de la grâce que la nature humaine n’a coopéré à l’incarnation et que le corps de Jésus-Christ ne coopéra à sa résurrection. Donc la grâce est toute-puissante, souveraine, invincible.

22. Concordia omnipoten- 22. L’accord de l’opératis operationis Dei in corde tion toute-puissante de Dieu hominis, cum libero ejus dans le coeur de l’homme voluntatis consensu, de-avec le libre consentement monstratur illico nobis in-de sa volonté, nous est carnatione, veluti in fonte at-montré dans l’incarnation, que archetypo omnium alia-comme dans la source et le rum operationum misericor-modèle de toutes les autres diæ et gratia ?, qua ? omnes opérations de miséricorde ita gratuitæ atque ita de-et de grâce, toutes aussi pendentes a Deo sunt sicut gratuites et aussi dépenipsa originalis operatio. dantes de Dieu que cette

opération originale. Luc,

i, 38, éd. 1693 et 1699.

Cette proposition mérite les mêmes critiques que la précédente. Sans doute, la gratuité de la première grâce est démontrée dans l’incarnation qui est toute gratuite, mais l’accord de la grâce avec la liberté humaine n’est point représenté par l’incarnation car l’union hypostatique du Verbe avec la nature humaine n’a point été libre pour cette dernière.

D’après l’auteur de La constitution Unigenitus avec des remarques, p. 62, Quesnel comparerait l’accord de la liberté et de la grâce non point au consentement de la nature humaine de Jésus-Christ dans l’incarnation, « mais la comparaison consiste en ce que, comme Dieu ne s’est point servi de la sainte Vierge pour opérer en elle l’incarnation de son Fils, sans lui demander auparavant son consentement, de même aussi il n’opère point dans les cœurs sans leur demander, pour ainsi dire, leur consentement pour ce qu’il veut opérer en eux, c’est-à-dire, qu’il n’opère en eux qu’en conservant leur liberté dans son entier, quoique ce soit lui qui donne ce qu’il demande ».

D’ailleurs on ne peut pas dire d’une manière absolue que toutes les opérations de la grâce soient totalement gratuites, comme l’incarnation, car il est de foi que le juste, par ses bonnes œuvres, mérite l’augmentation de la grâce et de la vie éternelle. Concile de Trente, sess. vi, can. 32.

23. Deus ipse nobis ideain 23. Dieu nous a donné tradidit omnipotentis opéra-lui-même l’idée qu’il veut tionis sua ? gratiæ eam signi-que nous ayons de l’opéficans per illam qua créa-ration toute-puissante de sa turase nihilo producit et grâce, en la figurant par celle mortuis vitam reddit. qui tire les créatures du

néant, et qui redonne la vie

aux morts. Rom., iv, 17,

éd. 1693 et 1699.

Cette idée est empruntée au synode de Dordrecht, qui comparait l’opération de la grâce à la création et à la résurrection des corps. C’est évidemment la