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    1. TROIS-CHAPITRES##


TROIS-CHAPITRES. CONCLUSIONS

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contraire les diocèses de Vénétie et d’Istrie toujours soumis aux Byzantins. Le retour de Grado à l’allégeance romaine ne fut d’ailleurs pas définitif. Vers 625, un défenseur des Trois-Chapitres, Fortunatus, parvint à s’y faire élire comme patriarche ; il finit d’ailleurs par passer sur le continent et devint le titulaire schismatique d’Aquilée. Ainsi les deux parties de l’ancien patriarcat d’Aquilée tendaient à se ressouder. Le pape Honorius, intervint avec vigueur. Primogénius, un sous-diacre régionnaire romain qu’il envoya sur place, fut élu et consacré. Cf. Jafîé, n. 2016. Désormais le schisme avait dit son dernier mot à Grado et dans toute la région byzantine.

Sur le continent il persévérerait encore jusqu’à la fin du vu 8 siècle. La soumission à Rome du patriarcat d’Aquilée fut l’une des conséquences de la conversion des Lombards ariens au catholicisme. Celle-ci eut lieu au milieu de ce siècle-là, sous le roi Aripert (653-661), sans que l’on puisse donner là-dessus de grands détails. Une quarantaine d’années plus tard, le petit-fils d’Aripert, Cunipert (688-700) s’employa à faire cesser le schisme qui, dans une partie de son royaume, divisait les tenants du Credo de Nicée. Par ses soins un concile fut réuni à Pavie où discutèrent les évoques de l’obédience romaine et les schématiques d’Aquilée. On finit par s’entendre : des légats furent envoyés par Damien, évêque de Pavie, au pape Serge I er (687-701), lui expliquant les points qui restaient à débattre ; des messagers d’Aquilée se rendirent aussi à Rome. Le pape leur donna, paraît-il, les apaisements convenables ; à leur retour à Aquilée le patriarche fit sa soumission à Rome : Hujus lemporibus (de Serge) Aquileiensis Ecclesiæ archiepiscopus et synodus qui (sic) sub eo est, qui sanctum V uniuersalem (sic) concilium utpote errantes suscipere diffidebant ejusdem beatissimi papæ monilis alque doctrinis instructi confessi sunt eumdemque venerabilem concilium satisfacli suscepcruid. Et qui prius sub erroris vitio tenebantur, doctrina apostolicie Sedis intuminati cum pace consonantes veritati ad propria relaxati sunt. Liber pontij., éd. Duchesne, t. i, p. 376 ; et cf. art. Serge I er, t. xiv, col. 1915. Bède qui n’a pas très bien saisi l’affaire écrit : « Un synode réuni à Aquilée, ob imperitiam fidei V universale concilium suscipere difjidit, mais les instructions qui lui furent données par le pape Serge l’amenèrent à s’y rallier avec toutes les autres Églises du Christ. » De temporum ralione, 66, P. L., t. xc, col. 569. Peu importe d’ailleurs que ce soit à Pavie, à Rome ou à Aquilée qu’aient été fournies les explications. Le concile de 553, condamnant les Trois-Chapitres était maintenant reçu dans toute l’Église latine, comme il l’était, depuis longtemps, dans toute l’Église grecque.


VIII. Conclusions. —

Cette longue et pénible affaire des Trois-Chapitres pose un certain nombre de questions. Les unes roulent autour du problème christologique, les autres autour de la question du magistère infaillible de l’Église.

Relativement aux questions christologiques.

La solution donnée par le Ve concile à l’affaire des Trois-Chapitres a-t-elle amené, dans le développement de la christologie, un changement essentiel ? Pour répondre à cette question, il convient d’examiner successivement le point de vue de l’histoire et celui de la théologie même.

1. Du point de vue de l’histoire.

Le Ve concile, si on envisage historiquement les choses, peut difficilement échapper au reproche d’avoir fait à la tendance monophysite des concessions regrettables. Rendue* nécessaires pour des raisons politiques plus que religieuses, ces concessions, bien loin de désarmer l’opposition faite au concile de Chalcédoine n’ont abouti qu’à la renforcer. En dépit des assurances données pu les plus modéré- dis monophysites, le Ve concile n’a pas réussi à refaire l’unité religieuse de l’Orient. Cinquante ans plus tard il faudra que le même gouvernement qui a cru rallier les monophysites par la condamnation des Trois-Chapitres improvise de nouvelles formules destinées à favoriser l’union. Ce seront les formules monénergistes et monothélites dont on sait quelles crises douloureuses elles ont amenées dans l’Église.

Ceux qui en 533 réclamèrent ces concessions justifiaient leurs demandes par l’éternelle accusation portée par les monophysites contre Chalcédoine, ce concile « nestorien » ; ceux qui les acceptèrent emboîtèrent trop aisément le pas à leurs partenaires. Sans doute n’osèrent-ils pas confesser ouvertement le t nestorianisme du grand concile, du moins convinrent-ils, dans leurs actes, que le nestorianisme y trouvait un point d’appui. Rien de plus significatif que de voir agiter, par certains, dès les premières décades du vie siècle, le spectre du nestorianismus redivivus. Il l’a été par les moines scythes, aussi bien que par Léonce de Byzance — si tant est que ce dernier n’ait pas été l’un des moines scythes. Visiblement l’accusation de « nestorianisme » a été dirigée contre les chalcédoniens très authentiques qu’étaient les acémètes de Constantinople. Quand on a voulu justifier, à quelque temps de là, la proscription des auteurs des Trois-Chapitres, on a prétendu qu’une propagande recommençait en faveur de leurs écrits. C’est la même accusation que, sitôt après Éphèse et l’Acte d’union, avaient lancée Proclus et Cyrille. Elle était moins justifiée encore au vie siècle qu’au siècle précédent. Il faut avoir le courage de nier cette résurrection, à Constantinople, au temps de Justin I effet de Justinien, d’un « nestorianisme » quelconque. Il restait du moins ceci, c’est qu’en certains couvents de la capitale on s’intéressait, tant au point de vue de l’histoire qu’à celui du dogme, aux productions des vieux docteurs antiochiens et aux écrits de tous ordres qu’avait fait surgir le grand conflit de 431 — c’est au couvent des acémètes que Rusticus se documentera. — De la lecture de ces écrits se dégageait sans doute l’impression qu’une théologie était possible, assez différente de celle qui, pour l’instant, s’élaborait sous la plume de Léonce de Byzance. Pour faire bref, appelons cette théologie des acémètes celle de YHomo assumplus, réservant à celle de Léonce le titre de doctrine de VU nus de Trinitate incarnatus. Au vrai, les deux systèmes théologiques expriment chacun l’un des aspects de l’ineffable mystère de l’Homme-Dieu ou du Dieu fait homme. Il n’y avait pas à les opposer l’un à l’autre, bien plutôt convenait-il d’en faire la synthèse. Retenons du moins qu’il était inexact, du point de vue de l’histoire, de crier si fort, vers les années 530, au péril nestorien.

Le vrai péril, c’était le monophysisme et la protection avérée qu’il trouvait, au Sacré Palais même, en la personne de Théodora. Vers lui finira par pencher Justinien lui-même et l’on ne saurait oublier qu’un des derniers actes du basilcus sera pour imposer comme doctrine officielle le monophyissme sous la forme de l’aphtartodocétisme de Julien d’Halicarnasse. Cf. Évagrc le Scolastique, H. E., t. IV, c. xxxix, P. G., t. lxxxvi b, col. 2781. Et, pour ne pas descendre si bas, il paraît bien que la pensée de Théodore Askidas, le principal conseiller de Justinien dans cette affaire des Trois-Chapitres, tendait vers le monophysisme sévérii n. C’est bien ce qu’avait remarqué Pelage, du temps qu’il était apocrisiaire à Constantinople ; c’est ce que remarquera Vigile lui-même. En définitive l’affaire de* Trois-Chapitres, vue du point de vue de l’histoire, apparaît bien comme un essai de revanche du monophysisme.

2. Du point de vue de la théologie.

Gel estai R-t-il abouti ? En d’autre* Urnus 1rs décisions du Y’concile