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    1. TROIS-CHAPITRES##


TROIS-CHAPITRES. LE V « CONCILE

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damnons un certain nombre de propositions, quoi qu’il en soit de leur origine, qui ont pu lui être attribuées. Et Vigile d’énoncer, sous forme d’anathèmc, cinq propositions qui, de fait, n’ont aucune attache, sauf peut-être la quatrième, avec la doctrine authentique de Théodoret.

Venait enfin le tour d’Ibas et de sa fameuse lettre. Cette pièce que l’on voulait condamner avait fait l’objet à Chalcédoine d’une enquête que Vigile avait étudiée documents en mains. La sentence du concile avait été rendue, après mure délibération ; la lecture de la lettre ayant été le fait essentiel qui fit Juger Ibas orthodoxe. Et le pape reprenait à son tour l’exégèse de la lettre incriminée et montrait que rien ne s’y découvrait d’hétérodoxe : poleramus de singulis memoratæ epislolæ locis ac sensibus per singula reddere rationem. Ibid., p. 305. Si le brigandage d’Éphèse avait condamné Ibas, c’est parce que celui-ci professait la doctrine correcte des deux natures. Ibas avait pu critiquer Cyrille, il l’avait moins déshonoré que Dioscore et ses comparses, qui faisaient du patriarche le patron d’une doctrine hérétique. Nous déclarons dès lors, poursuivait le pape, que reste en vigueur la sentence de Chalcédoine sur Ibas ; nous ne permettons à personne d’y rien modifier par addition, soustraction ou changement. Mais nous entendons aussi ne porter par là aucune atteinte aux douze anathématismes cyrilliens avec lesquels, tout bien considéré, peut se concilier le fait de la réception d’Ibas par le concile. Ibid., p. 310. Et, polémiquant contre ceux qui prétendaient que l’approbation donnée par le pape Léon aux actes du concile couvrait seulement les définitions dogmatiques : elle couvre encore, disait le pape, les décisions relatives aux personnes ; la défense de toucher en quoi que ce soit aux actes de Chalcédoine est clairement exprimée en différents documents émanés de ce pape ou de l’un de ses successeurs, Simplice. Ces diverses pièces montrent avec quelle réserve il faut toucher à ce qui a été antérieurement décidé. Ainsi avions-nous fait, nous-même dans notre premier Judicatum, où nous avions expressément réservé l’autorité de Chalcédoine (cf. ci-dessus, col. 1894). Ce Judicatum, d’ailleurs, nous le considérons d’ores et déjà comme définitivement annulé par le présent acte. À ces causes, nous défendons à tout ecclésiastique de rien faire de contraire à ce que nous venons d’ordonner ici ou de soulever désormais, après la présente définition, post présentera deftnitionem, l’affaire des Trois-Chapitres. Tout ce qui pourrait être dit, fait, écrit, à ce sujet, par quelque personne ecclésiastique que ce soit, nous le déclarons nul et non avenu par l’autorité du Siège apostolique, auquel par la grâce de Dieu nous présidons : Hoc modis omnibus ex auctoritaie Sedis apostolicx, cui per Dei gratiam prsesidemus, efjetamus (refutamus). Suivait la signature de Vigile, de seize évêques, italiens, africains, illyriens, un grec, de l’archidiacre de Rome, Théophane, et des deux diacres romains Pelage et Pierre. La pièce était datée du 14 mai 553.

On ne saurait trop attirer l’attention sur la finale du Constitutum. Il est peu d’actes pontificaux où ait été engagée d’une manière aussi solennelle l’autorité du Siège apostolique, où un pape ait pris, avec autant de conviction, la responsabilité de la définition qu’il donnait. Cette définition vise sans doute les vérités dogmatiques impliquées dans la condamnation des thèses tout au long réfutées dans le document ; elle s’étend aussi à des faits, spécialement à l’innocence de Théodoret et d’Ibas ; elle affirme que la lettre lue au concile de Chalcédoine est bien celle de l’évêque d’Édesse à Maris et que cette lettre, soigneusement étudiée par le pape, est orthodoxe. C’est plus que n’avait dit le concile même de Chalcédoine. Nous aurons besoin de toutes ces constatations par la suite.

Les délibérations et les décisions du Ve concile.

Dans le temps même où le pape achevait la rédaction de son Constitutum, le concile avait commencé de siéger. On sait que des actes conciliaires il existe deux recensions (latines toutes les deux), l’une brève, donnée par toutes les collections avant celle de Hardouin, l’autre plus longue qui, publiée d’abord par Baluze en 1683, a passé dans les recueils ultérieurs et finalement dans Mansi, t. ix, col. 178 sq. Tout se passe comme si le texte long était l’original, d’où l’on aurait fait disparaître, avant de le communiquer à Vigile, divers passages où le pape était mis en trop fâcheuse posture. Sur tout ceci voir la préface de Baluze reproduite dans Mansi, Concil., t. ix, col. 163-172.

session. — Le concile s’ouvrit le 4 mai et entendit immédiatement la lecture d’un message du basileus. Celui-ci rappelait la diffusion, par les nestoriens, des œuvres de Théodore, de Théodoret et d’Ibas, les mesures prises à l’encontre par l’autorité impériale, les assentiments donnés par l’ensemble de l’épiscopat, la nécessité d’obtenir maintenant une adhésion unanime aux proscriptions édictées par le gouvernement. De son côté le pape Vigile avait, à plusieurs reprises, anathématisé les Trois-Chapitres et clairement manifesté sa volonté en condamnant ceux de son entourage qui lui faisaient opposition. Son Judicatum d’avril 548 témoignait mieux encore de ses sentiments. Depuis, il semblait avoir eu des retours en arrière et le basileus donnait un aperçu rapide des dernières négociations. Nonobstant ces atermoiements, le concile était invité à comparer à l’enseignement des quatre conciles celui de Théodore et de la lettre d’Ibas, à discuter la question de savoir s’il était permis de condamner les morts, à se prononcer enfin sur le cas de Théodoret. À ce message impérial fut ajoutée la lecture des pièces échangées vers l’Epiphanie 553 entre Eutychius et Vigile, ci-dessus, col. 1900. Sur quoi le concile exprima le désir que le pape vînt lui-même siéger au concile ; il fut décidé qu’une députation lui serait envoyée à cette fin. Ainsi fut fait ; mais une double démarche tentée le 6 et le 7 mai demeura sans résultat.

IIe session. — La deuxième séance, 8 mai, dut enregistrer d’abord ce résultat négatif, et entendre le récit de la double délégation qui s’était rendue auprès du pape. On crut comprendre qu’en fin de compte celui-ci avait déclaré que si, dans le délai fixé (il s’agit des vingt jours après la deuxième communication faite par l’empereur, ci-dessus, col. 1901), il n’avait pas pris position, le concile aurait toute liberté de délibérer. Après quoi l’assemblée décida qu’une invitation serait envoyée aux évêques latins de séjour à Constantinople, les priant de siéger au concile. Les démarches furent faites sur l’heure. Mais les Latins répondirent qu’en l’absence du pape ils ne pouvaient se présenter. À quoi l’assemblée déclara que l’on ne tiendrait compte de l’absence ni de Vigile, ni de ses évêques et qu’on se réunirait le lendemain.

IIIe session. — Cette séance du 9 mai ne fut que de pure forme. Avant d’examiner la question des Trois-Chapitres, le concile voulait déterminer sa position dogmatique : il reconnut donc les quatre grands synodes précédents et aussi les Pères orthodoxes d’après lesquels il se réglerait. La discussion sur les Trois-Chapitres fut renvoyée à une séance ultérieure. Le concile voulait sans doute donner des preuves de sa bonne volonté et ne pas anticiper sur le délai qu’avait fixé le pape.

IVe session. — Mais le lundi 12 mai, le délai de vingt jours demandé par le pape le lundi de Pâques, 21 avril, était expiré. Le synode commença l’examen des propositions extraites des ouvrages de Théodore, les mêmes qui avaient été envoyées à Vigile, augmen-