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    1. TROIS-CHAPITRES##


TROIS-CHAPITRES. L’AGITATION MONOPHYSITE

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ce qu’avait exprimé le bureau de l’assemblée. Théodoret recouvrait donc l’Église de la cité de Cyr.

2. Ibas. — L’évêque d’Édesse, au début du concile, passa davantage inaperçu, on ne saurait dire quand il prit séance pour la première fois, mais son nom se retrouve parmi les signataires de la définition conciliaire à la vie session. Son cas donna lieu un peu plus tard à de longues tractations qui remplirent les xe et xie sessions.

A la x c, Ibas fit son entrée et rappela qu’il avait été condamné à Éphèse bien qu’absent. Il demandait donc que fussent lus les deux jugements rendus en sa faveur à Tyr et à Beyrout, qui l’avaient déclaré innocent des blasphèmes à lui imputés. Dans leur lettre aux juges, les clercs d’Édesse avaient attesté la pureté de sa doctrine. De cette lettre les légats romains demandèrent la lecture, aussi bien que celle des procès-verbaux de Tyr, c’est-à-dire de l’acte de conciliation qui avait terminé en Syrie l’action judiciaire de 448. Les signataires de cette pièce, présents au concile, en reconnurent l’authenticité. Sur quoi les légats crurent pouvoir terminer aussitôt l’affaire et proposèrent la mise aux voix. Mais, devant le silence général de l’assemblée, le bureau remit au lendemain la discussion. C’est donc à la xie session seulement que l’affaire d’Ibas fut liquidée. Dès l’abord quelques évêques proposèrent de la terminer immédiatement sur le vu du procès-verbal de Tyr. Une certaine opposition se manifesta pourtant : il y avait des accusateurs et qui demandaient à être entendus. Introduits, ils exigèrent la lecture des procès-verbaux de Beyrout, ces pièces devant montrer l’équité de la sentence d’Éphèse. On s’expliqua d’abord, non sans confusion, surla conciliation réalisée à Tyr, puis sur les actes de Beyrout, y compris la fameuse lettre à Maris que l’accusation apportait en témoignage de l’hétérodoxie de l’évêque d’Édesse. Cette lecture terminée, Ibas demanda que, fût également lue la lettre que les clercs de son Église avaient écrite en sa faveur. Satisfaction lui fut donnée par le bureau, qui rejeta sans plus la réclamation des accusateurs d’Ibas prétendant que la lettre des clercs d’Édesse avait été maquillée. Mais, pour l’édification de l’assemblée, il proposa que fussent lues les pièces du procès fait à Ibas au Brigandage d’Éphèse. Les légats romains s’y opposèrent avec la dernière énergie : les actes de l’assemblée d’Éphèse avaient été déclarés par le pape nuls et non avenus, il était inadmissible qu’il en fût rien lii, même à titre documentaire ; s’il le fallait, ils recourraient directement à l’empereur pour empêcher cette lecture. Anatole de Constantinople et plusieurs autres dignitaires se rallièrent à ce point de vue, que l’assemblée accepta finalement. Le bureau demanda dès lors que l’on passât au vote sur le sort à faire à Ibas. Les légats exprimèrent les premiers leur sentiment : « Lecture faite des pièces du procès, nous reconnaissons que, par la sentence des évêques (de Tyr, de Beyrout, d’Antioche), Ibas a été reconnu non coupable (àveùôuvov). Et nous-mêmes, après lecture de sa lettre, nous le reconnaissons orthodoxe, àM<xyviùaQziari< ; yàp -ôjç èîtioToX^ç aùxoû è7TSYvw[jL£v aùxôv ÛTtapxeïv ôp66-SoÇov. C’est pourquoi nous décidons de lui rendre l’honneur de l’épiscopat et l’Église dont il a été injustement chassé. » Nous verrons ultérieurement à quelles discussions a été soumise cette phrase des légats. Remise dans son contexte elle est absolument claire. L’orthodoxie d’Ibas a été attaquée ; en gage de son hétérodoxie ses accusateurs ont fait valoir tout particulièrement la lettre écrite par lui à Maris. Or, lecture faite des pièces du procès, et tout spécialement de la fameuse lettre, les légats ont reconnu l’orthodoxie d’Ibas. Sans doute leur sentence n’est pas équivalente à celle-ci : « La lettre d’Ibas est parfaitement orthodoxe » ; du moins exprime-t-elle cette idée que la lecture de cette pièce ne permet de rien dire contre l’orthodoxie de son auteur. Il est bien clair, par ailleurs qu’il ne peut s’agir, dans tout le contexte que de la lettre à Maris. C’est elle, elle seule qui est en cause. Sans doute une autre lettre a été lue aussi à Beyrout, celle du clergé édessénien en faveur de son évêque calomnié. Elle figurait dans les procès-verbaux de Beyrout et mention spéciale est faite de sa lecture à Chalcédoine. Mais il serait absolument invraisemblable qu’elle ait pu être désignée par les légats comme « la lettre d’Ibas », ttjç èmcTolr^ç ocûtoû.

Les votes émis par les autres membres du concile ne présentent rien de spécial ; tout au plus faut-il signaler celui de Juvénal de Jérusalem, suivant qui « il fallait pardonner au pécheur repentant ». Lui non plus ne doutait pas que le débat portât sur le caractère plus ou moins regrettable de la lettre à Maris. Il était loin de s’exprimer comme les légats ; du moins déclarait-il que le pardon pouvait être accordé à l’auteur de la fameuse lettre. En fin de compte on demanda seulement à l’évêque d’Édesse d’anathématiser Nestorius. Bien différent en cela de Théodoret, Ibas n’avait pas de raison particulière de se refuser à ce geste. Il jugeait sévèrement les incartades de l’archevêque déposé. Sans l’ombre d’une hésitation, il prononça l’anathème qu’on lui demandait. L’aventure de Théodoret et d’Ibas semblait définitivement liquidée.

3. Théodore.

Il n’y avait pas de raison pour qu’il fût question de lui à Chalcédoine. Son nom ne fut jamais prononcé dans les débats conciliaires. Toutefois il était parlé de lui avec beaucoup d’éloge dans la lettre d’Ibas à Maris. Ce passage quand il fut lu ne suscita, s’il faut s’en fier aux procès-verbaux, aucune manifestation ni hostile, ni favorable. L’attention de l’assemblée était ailleurs. C’est donc par une flagrante exagération que les monophysites accuseront plus tard le concile de Chalcédoine d’avoir rendu hommage à la mémoire de l’évêque de Mopsueste. Que sa doctrine des deux natures soit passée dans le décret dogmatique du concile, c’est incontestable, mais ce décret professait en même temps sur l’union une doctrine qui était fort éloignée de celle de Théodore. En dépit des affirmations indéfiniment reprises par les adversaires, Chalcédoine avait trouvé la via média entre le dyophysisme outré d’Antioche et le monophysisme, verbal ou réel, apparent ou larvé, d’Alexandrie.


III. L’agitation monophysite contre les Trois-Chapitres.

Ce que fut cette résistance des monophysites aux décisions de l’assemblée qu’ils appelèrent immédiatement le « concile maudit », nous n’avons pas à le raconter ici. Rappelons seulement que cette agitation d’apparence doctrinale s’ac< ompagna bien vite d’une effervescence politique. Ce n’est pas exclusivement pour des raisons religieuses que la Syrie et l’Egypte prirent feu contre Chalcédoine ; les revendications autonomistes des particularismes nationaux étaient, beaucoup plus qu’on ne l’imagine, au point de départ de ces mouvements d’apparence religieuse. Et cela permet de comprendre la politique en apparence un peu décousue des basileis. C’est pour empêcher des divisions menaçantes qu’à bien des reprises, en dépit des objurgations romaines, ceux-ci paraissent disposés, à abandonner Chalcédoine.

Au temps de l’Hénotique. —

L’Hénotique de Zenon, en 480, est la plus éclatante manifestation de cet état d’esprit. Le basileus, en somme, reconnaissait les deux hiérarchies schismatiques qui venaient de se constituer à Antioche et à Alexandrie. Pour faciliter les rapports entre celles-ci et l’Église officielle de Constantinople, il prescrivait à cette dernière le silence absolu sur la doctrine chalcédonienne. Ce ne sont pas tes