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    1. TROIS-CHAPITRES##


TROIS-CHAPITRES. IBAS D’EDESSE

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taux, il subsistait, soit dans les œuvres de Cyrille même, soit dans les recueils de correspondance que l’on ne tarda pas à rassembler, des preuves indéniables. Elles établiraient aux yeux des monophysites le « nestorianisme > de Théodoret. Tout cela ne tarderait pas à se manifester.

Ibas d’Édesse.

Comme son affaire est peut-être la plus épineuse dans la querelle des Trois-Chapitres, il faut, malgré ce qui a été dit à son article, exposer avec quelque détail et le curriculum vitse du personnage, et la fameuse lettre écrite par lui, et les malheurs qui bientôt après lui arrivèrent.

1. Les commencements d’Ibas.

Ibas avait commence par être professeur à la fameuse École des Perses, transférée de Nisibe à Édesse en 363. Au moment où ce jeune maître inaugurait son enseignement vers 411, l’évêque de la ville était Rabbula. Après avoir siégé à Éphèse au concile de Jean, celui-ci avait fait volte-face et était passé dans le camp cyrillien. Rentré chez lui, il avait mené la vie dure à ceux qui ne s’étaient pas convertis avec lui à la théologie de l’unique nature. Cf. Synod., n. 132 (43), p. 86 ; col. 649. Postérieurement, nous l’avons dit col. 1871, il sera l’animateur de la campagne contre les vieux docteurs antiochiens. Dans l’entrc-temps son attention avait été attirée sur les idées et l’enseignement d’Ibas, sur la propagande aussi que celui-ci faisait en faveur de Théodore de Mopsueste, dont il répandait, traduits en syriaque, les textes essentiels. Il faut croire néanmoins qu’Ibas jouissait à Édesse d’un certain crédit, car à la mort de Rabbula, il fut élu pour lui succéder (435-436).

2. La lettre à Maris.

C’est d’ailleurs avant son épiscopat que se place sa fameuse « lettre à Maris le Persan », qui sera pour Ibas, de son vivant la cause de pénibles aventures et qui, au Ve concile, sera considérée comme le tertium capitulum.

Le destinataire serait un évêque de Perse, nommé Maris. Comme ce nom ne se retrouve pas dans les listes épiscopales de Perse, on a pensé à une confusion. Mar, en syriaque, est le titre d’honneur que l’on donne aux évêques ; la lettre était adressée à Mar… un tel, dont le nom est tombé ; et on s’est plu à penser qu’il s’agissait du catholicos lui-même, simple conjecture que rien ne vérifie. Selon toute vraisemblance la lettre était écrite en syriaque, mais elle fut de bonne heure traduite en grec. Il en existe actuellement un texte grec dans les Actes de Chalcédoine, act. xi ; un texte syriaque qui, loin d’être l’original, est une retraduction du grec, dans les Actes syriaques du Brigandage d’Éphèse ; plusieurs textes latins : dans les diverses versions latines de Chalcédoine, dans Facundus d’Hcrmiane, Pro dejens. III capit., t. VI, c. iii, P. L., t. lxvii, col. 662 sq., dans la traduction latine du V » concile. Partout le début manque ; mais il est clair que la lettre a été écrite au lendemain de l’accord de 433.

Ibas veut donner à son correspondant une idée te de ce qui est arrivé ; celui-ei fera part de ces Mouve Iles à ceux qui sont sous sa juridiction ; on saura de la sorti dans l’empire perse que la doctrine traditionnelle n’a pas éprouvé de changement. Ibas com-Bence donc p : ir n’humer ce que Maris sait déjà, l’altrrc. -ition entre Ncstorius et Cyrille. Le premier disait que Marie n’était pas iluotocos et ses propos pouvaient donner à penser qu’il partageait l’hérésie de Paul de lamosate, suivant qui le Christ était un homme comme les autres, t^lXoç &v0pto7ro< ;. Cyrille, de son côté, en voulant réfuter Nestorius donna l’impression qu’il tombait lui-même dans l’erreur d’Apollinaire. « Comme celui-ci, de fait, il enseignait que c’était le Verbe divin qui s’était eluuipé en homme, ’ans qu’il Y’"' » iitn I. I. nifii i t celui qui l’habitait. Il composa douze capitula où l’on voit que, selon lui, unique est la nature de la divinité et de l’humanité en Jésus-Christ, qu’il ne faut pas faire de départ entre les diverses expressions que le Seigneur a employées pour parler de lui-même ou que les évangélistes ont dites de lui. Mais comment serait-il possible de prendre comme dits du temple né de Marie des mots comme ceux-ci : « Au commencement était le « Verbe », ou inversement attribuer au divin Monogène le mot du psaume : « Vous l’avez mis un peu au-dessous des anges. » L’Église, en effet, confesse avec fermeté, d’après la tradition des Pères, deux natures, une seule puissance, une seule personne (7tp6ejMTîov), qui est l’unique Seigneur Jésus-Christ. » « À cause de cette contestation les empereurs ordonnèrent la réunion à Éphèse d’un concile qui porterait un jugement sur les propos de Nestorius et de Cyrille. Mais, avant que tous les évêques fussent arrivés, Cyrille, prévenant les autres, trouva le moyen d’aveugler les intelligences, et cela à cause de la haine qu’il portait à Nestorius. Sans attendre l’arrivée de Jean, on déposa Nestorius, en dehors de toute enquête. Deux jours après arrivèrent les Orientaux (Ibas était du nombre, quoique simple prêtre ; il dit en effet : nous arrivâmes). Ayant donc appris et la déposition de Nestorius et la proclamation comme règle des douze chapitres de Cyrille, contraires à la vraie foi, ils déposèrent Cyrille, déclarant la communion rompue avec ceux qui s’étaient ralliés aux anathématismes. Cette division dura longtemps et certains en profitèrent pour donner cours à leurs rancunes personnelles ; tel le tyran d’Édesse (Rabbula), qui, sous prétexte de foi, se mit à poursuivre non seulement les vivants, mais les morts eux-mêmes, tout spécialement Théodore (de Mopsueste), le héraut de la vérité, le docteur de l’Église. C’est lui que l’homme de toutes les audaces a osé anathématiser. Au sujet des livres de Théodore une grande enquête fut menée et l’on déclara contraires à la vraie foi des ouvrages que, du vivant de Théodore, Rabbula lisait et louait beaucoup. Les choses en étaient là, quand l’empereur s’est mis en tête d’imposer la réconciliation entre Jean et Cyrille. Une lettre adressée par l’évêque d’Antioche à ce dernier contenait une profession de foi à laquelle il lui fallait se rallier, en même temps qu’il anathématiserait ceux qui disent que la divinité a souffert ou qu’il n’y a qu’une seule nature de la divinité et de l’humanité. Dieu qui a souci de son Église a bien voulu attendrir le cœur de l’Égyptien ; il s’est rallié à cette formule, anathématisant tous ceux qui croient autrement. Ainsi la paix a été rétablie. »

A cette histoire sommaire du conflit de 430 et de l’accord de 433, Ibas joignait les formules rédigées par Jean et les réponses de Cyrille. À les lire, son correspondant verrait et il pourrait annoncer à ses frères que les dissensions avaient pris fin, que ceux qui étaient partis en guerre contre les morts et les vivants étaient confondus, s’excusaient de leurs excès et professaient des doctrines contraires à leurs premiers enseignements. Nul n’osait plus dire : unique est la nature de la divinité et de. l’humanité » ; tous confessaient leur foi au temple et à celui qni l’habite, en un seul dis, Jésus-Christ, è(jLoXoYOÛmv etç tov vàov xal tic, t6v èv aÙTÔi èvotxoûvTa, 6vxa £va utov’Itqooûv Xptor6v.

Telle est cette lettre d’Ibas, qui fera couler des flots tl’i lui. Elle exprime très sensiblement le point de vue dl N. us le-Orientaux, tant sur les événements exté1 1’un que sur les doctrines en conflit. Si (Ile est nettement défavorable à Cyrille, elle ne cherche pas à innocenter Nestorius, pour qui elle est plutôt sévère. La théologie qui s’y exprime est celle de tout l’Orient, celle de Théodore, si l’on veut, mais expriméi tontes les réwi. Elle ne peut paraître